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  • L'histoire des maillots
  • Épisode 4

Atlético Madrid, des matelas rouge et blanc

Par Gabriel Cnudde
Atlético Madrid, des matelas rouge et blanc

Il est porté dans les stades, sur les terrains le dimanche, dans la cour de recré, dans la rue. Le maillot de foot est le signe de ralliement de tout supporter. Et chaque maillot a son histoire. Cette semaine, celui du Club Atlético de Madrid.

Depuis quelques années déjà, les regards des acteurs et spectateurs de la planète football sont tournés vers l’Espagne. Vers le FC Barcelone et sa Pulga, bien évidemment, vers le Real Madrid et son phénomène, également, mais aussi vers le Club Atlético de Madrid, qui complète ce trio magique. Il faut dire que depuis 2010, le palmarès des Rojiblancos a de quoi faire des envieux : un titre de champions d’Espagne, une Coupe d’Espagne, une Supercoupe d’Espagne, deux Ligue Europa, deux Supercoupes de l’UEFA et une finale de Ligue des champions. À tel point qu’aujourd’hui, tout le monde connaît les Colchoneros et leurs rayures rouges et blanches.

Histoire d’un maillot

Comme c’est le cas pour beaucoup de clubs de football, ce sont des étudiants qui sont derrière la création du Club Atlético. En 1903, les élèves basques de l’école spéciale des ingénieurs des mines, supporters de l’Athletic Bilbao, fondent effectivement leur propre club à Madrid, l’Athletic Club de Madrid. Pour rendre hommage à leur club de cœur, ces étudiants adoptent la tenue de l’équipe de Bilbao : maillot bleu et blanc, short bleu et chaussettes noires. Une tenue qu’arborent à ce moment trois équipes, puisque le club de Bilbao l’avait lui-même emprunté au club anglais des Blackburn Rovers. Trois clubs, un seul maillot : c’est peu dire qu’à l’époque, on se fichait un peu de l’inspiration.

Dans cette tunique, la première, les joueurs de l’Athletic Club de Madrid accueillent d’anciens membres du Real Madrid qui souhaitent recracher leurs meringues. En 1905, le tout premier « derbi madrileño » est disputé dans la capitale espagnole. Dans la culture populaire, les clubs rivaux sont très rapidement associés à deux strates de la société : l’Athletic semble réunir les classes populaires de la capitale, tandis que le Real Madrid attire vraisemblablement les citadins les plus riches. Une fracture encore assez visible aujourd’hui à Madrid.

Juanito Elorduy chez les Saints

En 1911, Juanito Elorduy, ancien joueur et alors membre du conseil d’administration de l’Athletic Club de Madrid, part en Angleterre rendre une visite de courtoisie aux Blackburn Rovers dans l’espoir de ramener des jeux de maillots pour le club de Bilbao et pour celui de Madrid. Problème, le petit Jean échoue dans sa quête et ne trouve pas les tenues convoitées. Pour ne pas rentrer les mains vides, Elorduy passe un accord avec un autre club anglais, Southampton. L’ancien joueur revient donc en Espagne les bras chargés de maillots rayés en rouge et blanc. À Madrid, on décide de les porter, mais de garder le short bleu des Blackburn Rovers. À Bilbao, en revanche, on adopte le short noir des Saints.

Avant cette découverte historique, ce changement de couleurs était expliqué d’une tout autre manière. En 1911, les Matelassiers de la capitale utilisaient en guise de revêtement des tissus rouge et blanc. Forcément, quiconque s’amusait à faire les sorties des ateliers d’artisans pouvaient trouver facilement des chutes de tissu en grande quantité. Ainsi, fabriquer des maillots rouge et blanc coûterait moins cher que d’acheter des jeux de tuniques à des clubs anglais. C’est de ce constat qu’est né le surnom qu’ont gardé les joueurs de la capitale pendant toute l’histoire du club. Les fabricants de matelas, les Colchoneros, seront à jamais liés à l’Athletic Club de Madrid. Dans cette nouvelle tenue, qui permet enfin de les distinguer des joueurs de Bilbao, les Matelassiers parviennent à remporter à trois reprises le titre de champions régionaux (1921, 1925 et 1928). De bien belles années.

