Diego Milito : son nom est personne

Un peu de lumière, enfin, pour Diego Milito. Après une vie passée à la périphérie du haut-niveau, une hype monte en neige depuis ses premiers pas sous le maillot nerazzurri. « Trop fort ce Milito, un vrai neuf, un vrai joueur comme on les aime » . Le goleador argentin naît en 1979 à Bernal, nord-est de Buenos Aires. Devenu grand, peut-être par déterminisme géographique, le jeune pro ne militera pas à River ou Boca, les vitrines de la capitale, mais en banlieue, à Avellaneda, au Racing, le deuxième club de la commune, derrière le mythique Independiente. Déjà tapi dans l’ombre, en bon renard des surfaces.

Après une demi-décade, l’aîné des Milito finit par rompre avec sa routine banlieusarde et débarque en Europe en janvier 2004… par le fond de cale. Tout sauf flashy, avec sa trogne très eighties, entre Enzo Francescoli et Silvester Stallone, l’aîné des Milito prend la voie ancestrale, un ticket Buenos Aires-Gênes pour occuper les avant-postes de l’antique club portuaire… en Serie B. Classé talent confidentiel, l’Argentin le reste jusqu’à sa deuxième saison à Saragosse. Avec 22 bastos au compteur, le chasseur de buts talonne le pichichi, Van Nistelrooy. En Aragon, terre aride, le buteur solitaire prospère en flinguant à tout va.

Des bruits flatteurs commencent à courir en Europe sur ce Pauleta aux épaules de déménageur : buteur impitoyable, chirurgical, battant, et aussi fantaisiste qu’un énarque de la Cour des Comptes. L’Argentine aussi se penche sur sa solide carcasse. A 28 ans, Milito enfile la tunique ciel et blanc pour la première fois. Les grandes écuries commencent à frapper à la porte, mais l’attaquant préfère rester à la maison, et poursuivre l’aventure avec Saragosse qui s’est mué en véritable colonie argentine (Ayala, Aimar, D’Alessandro).

Une décision qui aurait pu lui être fatale. Le pistolero avait quitté Gênes après une sale affaire : promu en Serie A sur le terrain, le club portuaire sera finalement rétrogradé en Serie C, accusé d’avoir acheté le dernier match de l’année. Même fin en queue de poisson avec Saragosse. Après avoir emmené l’équipe en Coupe d’Europe, Milito ne pourra empêcher sa descente à l’étage inférieur dès la saison suivante. De quoi se tailler une véritable réputation de poissard.

Retourner aux sources dans les moments de crise est un remède fréquemment conseillé. Dans les derniers instants du mercato, Milito signe donc un second bail avec le Genoa, revenu de l’enfer et plus ambitieux que jamais. Son bilan 2008-2009 : 24 buts en 31 matches, le total et la moyenne dispensent de commentaire. Elle dispense également l’Inter de toute réflexion. Dans un réflex pavlovien, Moratti allonge. Qu’importe l’âge, le passé, l’Inter prend tout ce qui marche en Italie, et qu’il peut payer deux fois plus: Julio Cruz avait ainsi signé avec les Nerazzurri à 29 ans, ce sera 30 pour Milito.

Exposé comme jamais, l’attaquant s’est déjà taillé un statut d’indéboulonnable dans le onze de Mourinho. Toujours juste, simple dans le dernier geste comme à la création lorsqu’il est contraint de décrocher, Milito s’est imposé comme une évidence dans la tour de Babel milanaise. Sans éclat, ni déclaration tapageuse. Avec son allure laborieuse, de tracteur plus que de dragster, l’ombrageux Argentin constitue un cauchemar pour les services marketing. Malgré son adaptation express, la plus belle gâchette de la Botte n’éclipse pourtant pas réellement Eto’o, la star de l’équipe, mais lui épargne toute critique en marquant pour deux. La lumière le fuit, pas la réussite.