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La FIFA au bord de la crise de nerfs

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La FIFA au bord de la crise de nerfs

Malgré une santé économique indéniable et ses 208 membres (plus que l'ONU, avec par exemple la Palestine et la Nouvelle Calédonie), la FIFA, seul rival crédible du CIO dans le sport mondial, traverse pourtant une sorte de crise permanente dont le dernier soubresaut vient de se manifester avec l'actuelle fronde menée par Karl-Heinz Rummenigge. Le patron du Bayern Munich défend dorénavant l'idée saugrenue que les grands clubs comptent davantage que les fédérations. Mais il paraît que les Munichois finissent toujours par capituler...

C’est un fait avéré, les grandes instances du sport internationales sont rarement les organisations les plus démocratiques qui soient. Le CIO est fondé sur une cooptation qui permet au prince de Monaco de réaliser son voyage de Noces à Durban. La Fifa, de son coté, à l’instar de l’ONU, s’appuie sur un savant mélange de lutte d’influence ou de rivalité entre les fédérations et les confédérations qui sont censées représenter les intérêts de leurs licenciés. En dépit d’une sérieuse volonté affichée de “transparence”, l’instance suprême du ballon rond compose donc avec la multitude des conceptions quant aux relations entre “seniors” et la tectonique délicate des féaux qui évolue d’élection en élection autour de la désignation du président (tous européens depuis le départ, à l’exception notable du Brésilien João Havelange). Tout cela avec en Graal absolu le pactole les droits télé récupéré par cette multinationale du foot basée en Suisse (un choix judicieux pour gérer tranquillement ses petites affaires).

Or à vouloir trop donner dans la parodie pluraliste, la FIFA, tout comme la FFF récemment, a eu droit cette année à son petit frisson démocratique. Mohammed Bin Hammam avait planifié de se présenter contre le régent Sepp Blatter (sans oublier la candidature du journaliste américain Grant Wahl, qui a au moins gagné, avec cette annonce stérile, 123 000 followers sur Twitter). Cette ingratitude a dû lui sembler insupportable après l’attribution de la Coupe du Monde au Qatar. Depuis, le boss de la confédération asiatique a dû retirer son nom du scrutin en raison de forts soupçons d’achat de voix lors d’une réunion à Trinidad (en passe de devenir le Macao du ballon rond), puis finalement “banni à vie” de toute activité liée au foot.

C’est dans ce contexte que Karl-Heinz Rummenigge, l’ancien crucificateur des Bleus à Séville, désormais président à la fois du Bayern Munich et de l’Association européenne des clubs, s’est souvenu des spartakistes allemands et a sonné le tocsin d’une “révolution” dans le football – quand on connaît la nature des révolutions parties de Bavière, hein – dont les nouveaux sans-culotte seraient le Real Madrid ou Manchester United. « Je ne suis pas optimiste parce qu’ils (les dirigeants de la FIFA) croient que le système fonctionne parfaitement tel qu’il est. C’est une machine à faire de l’argent, Coupe du Monde après Coupe du Monde. Et pour eux, c’est plus important qu’un management sérieux et propre » . Cette révélation tardive, sûrement inspirée par une lecture insomniaque d’Andrew Jennings après l’adoption du “fair-play financier” par l’UEFA, vient donc saper un peu plus la paisible communion de la Sainte Trinité (Fédérations, confédérations, FIFA) en son église de Zurich. « Le système actuel est fait sur mesure pour les fédérations et approuvé par les fédérations. Elles ne voteront pas contre la FIFA » . En gros, les pontes de la FIFA achèteraient leur tranquillité, notamment auprès des multiples petites fédérations africaines ou d’Océanie, par exemple avec le FAP. « Le Programme d’Assistance Financière (FAP) doit motiver les associations membres et les confédérations à mettre en œuvre des programmes de développement sur mesure et à renforcer durablement le football et la gestion du football et leur donner les moyens de le faire » dixit le site web officiel.

Les propos sibyllins de l’ancien héros de la Mannschaft et du FC Servette (toujours la Suisse) laissent surtout entendre que l’élite des clubs possède plus de droits et de moralité aujourd’hui que ceux qui représentent, certes très imparfaitement, les pratiquants du monde entier (250 millions environ). Cependant, ce souci brûlant d’améliorer le fonctionnement d’une grosse machine héritée des premiers élans associatifs du foot moderne au début du siècle dernier ne cache-t-il surtout la seule véritable inquiétude des clubs : la blessure ou l’indisponibilité du joueur en sélection nationale et son coût ? « En Coupe du Monde, il y avait 16 équipes, maintenant il y en a 32. Les clubs paient les joueurs mais ne font pas partie du processus de prise de décisions. Nous ne sommes pas traités correctement » . Comme toujours, le capitalisme imparfait du foot professionnel raisonne à l’envers. Que vaudraient sans leurs capes internationales les Arjen Robben, Takashi Usami, Danijel Pranjić ou encore Franck Ribéry ? Peut-on répondre à une démocratie impuissante par une oligarchie éclairée, sociale-démocratie bedonnante contre populisme musclé ? Une fois encore, le foot pose les bonnes questions à la société, mais n’apporte jamais les réponses adéquates…

Nicolas Kssis-Martov

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