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Gaëtan Courtet : « La Ligue 2 est tellement critiquée qu’elle en devient belle »
Quatrième de la saison, Dunkerque affronte Guingamp ce mercredi soir (20h30) dans le Nord pour toujours croire à une montée en Ligue 1. L’USLD pourra compter sur l’inusable Gaëtan Courtet (36 ans), pas vraiment prêt à raccrocher les crampons, lui le grand habitué de cette Ligue 2 qu’il aime tant.

Sais-tu combien de matchs de Ligue 2 tu as au compteur ?
Je dirais 365 ?
371 ! Ce chiffre représente quoi pour toi ?
Une grosse, grosse fierté. Je les additionne toujours au reste de mes matchs professionnels et j’approche tranquillement des 500 ! Une barre un peu symbolique, qui serait exceptionnelle pour moi. Ce n’est pas que je n’étais pas prédestiné à faire cette carrière, mais pas beaucoup de gens me voyaient faire ça. Et moi, je l’ai vécue à fond. Mais elle n’est pas terminée !
Il t’arrive de te poser et de prendre un peu de hauteur sur ce chiffre des 500 (il en est à 489) ?
J’y ai pensé à Guingamp, quand j’ai passé les 400. Je me disais que 500, ça allait être très compliqué à aller chercher. Finalement, je n’en suis plus très loin.
L’ancêtre ? Quand je cours autant que les jeunes, c’est dur de dire ça !
Ce chemin te fait-il repenser à certaines remarques que tu as pu entendre de la part d’éducateurs qui ne croyaient pas en toi ?
Oui, mais tout ça m’a servi ! Un jour, en U16, un coach a dit : « Son meilleur pied, c’est la tête. » Et ça, ça ne m’a pas plu alors que je marquais pas mal de buts. C’était très réducteur par rapport au joueur que j’étais. Je n’avais pas aimé. Mais je leur dirais quand même merci, parce qu’ils m’ont poussé à être plus fort, à être prêt mentalement et à me dire : « Ok, pas de problème, si tu ne crois pas en moi, ne t’inquiètes pas, je vais tout faire pour que quelqu’un d’autre y croie. » Cela a été le cas, et ça dépend aussi de personnes qui croient en toi à un moment donné dans la vie, comme ça a été le cas avec Xavier Dablemont, qui me recrute pour le Stade de Reims (2010).
Cette ancienneté, on y fait référence dans le vestiaire dunkerquois ?
C’est secret. (Il sourit) ! Forcément, les plus jeunes aiment bien m’appeler l’ancien. Mes plus fidèles amis dans le vestiaire, comme Alec Georgen ou Enzo Bardeli, aiment bien m’appeler l’ancêtre. Mais, là, parfois, je leur mets des petites claques derrière la tête. (Il sourit.)
L’ancêtre, c’est trop ?
C’est trop, c’est trop ! Quand je cours autant que les jeunes, c’est dur de dire ça ! J’aime bien me défendre avec ça.
Gaëtan Courtet, fusée (selon lui) 🚀😂#TeamUSLD pic.twitter.com/agQ6RruBqM
— USL DUNKERQUE 🐬 (@usldunkerque) March 20, 2025
371 matchs donc. À quel point tu l’aimes, ta Ligue 2 ?
(Il rit.) On espère toujours jouer plus haut. À un moment donné, j’ai peut-être loupé un petit train. Et, ensuite, j’ai vu que les profils d’attaquants recherchés n’étaient plus du tout le mien. Donc j’ai vite compris qu’il allait falloir faire une belle carrière, mais à l’étage en dessous. Cette Ligue 2, je l’aime autant que j’ai envie de continuer encore et encore. Avec une passion et une énergie qu’on ne pourra jamais m’enlever. Je ne suis pas toujours le meilleur, mais, en revanche, je jouerai toujours à 100%.
Ce petit train loupé, c’était quand ?
L’année où je fais une saison un peu moins bonne avec Reims en Ligue 1. Une saison cohérente, mais je ne marque pas de but (en 2013-2014). Au lieu de rester, je fais le choix d’aller à Brest, car j’avais le besoin de jouer. J’aurais pu être un petit peu plus patient et rester en Ligue 1. Après, ça m’a peut-être permis de faire une très belle carrière en Ligue 2 donc… Ce sont des choix que je ne regrette jamais. La vie fait les choses d’une certaine manière, et c’est qu’il y a une raison.
