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Affaire des quotas : dix ans après, quelles leçons ?

Par Nicolas Kssis-Martov
Affaire des quotas : dix ans après, quelles leçons ?

Le 28 avril 2011, Mediapart dévoilait le contenu d'une réunion de la DTN, tenue le 8 novembre 2010, durant laquelle s'était notamment discutée le projet d'établir des quotas de binationaux au sein de la formation française. L'épisode a été traumatique pour le football français parce qu'il touchait au cœur d'une équipe de France censée illustrer depuis le sacre de 1998 la diversité du pays. Dix ans plus tard, quelles leçons pouvons-nous en tirer ?

Rétrospectivement, l’affaire des quotas peut s’apparenter à une anecdote, voire à une simple péripétie de l’histoire du foot français. Un errement dans la traînée de poudre laissée par Knysna et les mauvais résultats des Bleus de l’époque. Or, de fait, les échanges tenus lors de cette réunion du 8 novembre 2010, et ses conséquences politiques et médiatiques, amènent malgré tout à s’attarder un peu sur ce mauvais souvenir. Tout d’abord parce qu’encore récemment, l’épisode s’est retrouvé partie prenante d’une polémique à la suite de la parution du livre Race et sciences sociales, écrit par Gérard Noiriel et Stéphane Beaud. Ce dernier, sociologue reconnu, entre autres, pour ses écrits sur le football et l’immigration, y consacre plusieurs chapitres, en particulier pour fustiger le traitement de Mediapart et la déraison des interprétations qui en ont découlé. L’ouvrage est ainsi devenu un objet de crispation intellectuel à gauche, autour de l’intersectionnalité, des questions de post-colonialisme ou de la primauté de la question sociale. Et le foot y occupe évidemment une place centrale.

Une tentation discriminatoire

L’exégèse et la contextualisation de cette fameuse réunion, dont le contenu fut rendu public par l’un des présents, Mohammed Belkacemi, ne doivent pas faire oublier l’un des faits les plus importants : la DTN, qui dispose d’une délégation de service public de l’État (ce qui expliquera l’intervention de la ministre, Chantal Jouanno en l’occurrence), s’est paisiblement demandé s’il ne serait pas souhaitable d’établir une distinction exclusive, et donc discriminatoire, entre citoyens français, selon leur origine et donc potentielle binationalité. Avec, en tête, comme ce le fut répété à l’époque, le sort des enfants de l’immigration post-coloniale africaine ou maghrébine qui auraient la sale manie de ne pas choisir le bon drapeau à l’heure d’opter pour leur sélection nationale. Que cette idée soit arrivée afin de récompenser les efforts des employés de la FFF ne dédouane en aucun cas les responsables, qui assumaient si bien ce choix que François Blaquart suggéra d’éviter de procéder « officiellement » à ses quotas et de ne pas piétiner les valeurs de la République. Pourtant, comme Francis Smerecki, grand acteur de la formation depuis décédé, le leur rappela franchement lors des échanges, citant son cas personnel de fils d’immigrés polonais, cette logique était surtout « discriminatoire ». Les propos tenus à l’emporte-pièce par Laurent Blanc sur les grands joueurs black baraqués qui barreraient la route des petits dribbleurs caucasiens finirent d’emporter cette discussion au-delà du réel.

Et ensuite ?

Si le vacarme fut cependant vite étouffé par les différents rapports, puis par l’arrivée de Didier Deschamps au poste de sélectionneur l’année suivante, le fond de l’affaire, lui, n’a finalement jamais été réglé. Cette épisode a marqué la fin du « Black Blanc Beur » en même temps que le vote Front National, puis RN, s’est imposé comme une alternative en France. Le football français, lui, a tout fait pour gommer les aspérités de certains représentants sur le terrain et les éventuelles résurgences de ces problématiques. Les héros de 2018, nimbés d’un consensus taiseux et feutré, en sont l’illustration parfaite. Il y a peu, Noël Le Graët s’est même senti bon d’affirmer que « le phénomène raciste dans le sport, et dans le football en particulier, n’existe pas ou peu ».

Entre-temps, pourtant, un cas a souligné nombre de fêlures apparues lors de cette réunion de 2010 : celui de Karim Benzema. L’éternel soupçon et le besoin sans cesse renouvelé de « prouver » qu’on mérite sa place, le statut précaire accordé aux joueurs issus de l’immigration et les non-dits de 2011 sont loin d’avoir disparu. Sans présager des suites judiciaires concernant le joueur du Real, comment ne pas se remémorer des indignations à la suite de ses propos au sujet de son rapport à l’Algérie ? Puisqu’on évoque la formation, tous les joueurs ne sont pas traités de la même manière en tant que français. Les binationaux Antoine Griezmann et Lucas Hernandez, par exemple, deux purs produits de la formation espagnole, sont toujours regardés comme des tricolores par « essence » , quand des gamins ayant réalisé tout leur parcours au sein des centres de formation de l’Hexagone doivent chanter La Marseillaise à tue-tête. Cherchez l’erreur.

C’est fait : Johan Cruyff à Barcelone !

Par Nicolas Kssis-Martov

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