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Coupe de France : rendez la Coupe à son peuple !

Par Nicolas Kssis-Martov
Coupe de France : rendez la Coupe à son peuple !

La Coupe du centenaire a donc trouvé preneur. Des Parisiens peu inspirés, voire médiocres, et qui auraient presque dû laisser par décence le trophée aux Angevins. Derrière ce triste spectacle proposé dans la torpeur étouffante du Stade de France se cache un autre scandale, fondamentalement insupportable : à aucun moment ce match ne fut autre chose que la dernière rencontre de la saison avant les vacances et le mercato. Qui osera rappeler au foot que sans le peuple et sans histoire, il ne serait rien qu'un sport comme un autre ? Cette amnésie et cette inculture dépassent la seule question de la qualité du jeu, c'est presque une faute politique, au sens premier du terme.

Samedi soir, nous étions censés fêter le centenaire de la Coupe de France. Une institution dans notre football tricolore. Un véritable lieu de mémoire, au même titre que le Tour de France (qui, certes, a au moins eu la chance d’être sacré par de grandes plumes, nous restons un pays littéraire). Une compétition dont le parcours et le palmarès épousent les vicissitudes de notre histoire. Un espace démocratique et égalitaire où chacun pouvait venir communier « à ce référendum de tous les instants » que forme une nation (selon les jolis mots d’Ernest Renan), en y apportant sa petite touche et nuance. Au lieu de commémorer cet incroyable pilier du temple de Marianne, toujours vivant, nous avons eu droit à un petit show pyrotechnique et quelques paillettes qui atterrirent négligemment sur ce monument de notre football hexagonal. Même le nouveau président de la République a dû se contenter de jouer le rôle du fan trop content de croiser son JPP plutôt que de saisir l’instant pour dire ce que le peuple du ballon rond a apporté et apporte encore à la République.

De Charles Simon à El Biar

Finalement, le plus grave ne fut pas certainement pas l’indigente et irrespectueuse prestation d’un PSG qui, pourtant, doit tout à cette compétition. Ici, encore, la mémoire a cédé la place à l’actualité d’Emery, l’équipe a pris le pas sur le club, avec un simulacre de bonheur pour les caméras. Comment imaginer que la plus populaire des compétitions, à tous les sens du terme (rappelons que tous les AS ou FC, outre-mer compris, peuvent s’y inscrire, quel que soit leur niveau), puisse être vidée à ce point de sa substance, de son âme, de sa place dans notre passé ? Le premier geste qui aurait pu embrasser dignement l’évènement aurait consisté à ne pas attribuer le trophée cette année au vainqueur sur la pelouse – surtout vu de quelle manière elle a été obtenue, seul le SCO sembla prendre conscience qu’il disputait une rencontre importante –, mais remis de manière symbolique à l’ensemble du foot français, c’est-à-dire ses associations locales ou corpos, ses centaines de milliers de bénévoles, ses passionnés, ses narrateurs, ses amoureux… S’il avait fallu convaincre quelqu’un à la Ligue ou à la Fédération, il aurait suffi de souligner que, sans ces derniers, les droits télé si chèrement négociés ne vaudraient sûrement pas grand-chose et que le multiplex finirait sur Eurosport.

Au lieu de cela, à quel moment avons-nous pu, en amont ou durant la rencontre, nous souvenir que la compétition est née lors de la Première Guerre mondiale, en honneur d’un certain Charles Simon mort au front, catholique converti à la cause du « football seul » , tout comme l’église se rallia finalement à la République ? A-t-on pris la peine de se remémorer les drames, de Furiani aux heures sombres de l’occupation (par exemple le cas Marcel Muller du FC Metz, finaliste malheureux contre Marseille en 1938, déporté à Dachau), les joies, les fêtes, les exploits, les héros (Raoul Diagne, premier international noir de l’EDF, triple vainqueur avec les pingouins du Racing de Paris avant guerre), les petits poucets (d’El Biar, avec la guerre d’Algérie en toile de fond, à Quevilly, éternel représentant des clubs de coupe), ses grands (l’Olympique de Pantin, premier à soulever le trophée à Sochaux) et ses rivalités (entre l’OM et le PSG quand ce dernier savait encore charmer cette vieille dame comme elle le mérite)… Sans oublier les lieux de cette belle comédie humaine, de Colombes au Parc des Princes…

Une autre profondeur de champ

Car non, le foot n’est pas une école d’humanisme, quoi qu’en supposent les prospectus des think thank citoyens. Il est bien plus que cela. Tout comme la Coupe de France est bien plus que du football. Le destin s’y lit en compagnie de Giacomo Leopardi ou Witold Gombrowicz. On y entend le blues de Skip James, les plaintes du Chaabi ou les larmes du fado, avec des relents punk ou hip-hop. Le substrat narratif du foot réside aussi dans la demi-finale perdue, le rêve brisé du talent prometteur, le but de la main, les tribunes en deuil… et les traditions orales qui viennent exalter les victoires inattendues, le but miraculeux qui fait oublier une saison ratée…

Au moment où nous traversons une période où la France serait plus divisée et clivée que jamais, il y avait peut-être, samedi soir, matière à mettre en lumière une autre profondeur de champ, qui du souvenir d’Emile Fievet, premier buteur en 1918, à Karim Benzema en 2008, pouvait nous rappeler qu’il est possible de se confronter afin de construire collectivement cette fameuse exception française. Cependant, ce nouveau président de la République, Uber compatible, et cette #L1 Conforama, en avaient-ils simplement l’envie ? Ou possédaient-ils les codes pour s’emparer de cette belle ambition ? Apparemment non… Ne nous inquiétons pas, le peuple gardera la juste cause.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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