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À Manchester United, le fond de l’air est Fred
Au milieu d'un Manchester United toujours en grand chantier, qui peine à digérer les enseignements de son nouveau senseï allemand Ralf Rangnick, Fred retrouve des couleurs. Le Brésilien, qui n'a jamais complètement conquis ni les supporters ni les observateurs depuis son arrivée en 2018, s'est épaissi dans l'entrejeu mancunien ces dernières semaines, au point d'en devenir l'un des atouts maîtres.
L’heure n’était pas aux réjouissances à Old Trafford, samedi dernier. Les Red Devils n’avaient pas pu faire mieux qu’un maigre 1-1 face à Leicester et ne prenaient qu’un petit point les bloquant à la septième place de Premier League. Une situation au classement, hors de la zone européenne, qui ne ravit pas la moitié rouge de Manchester. Mais à United, il en est un qui n’a pas à rougir de ses dernières performances, et qui a d’ailleurs remis ses coéquipiers dans le droit chemin encore ce week-end. Entre son caviar vendangé par Bruno Fernandes dès la 26e minute après une interception, son activité en défense et son égalisation aussitôt après l’ouverture du score des Foxes, Fred a été le meilleur joueur de son équipe ; et depuis l’arrivée d’un certain Ralf Rangnick au club, il n’est plus si rare de pouvoir le dire.
Under Pressure
Entre le coach allemand et le milieu brésilien, l’osmose n’a rien du hasard. Sous la férule d’Ole Gunnar Solsjkaer au début de l’année, lorsque les Diables étaient tout sauf flamboyants, il était déjà l’un des moteurs défensifs mancuniens, et celui qui effectuait le plus de pressions de tout le contingent écarlate. Le débarquement d’un tacticien dont la marque de fabrique est le harcèlement du porteur dès la perte de balle ne présageait que du bon, dans son cas, et les premiers mois d’exercice sont venus confirmer cette belle promesse. Très souvent associé à un Scott McTominay qui évolue plus bas sur le terrain, Fred s’aventure plus haut pour presser : un rôle qui lui sied bien mieux que celui qu’il a longtemps occupé depuis ses premiers pas en rouge en 2018, lorsque José Mourinho préférait le poster devant sa défense, s’il choisissait de le faire jouer. Un rôle qu’OLS n’avait pas fondamentalement remis en question.
« Je porte le piano pour que les artistes jouent »
Le Brésilien, dans une interview accordée à TNT Sports Brazil, a d’ailleurs lui-même formulé fin février sa préférence pour ce chamboulement : « Je ne suis pas le meilleur joueur, le plus technique, mais je donne ma vie dès que je suis sur le terrain. Comme on dit au Brésil, je porte le piano pour que les artistes jouent. J’ai plus joué en box-to-box dernièrement, et j’aime bien ça. C’est ma position favorite, et c’est comme ça que je joue avec le Brésil. » Une manière de remercier un coach qui le fait jouer à sa place, en mettant en avant ses capacités à répéter les efforts inlassablement, et à s’effacer au service du collectif, deux qualités chères au Rangnick way of playing.
En exploitant mieux le potentiel de gratteur du Brésilien, l’Allemand le pousse aussi à jouer plus vite ; en témoignent ses deux actions de récupération face à Leicester ce week-end, Fred commence à maîtriser la nécessité de très vite se projeter à la suite d’une pression réussie, chère à son nouveau coach. Un autre point crucial dans la renaissance de l’ancien du Shakhtar, lorsque l’on se remémore ce que Troy Deeney avait balancé sur talkSPORT en octobre 2020. « Quand vous jouez contre Fred, et c’est ce qu’on a fait, laissez-le avoir le ballon. Il ne sait pas jouer en une ou deux touches. Il l’a, il se tourne, se retourne… Trois ou quatre fois par match, il vous donnera le ballon », lâchait au micro l’attaquant de Watford.
Last but not least, les statistiques offensives du Brésilien ont aussi pris une autre tournure : son placement plus haut sur le terrain et ses projections le rendent plus décisif. Il affiche déjà quatre buts et cinq passes décisives cette saison en Premier League, contre deux buts et une passe sur les trois saisons précédentes. De quoi parachever la seconde jeunesse d’un joueur qui a déjà 29 ans, et qui a parfois été un peu facilement pointé du doigt, en raison de la flagrance de ses errements tactiques et de ses approximations techniques. Manchester United n’est toujours pas une machine de guerre, où David de Gea serait l’ultime rempart d’un but rendu inatteignable par une alchimie parfaite entre les dix joueurs de champ, passés maîtres dans l’étouffement de leurs adversaires ; mais la nouvelle forme de Fred prouve que Rangnick ne prêche pas dans le désert, et que des choses se passent à Manchester United.
Par Paul Citron