Avant, tu avais très peu d’équipes qui avaient cette envie de jouer au ballon, de ressortir le ballon, avec un vrai travail derrière. Aujourd’hui, ça va beaucoup plus vite, les joueurs sont plus rapides, c’est beaucoup plus technique…
Reims, Brest, Auxerre, Lorient, Ajaccio, Guingamp, Dunkerque. Tu es un peu le Xavier Gravelaine de la Ligue 2.
(Il se marre.) Je ne sais pas… J’ai juste envie d’être le Gaëtan Courtet !
Tu as démarré en Ligue 2 le 5 février 2011 avec Reims face au Havre : à quel point ce championnat a changé en presque 15 ans ?
Presque en tout ! Avant, tu avais très peu d’équipes qui avaient cette envie de jouer au ballon, de ressortir le ballon, avec un vrai travail derrière. Aujourd’hui, pratiquement toutes les équipes mettent des choses en place pour mettre les adversaires en difficulté. Ça va beaucoup plus vite, les joueurs sont plus rapides, c’est beaucoup plus technique… Mais il y a aussi des trucs qui se sont perdus. Comme, parfois, peut-être cette dalle dans un match. Quand on joue, c’est à la vie, à la mort. Il y a un peu moins ça.
La Ligue 2 a souvent été décriée. As-tu envie d’en être un porte-drapeau ?
Elle manque de lumière, mais pour, derrière, donner plus de poids quand elle est belle. Elle est tellement critiquée qu’elle en devient belle, parce qu’on se rend compte que jouer en Ligue 2, c’est très compliqué, que c’est dur de jouer une équipe de Ligue 2, que c’est un championnat qui montre de très belles choses. Après, porte-drapeau… Je ne suis pas fan de l’idée, mais je suis très fier d’être dans ce championnat et d’y évoluer dans le temps, car il est très, très compliqué. La Ligue 2 est critiquée, mais elle plaît, malgré tout.
Tu as connu la Ligue 1 pendant un peu plus de deux saisons avec Reims. Tu claques 9 pions en 2012-2013.
De base, je suis le petit jeune qui ne va pas commencer une saison de Ligue 1 et qui, à la fin, a fait 30 matchs en marquant 9 buts avec une équipe promue. Ce sont de très bons souvenirs, avec la remontée en Ligue 1 d’un grand club qui a pu se reconstruire en méritant cette lumière.
Qu’est-ce qui a fait que tu n’as pu retrouver la Ligue 1 depuis dix ans ?
J’ai souvent intéressé des clubs, mais jamais de là à me faire signer. Je ne suis pas un profil qui va très vite. Aujourd’hui, la Ligue 1, et le foot en général, ont tellement évolué… Niveau vitesse, puissance, à un moment donné, je pense que c’est ça qui faisait qu’on arrêtait de penser à moi.
Dans quelle équipe de Ligue 2 tu t’es le plus régalé ?
Collectivement, c’est à Dunkerque.
Vraiment ?
Ouais, dans tout ce qu’on met en place, dans tout ce que j’apprends encore aujourd’hui. Je me régale. Je pense aussi à Ajaccio, où on est montés en Ligue 1 (2022). C’était vraiment une force de groupe, une mentalité que j’adore défendre.
Dans ta carrière en Ligue 2, tu as connu des joueurs qui ont évolué par la suite bien plus haut. Serhou Guirassy, Grzegorz Krychowiak, Aïssa Mandi, Yoane Wissa, Denis Bouanga, Mattéo Guendouzi, Gaetan Laborde, Jean-Philippe Krasso… Lequel te reste en tête ?
Si je dois en retenir un, c’est Aïssa quand même. C’est quelqu’un sur qui les gens ne comptaient pas trop non plus. Cela lui a donné de la force pour bosser, bosser, bosser, et devenir le joueur qu’il est. Pour faire une carrière incroyable.
La trajectoire de Serhou Guirassy, avec qui tu as joué à Auxerre, ça te surprend ?
(Sans hésiter.) Non, non. Entre guillemets, il n’avait rien à faire avec nous. À ce moment, ça lui avait fait du bien de pouvoir jouer, de connaître autre chose, d’avoir du temps de jeu, qu’on lui fasse confiance. Pour le propulser sur ce qu’il sait faire. Parce que c’est un sacré joueur.
À l’âge où ça m’est arrivé, c’est prendre quatre ou cinq ans dans la gueule, entre guillemets, d’un coup. On se dit que ça n’arrive qu’aux autres, qu’on est assez jeune. Et puis on se retrouve à être le plus jeune du service, ça fait cogiter.
