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Vis ma vie de Bernard Mendy en Inde

Par Guillaume Vénétitay, à Chennai
Vis ma vie de Bernard Mendy en Inde

Les équipes participant au tournoi clinquant indien restent 24h/24h dans un hôtel pendant trois mois. Bernard Mendy raconte la routine, la cohésion d'un groupe et l'absence de câlins.

À une époque où des gens au Camp des Loges sont à deux doigts de se bastonner pour un vulgaire sandwich au thon, il est difficile de négliger ce qui se trame en coulisses de certains clubs. Explorer l’arrière-cuisine des équipes permet parfois de comprendre des jeux d’influence, des rapports privilégiés entre coéquipiers, la qualité des conditions de travail. En Inde, il y a une particularité : les équipes de l’Indian Super League (ISL) vivent pendant trois mois à l’hôtel, et les joueurs, qu’ils soient indiens ou étrangers, n’ont pas leur propre appartement. Bref, une mise au vert permanente. On s’est demandé comment s’accommodent les joueurs de cette bizarrerie indienne. Et qui mieux que Bernard Mendy pour répondre ? L’ex-joueur du PSG vient jouer tous les automnes à Chennai depuis le début de l’ISL en 2014. Depuis un but claqué via un retourné, le Français est devenu la coqueluche des supporters, à un point difficilement imaginable. « C’est même trop » , confie humblement le latéral du Chennaiyin FC, ovationné dès qu’il part s’échauffer. Mieux, Mendy a aussi évolué six mois cette année en I-League, le championnat domestique concurrent de l’ISL, avec le mythique club d’East Bengal, à Kolkata (ex-Calcutta). « Un monde d’écart » , résume-t-il, assis dans un confortable fauteuil du hall de l’hôtel Hyatt Regency, dans le quartier très central de Teynampet.

Cohésion plus forte

Le monde d’écart, c’est donc déjà celui-là : un hôtel cinq étoiles pour tous les joueurs du Chennaiyin FC et le staff. « Cela correspond à quarante-cinq chambres en temps normal et on passe à environ soixante les soirs de match où les dirigeants viennent parfois avec leurs amis » , détaille Anirudh Sanjeev, directeur associé des ventes de l’hôtel. Les joueurs se retrouvent régulièrement dans ce hall. Pour discuter, ou boire un thé avant de se diriger ensuite vers l’un des cinq restaurants, d’aller à la salle de muscu ou à la piscine. « C’est ici, au lobby, que je traîne le plus. J’aime bien l’hôtel, mais il faut trouver des trucs pour s’occuper. On a une suite au 10e étage, qui est un peu notre salle de repos. Il y a une table de ping-pong, un écran avec la Playstation. Mais bon, je suis un peu trop vieux pour la Play. À la limiteCall of Duty, ça va. Mais aux jeux de foot, je suis vraiment bidon, même le plus nul me tape » , rigole Bernard Mendy.

Des moments de groupe forcément plus fréquents que lors de sa carrière européenne où, après l’entraînement, chacun rentre chez soi. « La cohésion est beaucoup plus forte. Ça fait trois ans maintenant que je suis ici, les Indiens sont comme mes petits frères. Et la première année, il y avait la French connection, avec par exemple, Mikaël Silvestre, Eric Djemba-Djemba ou Gennaro Bracigliano. On mettait l’ambiance » , se souvient le Français. Des bonnes relations que Bernard Mendy retrouve avec le personnel de l’hôtel Hyatt Regency, auquel il est plus facile de s’attacher. Le week-end, il mate les matchs européens et la Premier League avec le serveur d’un bar de l’hôtel, fan de foot, et quelques autres joueurs. Du côté des cuistots, on s’adapte s’il y a des demandes précises pour la nutrition et on complète le buffet en fonction, notamment pour Materazzi et les Italiens, fragiles avec la bouffe épicée. « Après trois ans, on a l’impression que l’hôtel est vide quand le Chennaiyin FC n’est pas là. Le foot et les événements avec les sponsors, c’est leur travail. On fait donc participer les joueurs à des activités, on a célébré par exemple Diwali avec eux » , ajoute Parijat Gupta, directrice de la communication de l’hôtel.

