- Ce qu'il faut retenir de la phase de poules
Deception tour
Le premier tour du Mondial russe déjà terminé, il faut dire au revoir à la moitié des équipes du tableau. Avec un léger regret pour certaines et une pointe de sadisme pour d'autres, logiquement sanctionnées au regard des prestations en deçà des espoirs qu'elles ont pu susciter. Retour sur les quelques crève-cœur et désenchantements que cette première partie de Coupe du monde a semés.
La Katastropheallemande
Il y avait bien eu quelques signes avant-coureurs. Des amicaux pourris, des cadres loin de leur plénitude physique ou mentale… Le tout saupoudré des critiques de vieilles gloires de la Mannschaft. Comme celle de Dietmar Hamann, qui avait décidé de sniper le Nationalelf avant même le début de la compétition : « L’Allemagne a énormément de jeunes joueurs qui ont besoin d’être guidés, je ne suis pas sûr qu’ils disposent des leaders pour le faire… » L’ex-finaliste du Mondial 2002 a vu juste. Sans ses kaisers – Philipp Lahm, Miroslav Klose, Bastian Schweinsteiger et Per Mertesacker, tous néo-retraités –, la Mannschaft a rétréci mentalement. Sa victoire au buzzer face à la Suède lors du second match de poules ne permettra jamais de combler le trou dans la coque qu’a provoqué d’entrée de jeu le Mexique. Une faille que la Corée du Sud a ensuite exploitée pour torpiller une bonne fois pour toutes le navire allemand.
Dernière du groupe F, l’Allemagne aura aussi trouvé en chemin le moyen de renier une composante majeure de son identité footballistique, en collant au banc de touche son charognard de surface Mario Gómez pour lui préférer le virevoltant, mais moins efficace Timo Werner. De quoi raviver au pays les critiques envers les évolutions du style de jeu de Joachim Löw, dont la « Guardiolisation » a été régulièrement pointée du doigt. Les plus conciliants préféreront, eux, souligner que la Mannschaft n’est qu’un tenant du titre de plus à se faire éliminer au premier tour, à l’image de la France en 2002, de l’Italie en 2010 et de l’Espagne en 2014. Une bien maigre consolation, vraiment.
Le naufrage polonais
La tête sans les jambes. En décembre dernier, les Polonais avaient exploité une faille béante dans les réglementations de la FIFA pour intégrer le chapeau 1 à l’heure du tirage au sort du Mondial. Bilan : un groupe avec le Sénégal, la Colombie et le Japon qui semble relativement abordable. Mais ça, c’était ce qu’on se disait avant que les Aigles blancs ne commencent leur Coupe du monde. Avec une défense à trois qui ne tient pas la route, Milik qui marche sur les pieds de Lewandowski et Piotr Zieliński incapable de démarrer le moteur d’un collectif en panne sèche, les Aigles blancs livrent deux prestations désastreuses face au Japon puis la Colombie et disent bye bye aux huitièmes dès leur second match du tournoi. Une fin de cycle brutale pour le sélectionneur Adam Nawałka, en poste depuis 2013 et qui avait emmené les Polonais jusqu’en quarts de finale de l’Euro 2016 deux ans plus tôt.
L’Afrique ne répond plus
Après avoir casé deux représentants en huitièmes de finale du Mondial 2014, le continent africain se devait forcément d’avoir quelques ambitions en Russie. Pourtant, l’Égypte n’a jamais vraiment existé dans un groupe a priori abordable, quand le Maroc a fait bonne figure face à l’Espagne et au Portugal, mais sans récolter davantage qu’un point en trois matchs. La Tunisie n’a pu, elle, que sauver l’honneur en remportant son troisième match de poules face au Panama, après avoir dû s’incliner face aux Anglais et aux Belges. Le Nigeria, relativement solide, a aussi fait étalage de ses limites offensives et n’a pu briller que par intermittence grâce aux fulgurances d’Ahmed Musa avant de s’incliner face à une Argentine aux abois.
La plus grosse déception restera néanmoins celle du Sénégal. Bien lancés dans leur tournoi après leur victoire face à la Pologne, les hommes d’Aliou Cissé ont leur part de responsabilité dans le foutoir tactique et technique qu’a été Japon-Sénégal. Qualifiés en cas de match nul, ils ont ensuite fait l’erreur de jouer petit bras face à une Colombie qui les a finalement piégés à leur propre jeu. C’est la première fois depuis le Mondial 1982 qu’aucune équipe africaine n’atteint le stade des huitièmes de finale. La Russie, un fiasco africain avant tout.
Le Pérou méritait mieux
Les histoires de coke de Paolo Guerrero, des fans transcendés par la première Coupe du monde disputée par leurs protégés depuis 1982, un jeu vertical et pas calculateur pour un sou : le Pérou a ambiancé un groupe C qui manquait de relief (à l’image du jeu beaucoup plus minimaliste offert par le Danemark, l’Australie et même l’équipe de France). Finalement, la qualification des Incas s’est peut-être jouée à un penalty loupé face aux Danois alors que le score était encore de 0-0. Une offrande que Christian Cueva a expédié sur le parking. Le Danemark, au contraire beaucoup plus cynique, ne tremblait pas pour ouvrir la marque par Poulsen avant de fermer la boutique. Tant pis, le monde n’oubliera pas de sitôt les tronches et encore moins les blases fabuleux d’André Martín Carrillo, Luis Advincula ou encore Alberto Junior Rodríguez Valdelomar.
France-Danemark
Vous savez désormais grosso modo ce que ressentait Alex, le héros d’Orange Mécanique, pendant qu’on lui lavait le cerveau à coup d’images et de sons insurmontables pour l’esprit humain. Les yeux écarquillés, des larmes de souffrance sur la joue ? Vous êtes allé au bout de France-Danemark. Félicitations, vous aimez vraiment le football. Un peu trop, même.
Par Adrien Candau