En 1939, et toujours avec leurs belles rayures, les joueurs de l’Athletic Club de Madrid accueillent en leur sein les joueurs de l’armée de l’air. Le club fusionne avec l’Aviación Nacional et devient l’Athletic Aviación Club. Seulement, deux ans plus tard, en 1941, un décret du nouveau chef de l’État espagnol, Francisco Franco, interdit aux clubs de porter des noms étrangers. Bloqué, l’Athletic Aviación Club devient l’Atlético Aviación. Un changement de nom uniquement – les maillots restent les mêmes – qui conduit les hommes de la capitale à leur deuxième titre de champions d’Espagne d’affilée. En 1947, le club décide à nouveau de changer de nom en abandonnant la référence à l’armée de l’air au passé. Pour la dernière fois, le club se renomme et devient le Club Atlético de Madrid, celui-là même qu’on connaît aujourd’hui. Commence alors une période faste pour le club, son âge d’or même. Des personnalités fortes, comme Helenio Herrera ou Larbi Benbarek, aident le club à remporter de nombreux titres sur les scènes nationale et internationale. Tout ça avec un maillot inchangé. Solide.

Maillot mythique

C’est donc logiquement dans cette période qu’il faut aller creuser pour déterrer le maillot mythique du club. Au tout début de cette période, plus précisément. En 1951, les Colchoneros remportent un deuxième titre de champions d’Espagne d’affilée (à cette époque, les joueurs de Madrid adorent les débuts de décennie). Cette année-là, avec un maillot rayé rouge et blanc à col sans sponsors, fermé par trois petits boutons blancs, les Rojiblancos battent leur rival éternel, le Real Madrid, à deux reprises : 6-3 à l’extérieur, puis 4-0 à domicile. Madrid est plus que jamais rouge et blanc et le restera un moment encore. Preuve en est dix ans plus tard. Les joueurs de l’Atléti assurent un peu plus leur contrôle de Madrid en battant le Real en finale de la Coupe du Roi à deux reprises, en 1960 et 1961.

Maillots extérieurs et autres maillots collectors

Depuis longtemps maintenant, le Club Atlético de Madrid a opté pour des maillots extérieurs sombres. Noir, bleu marine, violet… Bref, on est généralement assez loin des fameuses rayures blanches et rouges. Les plus beaux l’étaient par leur sobriété, tandis que les plus laids étaient sans doute victimes de sponsors trop imposants ou simplement trop moches.

Durant la saison 2003-2004, l’Atlético Madrid demande à Nike, son fournisseur officiel, d’éditer un maillot pour célébrer le centième anniversaire du club. Le blason du club, brodé au milieu du maillot sur d’épaisses rayures rouges et blanches, est accompagné d’un ruban dans lequel apparaissent les chiffres « 1903 – 2003 » . Le 26 avril, le club organise une fête exceptionnelle dans Madrid et demande à ses supporters de déployer le plus grand drapeau du monde, de la fontaine Neptune jusqu’au Vicente-Calderón, l’enceinte des Colchoneros. Malheureusement, cette belle célébration n’empêche pas l’Atlético de réaliser une saison médiocre. Les Rojiblancos terminent septièmes de la Liga. À jouer aux matelassiers, les joueurs de l’Atléti se sont fait endormir.

Les maillots pas jolis jolis sont nombreux, bien trop nombreux dans la capitale espagnole. Cependant, la palme revient sans aucun doute au maillot extérieur de la saison 2004/2005. Pourquoi ? Parce que cette année-là, Nike pond un maillot bleu sombre bien moche avec comme sponsor principal… Spiderman 2. Oui, Spiderman 2, avec Tobey Maguire et le docteur Octopus. Il faudrait peut-être fixer une règle interdisant aux clubs de football ce genre de trucs, c’est quand même grave.

Ils se sont inspirés du maillot du Club Atlético de Madrid

Comme beaucoup de maillots mythiques, celui du Club Atlético de Madrid a fini par lui aussi voir du pays. Le 7 mai 2014, le club investit massivement pour créer un nouveau club et l’affilier à l’Indian Super League. Avec les apports financiers de la star du cricket Sourav Ganguly et des entrepreneurs Harshavardhan Neotia y Sanjiv Goenka, le club de Madrid fonde l’Atlético de Kolkata. Pour sa première année, le club remporte d’ailleurs l’ISL.

Dans cet article :
L’Atlético s’impose dans le temps additionnel à Bilbao
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