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« Mon esprit a rejeté cette comparaison avec Zidane »

Propos recueillis par Adel Bentaha et Thibault Julien

Fraîchement sacré champion du monde avec l’équipe de France de footgolf, joueur de poker florissant et gérant d’un complexe sportif à Sochaux, Camel Meriem s'épanouit dans sa vie de quadragénaire. Discussion avec un ancien nouveau Zidane. 

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Camel, vous voilà donc champion du monde. 

Oui, mais de footgolf ! C’était le 6 juin dernier à Orlando, en Floride. C’est marrant, parce qu’en finale, on a aussi fait 3-3 contre l’Argentine. Mais comme on avait un meilleur goal-average, on a gagné.

Petite revanche, alors ?

Bien sûr. Surtout que les Argentins mettaient une ambiance de fou sur chaque point. Et puis attention, il y a une vraie exigence de résultat ! La Floride, ce n’était pas pour les vacances. De l’extérieur, les gens peuvent penser que c’est un loisir, mais en tant qu’ancien footeux, moi je ne prends pas ça à la rigolade.

Même en tant qu’ancien footballeur, j’ai parfois du mal à être précis au footgolf. Et puis, il y a une certaine pression psychologique, comme tirer un penalty, mais à plusieurs reprises.

Depuis combien de temps pratiquez-vous le footgolf ? 

Quatre ans maintenant. On m’avait invité pour un tournoi amical, j’ai bien aimé l’atmosphère et j’y suis resté. J’ai vite rejoint l’équipe de France, avec laquelle j’ai fait l’Euro 2019 en Angleterre, puis 2021 en Hongrie et donc la Coupe du monde aux États-Unis. Me voilà à trois compétitions internationales avec la France, ce qui est pas mal.

Le footgolf, c’est mettre des coups francs dans des trous ?

(Rires.) C’est plus compliqué que ça ! Déjà, ce sont les mêmes règles que le golf, sur des parcours de 18 trous. Ensuite, il ne suffit pas de taper dans un ballon pour être un bon footgolfeur. On joue sur des terrains de golf, donc forcément, il y a souvent des obstacles, de l’eau, des bunkers. Même en tant qu’ancien footballeur, j’ai parfois du mal à être précis. Et puis, il y a une certaine pression psychologique, comme tirer un penalty, mais à plusieurs reprises.

 

Vous croisez beaucoup d’anciens footballeurs sur le circuit ?

Eh bien pas tant que ça, quand j’y réfléchis. Ceux que j’ai le plus vus, ce sont Florent Sinama-Pongolle et Anthony Le Tallec. Il y a aussi Ludovic Obraniak et mon pote Adel Chedli. Il faut savoir que la discipline est encore à un niveau amateur, mais la FFF commence à s’y intéresser. Dernièrement, on a recensé plus de 150 joueurs sur une étape, ce qui n’était pas le cas il y a quelques années.

Si on résume : depuis que vous avez raccroché les crampons, il y a le poker, le footgolf et un complexe sportif près de Montbéliard. Vous n’avez pas eu la peur du vide que ressentent beaucoup de joueurs ?

Non, parce que même si physiquement, j’étais vraiment bien, il fallait que j’arrête. Je voulais m’éloigner du football. Quand tu passes 17 ans de ta vie à enchaîner les matchs, la pression, veiller à ne pas décevoir les gens, tu satures. J’avais d’ailleurs programmé ma sortie, avec ce projet de complexe sportif en tête depuis un moment. Il fallait aussi que je retrouve ma famille, que je ne voyais qu’une semaine sur deux. Le poste d’entraîneur ou le rôle de consultant, c’est très bien pour ceux qui en veulent, mais pour moi, c’est hors de question. Aujourd’hui, le football, je le regarde, mais je ne le vivrais plus.

Mon esprit a rejeté cette comparaison avec Zizou. Elle n’a jamais existé.

Vous n’êtes toujours pas saoulé de l’étiquette du « nouveau Zidane » ?

Les gens ont toujours pensé que ça me déstabilisait qu’on m’appelle « nouveau Zidane ». La vérité, c’est que j’en étais complètement détaché. (Rires.) Je dirais même que mon esprit a rejeté cette comparaison avec Zizou. Elle n’a jamais existé. Ce qui a excité les gens, c’est le départ à Bordeaux, où on s’est imaginé un parcours similaire. Ensuite, j’arrive en sélection, où on me donne le 10, donc il y avait tout un contexte favorable à ce truc-là. Mais ça ne m’a jamais traversé la tête. Les gamins d’aujourd’hui, eux, doivent un peu plus morfler, avec les réseaux sociaux. Moi, j’étais Camel Meriem, je jouais à Sochaux, un petit club de famille.

Les trois étapes majeures de votre carrière restent donc Sochaux, Bordeaux et l’équipe de France.

