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Fièvre irakienne

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Fièvre irakienne

Dans un tourbillon d'émotions et contre toute attente, le petit poucet irakien, plutôt fringant depuis le début de la compétition avec sa défense de fer et sa furieuse envie d'en découdre au nom de son peuple, est entré à sa façon dans l'histoire, en remportant sa toute première Coupe d'Asie des Nations...

Avant même les demi-finales de mercredi dernier, 25 juillet, on savait que le vainqueur de la quatorzième coupe d’Asie écrirait une page d’histoire. Le Japon et l’Arabie Saoudite concouraient pour une quatrième couronne record avec, pour la formation nipponne, un triplé d’affilée inédit en guise de bonus. En cas de succès, la Corée du Sud aurait rejoint les deux premières citées ainsi que l’Iran sur le toit du continent avec trois sacres, le premier depuis 1960. Finalement, et contre toute attente, c’est le petit poucet irakien, plutôt fringant depuis le début du tournoi avec sa défense de fer et sa furieuse envie d’en découdre au nom de son peuple, qui entre à sa façon dans l’histoire, en remportant sa toute première coupe d’Asie.

Depuis sa probante victoire contre le double tenant du titre japonais (3/2) au tour précédent, l’Arabie Saoudite et son attaque de feu (12 buts) faisait, bien évidemment, office de favori au coup d’envoi. La formation d’Helios dos Anjos jouait ce dimanche, dans l’enfer proprement électrique du Gelora Bung Karno Stadium de Djarkarta (100 000 spectateurs), presque entièrement acquis à la cause irakienne, sa sixième finale lors des sept dernières éditions. Trois victorieuses (1984, 88, 96) et deux perdues (92 et 2000). Cette finale prometteuse, deux coachs brésiliens dirigeant la meilleure attaque et la plus solide défense, allait comme souvent, comme toujours ( ?) accoucher d’une rencontre âpre et hermétique, ne valant que par sa bataille tactique et par son suspense.

Les Irakiens de Jorvan Vieira jouaient très bas, histoire de contrecarrer les contres adverses du terrible duo d’attaque saoudien composé de Malek Maaz (le bourreau des Nippons en demi-finale) et de Al « the snipper » Qahtani, meilleur buteur du tournoi avant ce match. Dans une rencontre des plus “robustes” (5 cartons jaunes distribués durant les 39 premières minutes par l’arbitre australien Mark Shield), et sous l’impulsion du jeune Nashat Akram, un genre de Redondo à la sauce bagdadi, les Irakiens vont prendre peu à peu l’ascendant. « Nous avions une foi inébranlable en nous. Je ne sais pas pourquoi mais j’étais très calme aujourd’hui comme si rien ne pouvait nous arriver, comme si nous étions transcendés par la portée historique d’une victoire » dira plus tard Noor Sabri Abbas, le décisif portier irakien, qui officie d’ordinaire pour le club iranien de Mes Kerman.

Sur un énième corner, à la 71e minute, Al Mosallem, le gardien saoudien, se déchirait et Younis Mahmoud ouvrait et clôturait le score d’une tête magistrale. Une spécialité de l’équipe moyen-orientale puisque le skipper irakien a inscrit ainsi trois de ses quatre buts de la sorte durant cette coupe d’Asie. Le dernier quart d’heure ne sera que domination stérile d’un côté et contre-attaques tranchantes de l’autre pour un score qui ne variera plus.

