- Fiction
- Foot & amour
- Rafa et Maria Benítez
Comment Rafa Benítez a séduit sa femme

Lorsqu'elle ne s'en prend pas au boulot de Mourinho, Madame Benítez lève le voile sur son couple comme une candidate des Z'amours. Ainsi, elle aurait été séduite par une leçon tactique du nouveau coach madrilène. Récit sans Tex, et avec un peu d'imagination.
Maria de Montserrat s’était mise sur son trente et un. Les ongles laqués, la bouche rouge cramoisi, elle avait passé une robe dont elle regrettait à présent le fendu à la cuisse. « Oh ! Dans son boulot, il a dû en voir des tonnes de gambettes… » , se disait-elle pour se rassurer. C’est alors qu’il apparut de l’autre côté de la place. Elle corrigea son chignon sage tandis qu’il avançait vers elle. Deux bises. Elle l’appela Rafael. Lui préférait qu’on lui donne du Rafa. Un bouquet digne d’un podium du Tour de France encombra les bras de Maria. « C’est pour m’excuser de ma tenue. Je n’ai pas eu le temps de me changer. Des soucis avec la cantera… » Elle remarqua alors qu’il portait un survêtement surdimensionné d’où seule sa tête surnageait. C’étaient les années 90, au diable le jogging à pressions, elle se laissa conduire à la pizzeria.
« J’ai réservé pour deux. Au nom de Benítez. » Personne ne se retourna sur le passage du couple qui s’attabla entre la porte battante des toilettes et le four du pizzaïolo, un Égyptien copte qui surjouait l’Italien de naissance. À cette époque, Benítez avait gardé l’allure svelte de ses années comme joueur et pouvait se permettre une pizza sans que Mourinho, alors modeste traducteur, ne bronche. Discussion banale, une Campione, une Napoletana prémonitoire et deux verres de Lambrusco plus tard, Rafa ne cessait de jouer nerveusement avec la fermeture éclair de sa veste, si bien que Maria, qui cherchait à se rassurer, ne pouvait distinguer d’hypothétiques battements de cœur sous les agitations de l’écusson.
« Pas d’inquiétude, je fais un 4-4-2 »
« Alors comme ça, tu es entraîneur. Moi, j’y connais vraiment rien en foot. Tu vas te moquer, mais je crois n’avoir jamais vu un match en entier. » Occupé à manger les croûtes laissées par la jeune femme, il leva la tête, la dévisagea, puis donna les premières explications d’un ton pédagogue. Une fois les assiettes débarrassées, le technicien passa aux choses sérieuses, tira de sa poche un stylo et repoussa d’un revers de main les condiments. Le fond de la bouteille d’huile piquante avait laissé sur la nappe de papier un rond central parfait autour duquel il traça un demi-terrain et disposa un onze type imaginaire. Maria : « Pas de chance : je suis nulle au « Dessinez c’est gagné ». » Benítez : « Pas d’inquiétude, je fais un 4-4-2. »
Face aux regards perplexes de Maria, et en homme habitué à convaincre des recrues, il enchaîna : « Les fondations sont essentielles dans un couple comme dans une équipe. Il faut des bases solides. Nous évoluerons donc avec quatre défenseurs qui formeront notre assise. Pour faire face aux épreuves du temps, il nous faudra une paire de milieux qui récupèrent les miettes de passion et nous relancent proprement vers l’avenir. À gauche et à droite, deux ailiers, des feux follets capables de dribbler la routine qui forcément s’installe. Et les deux devant ? Les attaquants ! Ou si tu préfères mes bras qui t’enlacent. » Alors que sa main audacieuse glissait vers celle de sa promise, un tiramisu et deux cuillères entrèrent sur le terrain. Déjà subjuguée, mais décidée à ne pas céder aussi facilement, Maria se reprit et lui demanda : « Et tu pourrais m’expliquer la règle du hors-jeu ? »
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