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À quel point est-ce dur d’entrer dans un match à froid ?

Par Antoine Donnarieix et Martin Grimberghs
À quel point est-ce dur d’entrer dans un match à froid ?

Une rencontre de foot, au départ, c'est deux équipes, soit vingt-deux acteurs, prêts à lutter bec et ongles pour sortir vainqueurs du combat. Mais c'est aussi cinq remplaçants, pouvant entrer à tout moment. Parfois même sans avoir eu le temps de s'échauffer préalablement, comme Dawson la semaine dernière, coupable d'une passe en retrait ratée pour Kaboul qui amène le but de Suárez. Vite faire et bien faire, une pression trop grande à gérer ?

Dans le football, il y a finalement plus ingrat que le poste de gardien du but. Si le portier a au moins cette chance de démarrer une rencontre, certains de ses partenaires n’ont pas ce luxe dans leur éventail de choix. Lorsqu’il est cantonné au banc de touche, le joueur professionnel doit faire preuve de qualités multiples. De la compréhension vis-à-vis des choix de son coach, de la disponibilité si l’entraîneur a besoin de lui à un moment précis du match, et surtout apporter une plus-value au collectif au moment d’entrer sur la pelouse. Des qualités que des joueurs comme Nicolas Anelka, Carlos Tévez ou Michael Dawson n’arrivent pas toujours à mettre en œuvre. Non, être remplaçant ne consiste pas à poser ses fesses et rigoler avec son acolyte sur le bord du terrain. Avec 654 matchs au cours de sa carrière professionnelle, Laurent Battles a son mot à dire. « Quand tu entres sans préparation, il faut être dans la tête assez intelligent pour se mettre tout de suite dedans, explique le Stéphanois. Quand tu dois remplacer un copain sur blessure, il faut s’échauffer pendant le match. Pendant les arrêts de jeu ou alors quand le ballon est à l’opposé, c’est important de continuer à courir. » C’est aussi une tâche sportive à accomplir. En démarrant sa carrière au FC Metz, Cyril Pouget savait déjà qu’il devait faire ses preuves pour devenir titulaire chez les Grenats. « J’ai débuté ma carrière en étant remplaçant, raconte l’ancien international tricolore. J’ai eu la chance d’entrer et, sur mon premier ballon, j’ai mis mon premier but en Ligue 1. Pour un attaquant, si tu commences à te poser des questions, vaut mieux arrêter le football. Il faut montrer son envie. » La voie à suivre pour tous ceux qui en ont marre de se morfondre emmitouflés dans leur parka, à regarder défiler les minutes de jeu en survêtement.

Le rêve d’être le sauveur

Cet opportunisme, tous les joueurs pros en sont capables. En réalité, le déclic réside dans la capacité à tirer profit de l’instant. Une qualité qui se travaille d’après Pouget : « Tous les remplaçants ne résonnent pas de la même façon. Des fois Ménez, il entre et on a l’impression qu’il n’a pas envie de jouer. Par contre, Pastore, on a vu qu’il avait envie d’apporter un plus. C’est surtout psychologique. » Un collectif, c’est bien plus que onze titulaires. En cela, Marco Verratti a parfaitement rempli son rôle fictif de coach mental. Si tous les seconds couteaux rêvent d’un pareil dénouement, le côté pile du remplaçant n’efface pas pour autant son côté face. Devoir entrer en plein match, s’échauffer en deux temps trois mouvements et être au taquet en cinq minutes, c’est quand même un sacré défi. « C’est toujours délicat parce que généralement on ne s’y attend pas, explique Pouget. Ça part d’un changement tactique de l’entraîneur ou d’une blessure. Le rythme du match n’a rien à voir avec celui de l’échauffement. Et puis surtout, il faut gérer la pression. » La pression, c’est un euphémisme de dire que Jérémy Gavanon l’a connu ce 19 mai 2004 à Göteborg.

Ce soir-là, l’Olympique de Marseille affronte le FC Valence pour glaner le second trophée européen de son histoire, en finale de la Coupe UEFA. Alors qu’on file tranquillement vers la pause et que le score est toujours de 0-0, Fabien Barthez accroche Mista dans la surface de réparation. Carton rouge et penalty. Gavanon entre dans le grand bain, en remplacement de Camel Meriem : « Je n’ai même pas le temps de gamberger. Après, en tant que gardien, on aime bien toucher le ballon, mais ce soir-là, Collina n’a même pas voulu que je touche le ballon. J’étais complètement froid. Ce n’est pas évident, mais à la base, en tant que doublure, on se prépare toujours au pire. Il faut toujours être prêt à monter dans les moments particulièrement délicats. » Aux fraises sur le pénalty, l’actuel gardien de l’AS Cannes prend un contre-pied parfait de Vicente et voit Valence passer devant au tableau d’affichage. « Même si ça plombe le match, ça reste un de mes plus beaux souvenirs, se remémore Gavanon. Jouer une finale de Coupe d’Europe dans son club formateur, c’est le rêve. » Un rêve qui aurait peut-être pu changer la carrière du portier olympien si la tentative avait été stoppée…

« Si tu entres devant, t’as moins de chance de faire d’erreurs »

La partie reprend en Suède. Dominé, l’OM prend rapidement un nouveau but signé Mista. L’intensité baisse en même temps que la tension, et plus rien ne peut arrêter Valence, qui file vers une victoire inéluctable. « Quand tu entres à 2-0 contre toi, avec un Didier Drogba blessé et à 10 contre 11, c’est difficile de te dire que tu vas pouvoir revenir au score, avoue Battles. L’envie est là, on ne sait jamais ce qui peut arriver dans les dernières minutes, mais je ne me suis jamais mis trop de pression. » Pour l’ancien Marseillais, l’affaire était déjà pliée, et ce rôle de sauveur ne pouvait plus lui incomber. Aujourd’hui dans la cellule de recrutement du club de l’AS Saint-Étienne, l’ancien Bordelais avait un avantage sur son coéquipier Gavanon : un poste offensif, qui lui permettait d’évacuer plus la pression au moment d’entrer sur le terrain. Ainsi, plus on s’éloigne de ses propres bois, moins l’étiquette du coupable est envisageable. « Tout dépend du poste que l’on occupe. Dawson, moi, j’ai vu le match, il entre, il n’est pas chaud, y a déjà 1-0… C’est sûr que si tu entres devant, t’as moins de chance de faire d’erreurs. » Un constat qui pourrait faire beaucoup de bien au moral d’Hasan Salihamidžić. Car si l’histoire retient Teddy Sheringham et Ole Gunnar Solskjær en héros de Manchester United lors de sa victoire au buzzer contre le Bayern Munich en 1999, on a tendance à oublier que le milieu bosnien était entré à la 90e minute, quand le score était de 1-0… pour le Bayern.

Par Antoine Donnarieix et Martin Grimberghs

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