Skype ne remplace pas les câlins

Problème : le rythme très élevé de l’ISL, avec des longs déplacements, ne permet pas de s’imprégner totalement de la ville et de l’Inde. L’hôtel est une sorte de cocon doré, alors que l’anonymat des joueurs de foot par rapport aux stars du cricket permet de se balader plus tranquillement qu’en Europe. « On essaye quand même de sortir quand on a un jour de repos. À Calcutta, en I-League, j’étais aussi à l’hôtel, mais j’ai fait plein d’activités extra-sportives. Je suis allé dans des écoles, j’ai joué au basket, au foot. J’ai rencontré des enfants, des femmes battues. J’aime bien ce truc-là, donner un peu de soi, aller vers les autres. Et on a un peu moins le temps en ISL » , détaille Bernard Mendy. L’autre hic pour les joueurs, indiens ou étrangers, c’est l’absence de leur famille. En enchaînant plusieurs saisons en ISL et une en I-League, c’est la première fois que le Français se retrouve éloigné aussi longtemps de sa femme et de ses trois filles, basées à Caen. « Ce n’est pas forcément facile d’être loin. Je vais mettre en valeur ma femme. Elle gère de manière extraordinaire cette distance en s’occupant des trois filles. Ce n’est pas simple, car des fois, ce sont des anges et le lendemain des démons ! Disons, quand ça se passe bien pour elle, ça va. Mais lorsqu’elle le vit mal, je le vis mal. » Tous les jours, l’ex-international passe des coups de fil. Avant et après l’école. « Mais Skype, ça ne remplace pas les câlins ! Et quand tu raccroches, tu te retrouves dans ta chambre, seul et tu te dis : « Oh le cafard. »Mais bon, t’as pas le choix. » Il profite de leur présence pendant les vacances scolaires françaises, passe du temps avec elles à la plage et sur les rutilants marchés de Chennai. Et à chaque fois, les départs sont remplis de larmes.

Sept mois à l’hôtel ?

On aurait tort de se moquer du chagrin de ces gars alors qu’ils sont calés dans un hôtel cinq étoiles. Les conditions de vie et le moral jouent sur les performances, rien de nouveau de ce côté-là. Et c’est peut-être le gros défi de l’ISL pour les années à venir, alors qu’une fusion avec l’I-League est évoquée pour former un championnat unique de sept mois. Sept mois dans un hôtel, sans famille, ce sera sans doute trop long pour les joueurs. « Je ne sais pas comment ils feront. Ils parlent de placer les joueurs dans les apparts. Peut-être ce sera les Indiens dans les apparts, les Européens à l’hôtel. Mais si on est tous dans des apparts, ce sera quasi impossible, par exemple avec la circulation pour être tous à l’heure à l’entraînement » , pense Bernard Mendy. « Au-delà de trois mois, il faut être sûr, car les joueurs peuvent arriver à saturation. Pour l’instant, il n’y a rien de sûr, on a commencé à discuter, mais la ligue est seulement au début de ce projet, c’est encore flou » , affirme Anirudh Sanjeev. Idem, le budget de l’équipe devra être recalibré, même si personne ne se mouille, à l’hôtel ou au club, pour donner une estimation du prix pour trois ou sept mois à l’hôtel. En bref, l’ISL va devoir se normaliser, devenir un championnat classique, et ce ne sera pas simple.

Bernard Mendy, lui, est prêt à venir s’il y a une bonne solution pour sa famille sur sept mois. « Je sais que ma femme et mes filles diront oui direct. Elles adorent ici ! » En attendant l’année prochaine, le Chennaiyin FC, champion en titre, vient d’être éliminé de la course aux play-offs. De quoi permettre au Français de rentrer plus tôt et d’éteindre un peu Skype.

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Carnet de voyage : sept jours en Inde avec Vikash Dhorasoo (partie 1/2)
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