Comment va ta santé aujourd’hui ?
La santé va très bien ! Même si d’autres tendent à penser que le foot, à 36 ans, c’est mort. Non, non, je suis bien là, je fais mes matchs. J’espère que ça va continuer.
À quel point ce cancer des testicules, survenu en 2011, alors que tu avais 21 ans, est présent en toi aujourd’hui ?
C’est complètement derrière moi. Je suis beaucoup plus attentif à la moindre alerte. Mais c’est aussi ce qui a fait mon histoire. À l’âge où ça m’est arrivé, c’est prendre quatre ou cinq ans dans la gueule, entre guillemets, d’un coup. On se dit que ça n’arrive qu’aux autres, qu’on est assez jeune. Et puis on se retrouve à être le plus jeune du service, ça fait cogiter. On se trouve à devoir affronter des choses qui, à cet âge-là, ne devraient peut-être pas être le cas. Ça aide pour les petites galères qui suivent dans la vie. Parce qu’il y a toujours pire. J’aime bien me souvenir de ça pour, quand c’est plus dur, me dire : « Tu n’as pas le droit de baisser la tête. »
En un mot, comment as-tu envie de raconter la saison de l’USLD ?
Je dirais magnifique… mais j’ai envie d’ajouter : et peut-être bientôt exceptionnelle. Par rapport à tout ce qu’on a travaillé, ce n’est pas étonnant. On a senti que le boulot fourni prenait assez vite. Alors, de là à faire cette saison, avec le parcours en Coupe de France (jusqu’en demi-finales)… C’est notre force collective qui a réussi à le faire. Mais c’est évidemment une saison magnifique, qui peut encore être exceptionnelle.
Et dans cette saison, vous avez mené 2-0 face au possible futur champion d’Europe…
Ouais. (Il sourit.) Mais il ne faut pas m’en parler de nouveau parce qu’on y a tellement cru… Même si elle était logique, la défaite a été dure. À 2-0, je pense que tout le monde y a cru. Donc elle était d’autant plus dure à encaisser. J’avais ce petit rêve en voyant la finale au Stade de France se rapprocher. Être aussi près… On sait que c’est très long un parcours en Coupe de France. Mais on est tombé, sûrement, face à la meilleure équipe du monde aujourd’hui. C’était très, très dur. J’ai passé plus de temps dans ma surface que dans la leur… Mais on a défendu le maillot comme il le fallait.
C’est clairement un scandale. Mais quand on sait que ce sont les autres coachs qui votent… Il suffit qu’il se soit embrouillé avec quatre ou cinq entraîneurs pendant un match… C’est dommage, son travail l’aurait mérité.
La saison de Dunkerque, c’est aussi celle de son entraîneur, Luis Castro. Comment nous racontes-tu le coach Castro ?
Je dirais perfectionniste. Mais, vraiment, le vrai sens du terme. J’ai connu beaucoup de coachs qui travaillent des choses défensivement et offensivement. Mais je ne pensais pas qu’on pouvait travailler autant de choses. C’est un malade de travail. Il défend des valeurs auxquelles j’adhère complètement. Il cherche toujours à trouver des solutions.
Son absence des nommés dans la catégorie du meilleur entraîneur de Ligue 2 aux derniers Trophées UNFP était-elle un scandale ?
Oui, oui, c’est clairement un scandale. Mais quand on sait que ce sont les autres coachs qui votent… Il suffit qu’il se soit embrouillé avec quatre ou cinq entraîneurs pendant un match, et ça suffit à… C’est dommage, son travail l’aurait mérité. Mais je pense même pas qu’il y ait besoin de ça. On a assez parlé de Dunkerque pour mettre de la lumière sur lui.
Tu dirais que Dunkerque n’a pas été respecté lors de ces Trophées ? Il n’y a pas un joueur de l’USLD dans le onze type non plus…
C’est pareil, ce sont les joueurs qui votent… C’est comme ça. C’est décevant. Maintenant, attention, quand on regarde l’équipe type, il y a de sacrés joueurs ! Mais si tout le monde avait fait un choix honnête, je pense que ça aurait été sûrement différent.
Dunkerque en Ligue 1, ce serait…
Exceptionnel ! Je ne peux pas dire mieux. Ce serait historique.
Caen dit officiellement au revoir à la Ligue 2, la course pour la montée toujours enflamméePropos recueillis par Timothé Crépin