Au coup de sifflet de final, les joueurs irakiens se sont effondrés sur la pelouse, comme touchés par une grâce immanente, comme s’ils se rendaient compte de l’énormité de la performance. Pour la quatrième fois consécutive, leur défense inoxydable rendait une “clean sheet”…pour le plus grand bonheur de Jorvan Vieira. « Cette équipe possède une force intérieure rare. Ce sont d’incroyables travailleurs qui ne reculent devant rien. Cette consécration est donc largement méritée. J’ai beaucoup appris à leur contact. C’est une grande leçon de vie pour moi que je garderai pour le restant de mes jours » confiait encore après la rencontre l’entraîneur irakien dont le contrat de…deux mois prenait fin hier soir.
Avant la rencontre, il avait annoncé son départ quelle que soit l’issue de l’ultime match de ses troupes. La situation qui prévaut dans le pays et qui avait entraîné le départ de Bernd Stage en 2005, le fameux coach allemand qui avait façonné cette génération dorée d’éléments brillants, déjà demi-finaliste des J.O d’Athènes en 2004 puis finaliste des Jeux asiatiques contre le Qatar deux ans plus tard, n’offre aucune garantie. La plupart de ces nouveaux champions d’Asie (qui disputeront la coupe des Confédérations en 2009) évoluent dans des ligues mineures (Jordanie, Chypre, Lybie, Liban, Qatar, Iran, etc.). On peut supposer, et même espérer pour eux, qu’ils connaîtront un nouveau destin un peu plus à la mesure de leur talent…

A des milliers de kilomètres de Djakarta, dans les heures qui ont précédé la finale, y compris dans les provinces kurdes, de nombreux enfants ainsi que des femmes voilées et d’innombrables supporters se peinturluraient le visage aux couleurs du drapeau local. Dans la capitale indonésienne, une banderole, déployée au Gelora Bung Karno Stadium, résumait le sentiment majoritaire au pays quelle que soit sa confession : « Be united Iraq » . Suite aux deux attentats à la voiture piégée à Bagdad de mercredi dernier (plus de 50 victimes), qui visaient des supporters bruyants célébrant l’accession à la finale, les autorités du pays avaient interdit toute circulation automobile dans les grandes villes en ce dimanche de finale. Pour éviter de servir de cible, le grand ayatollah Al-Sistani avait même ordonné à la population de rester chez elle. En vain. Le but victorieux de Mamoud a plongé tout le pays dans une fièvre sauvage qu’il n’avait pas connue depuis belle lurette. Dans un Bagdad en fusion, certains membres des forces de sécurité se sont même mêlés à l’euphorie ambiante et aux « Allah Akbar » de circonstance. De nombreuses rafales ont même strié tout le ciel du pays en signe d’allégresse. « Notre équipe voulait absolument donner à l’Irak quelque chose à célébrer en tant que nation » , s’enthousiasmait après coup le capitaine, buteur et meilleur joueur du tournoi, Younis Mamoud.

Le gouvernement irakien et même le commandement américain (qui assure avoir regardé « tous les matchs avec excitation et admiration » , rien que ça) ont immédiatement volé au secours de cette victoire multiconfessionnelle. Sunnites, chiites, kurdes : l’équipe nationale mixait les provenances sans vraiment s’en soucier. Là-bas comme ailleurs, même si le symbole est fort, il ne résoudra rien. Nashat Akram, le MVP de la finale, a beau jeu de souligner que « [l’équipe nationale] a délivré un message fort au reste du monde : il n’y a qu’une seule Irak. Elle appartient à tous ses habitants quelle que soit leur confession » . La violence au quotidien est là pour rappeler la vacuité de l’existence sous ses latitudes comme l’évoquait Jorvan Vieira hier soir : « Je voudrais dédier cette victoire historique à notre physiothérapeute Anwar Jassim. Anwar suivait l’équipe nationale depuis plusieurs années et devait nous accompagner en Indonésie. Cela devait être sa dernière compétition car il comptait s’exiler en Angleterre pour que sa famille puisse vivre plus sereinement. Une bombe en a décidé autrement alors qu’il venait de récupérer son billet d’avion pour nous rejoindre en Asie du Sud-Est » .

Pendant ce temps-là, la Confédération asiatique de football annonçait aujourd’hui à Jakarta que l’Asian cup n’aurait pas lieu en Iran, en Australie ou en Inde (les autres candidats) en 2011 mais au Qatar. L’Irak y sera pour y défendre son précieux. Etonnant, non ?

Par Rico Rizzitelli

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