Gratter quelques sélections dans cette équipe de France-là, c’était fou ! On m’a souvent demandé pourquoi je n’avais pas eu plus de capes (trois sélections entre 2004 et 2005, NDLR). Mais vous vouliez que je fasse quoi, avec une concurrence pareille ! (Rires). Donc ouais, jouer ne serait-ce que quelques bouts de matchs à côté de ces monstres, c’était énorme. Quand j’y repense, nous étions trois joueurs formés à Sochaux en Bleu ! Benoît Pedretti et Pierre Alain-Frau et moi. Vous imaginez un truc pareil aujourd’hui ? La première fois qu’on est entrés dans le vestiaire ensemble, on s’est dit : « Les mecs, on est vraiment en équipe de France ? » Pour ma première sélection, contre la Pologne (en amical, le 17 novembre 2004, 0-0, NDLR), je m’étais imaginé les pires scénarios possibles, tout ce qui pouvait mal se passer. J’étais tétanisé. Finalement, je joue 30 minutes, et je réussis chacun de mes gestes. J’ai atteint le top de ma carrière.

À Bordeaux, on attendait peut-être plus de cette génération ?

Et les gens avaient raison. On avait Darcheville, Laslandes, Chamakh, Mavuba, Riera, Ramé, je pourrais tous les citer, mais on n’a jamais réussi à accrocher le podium, ce qui reste une anomalie. Le pire, c’est qu’on dégringolait en milieu de tableau. Peut-être la faute à un surplus de talent dans l’équipe, ce qui est quand même très paradoxal. Mais bon, je n’oublie pas que c’est à Bordeaux que j’ai connu les Bleus et que j’ai bâti une bonne partie de ma carrière.

 

Il y a quand même le passage à l’OM.

À Marseille, c’est surtout l’épopée en coupe d’Europe qui est folle. Beaucoup oublient, mais dès la Ligue des champions, on sent qu’il va se passer un truc sur la scène européenne. On se coltine le Real Madrid, le Porto de Mourinho futur champion, et le Partizan. Pareil en Coupe de l’UEFA où on tape Liverpool, l’Inter, contre qui je marque à Milan d’ailleurs, et Newcastle, dans l’une des plus belles ambiances que j’ai vécues dans ma vie. Ce match de Newcastle au Vélodrome n’a pas d’égal, jusqu’à aujourd’hui. Le stade était rempli des heures avant le coup d’envoi, et dès notre entrée sur le terrain, on a compris qu’on avait gagné, car nos supporters étaient hystériques. Puis arrive la finale… On se fait arbitrer n’importe comment par Collina, je suis hyper bien entré dans le match et quand Fabien (Barthez) prend le rouge, c’est moi que le coach Anigo décide de sortir… Le parcours restera gravé à jamais, cette finale fait très mal par contre.

Quand j’y repense, nous étions trois joueurs de Sochaux en Bleu ! Moi, Benoît Pedretti et Pierre Alain-Frau. Vous imaginez un truc pareil aujourd’hui ?

Pourquoi ne pas être resté à Marseille ?

Mais je veux rester ! À la fin de la saison 2003-2004, je pars voir les dirigeants de l’OM pour leur signifier que je veux prolonger le prêt. J’étais confiant, mais du côté de Bordeaux, ils voyaient les choses autrement apparemment, puisqu’ils ont serré les négociations. Les Marseillais ont dit non, et à cette époque, les joueurs n’avaient pas un énorme poids dans les décisions.

C’est l’un des regrets de vos 550 matchs en carrière ?

Non… Allez, peut-être d’avoir refusé Séville. C’était en 2005, quand le club commence à monter en Espagne. J’avais un accord avec le club, j’avais beaucoup discuté avec le directeur du club (Monchi), mais comme pour Marseille, Bordeaux n’a pas voulu lâcher. Séville est quand même revenu deux ou trois fois à la charge, et je rêvais de jouer en Liga. Je savais qu’en allant en Espagne, je pouvais vraiment exploser et prendre une autre ampleur. Malheureusement, ça ne s’est pas fait. De mon côté, je n’ai peut-être pas suffisamment insisté non plus. C’était la première fois que je pouvais potentiellement quitter la France, donc j’avais une forme d’appréhension qui m’a sûrement dissuadé de vraiment foncer sur Séville. À la place, j’ai signé à Monaco.

Ce match de Newcastle au Vélodrome n’a pas d’égal, jusqu’à aujourd’hui. Le stade était rempli des heures avant le coup d’envoi, et dès notre entrée sur le terrain, on a compris qu’on avait gagné.

Le choix de l’étranger, vous le faites finalement assez tard, à 31 ans, pour aller en Grèce.

Oui, à ce moment-là, j’avais besoin d’aller voir ailleurs. La Ligue 2, la Ligue 1, j’en avais vraiment fait le tour. À cela s’est ajouté le passage manqué à Séville, donc quand l’opportunité s’est présentée en Grèce, j’ai tout de suite accepté. Et on ne va pas se mentir, c’était plutôt pas mal pour une fin de carrière. C’est d’ailleurs ce qui me convainc de finir ma carrière à Chypre deux ans plus tard. C’était le même mode de vie que la Grèce, et l’Apollon Limassol jouait la coupe d’Europe. Bon, la spécialité locale, c’étaient les retards de salaire, mais même ça, je m’y suis fait.

Vous avez choisi de vous éloigner du football pour en éviter les contraintes. Mais avec le footgolf, vous voyagez aussi pas mal finalement ?

Oui, mais avec le footgolf, je choisis les étapes auxquelles je souhaite participer. Sur les trente étapes que peut compter un circuit, je ne vais en faire que la moitié par exemple, et juste quelques-unes à l’étranger. J’ai suffisamment donné en voyage et en sacrifices pendant ma carrière. Maintenant, je profite.

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Propos recueillis par Adel Bentaha et Thibault Julien

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