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Pourquoi Davidovich Fokina est le plus grand frisson de la NextGen
Par Quentin Ballue
5 minutes
Vendredi, Alejandro Davidovich Fokina est sorti vainqueur d'un bras de fer de plus de quatre heures avec Casper Ruud, tête de série numéro 15. Samedi, il a fêté son 22e anniversaire. Et ce dimanche, il disputera son premier huitième de finale porte d'Auteuil contre Federico Delbonis, sur le Suzanne-Lenglen. Fils d'un boxeur, l'Espagnol a appris à encaisser les coups, et à les rendre avec la raquette. On vous explique pourquoi il faudra absolument garder un œil sur lui, dans les jours et les années à venir.
Parce qu’il monte
« Si je fais ce sport, c’est pour être l’un des meilleurs du tennis, tôt ou tard. C’est mon objectif. » Davidovich Fokina a un cap, et il s’y tient plutôt bien. Le Malagueño s’est révélé en 2017 en remportant Wimbledon chez les juniors, comme Björn Borg, Ivan Lendl, Pat Cash, Stefan Edberg, Roger Federer, Gaël Monfils, Grigor Dimitrov ou Denis Shapovalov avant lui. Il est entré dans le top 100 mondial en 2019, année où il a notamment atteint les demi-finales à Estoril, en battant Jérémy Chardy et Gaël Monfils sur sa route. Son jeu agressif et ses jambes de feu lui ont permis d’être aujourd’hui classé 46e à l’ATP. Parmi les joueurs qui le devancent, seuls deux sont plus jeunes que lui, Jannik Sinner et Félix Auger-Aliassime. À l’aise sur toutes les surfaces, l’Espagnol peut déjà se targuer d’avoir joué un huitième de finale de l’US Open et un quart de finale à Monte Carlo. À son tableau de chasse, quelques prises de choix comme Marin Čilić à Cologne, Kharen Khachanov à Paris, Roberto Bautista Agut à Rotterdam, ou encore Cameron Norrie et Grigor Dimitrov à Rome. Il s’en est fallu d’un petit point en octobre 2020 pour que Diego Schwartzman rejoigne cette liste. Son coach Jorge Aguirre voit en lui du Novak Djokovic et du Roger Federer, excusez du peu : « Parler de ces deux joueurs revient à blasphémer, car ils sont si grands et si bons… Mais pour moi, c’est un mélange des deux. » Davidovich Fokina s’identifie d’ailleurs tout particulièrement au Serbe, qu’il a pu affronter au troisième tour du Masters 1000 de Rome le mois dernier.
Parce qu’il a le fuego
Carlos Alcaraz est plus précoce, certes, mais Alejandro Davidovich Fokina a ce brin de folie qui en fait une attraction, présente et future, du circuit. Casper Ruud a pu s’en apercevoir vendredi sur le court 14 quand l’Espagnol a opté pour le service à la cuillère sur une balle de débreak à 6-5 dans le 5e set. L’audace a payé, puisque le Norvégien, surpris, a envoyé son revers dans le filet. ADF est pourtant coutumier du fait. Il avait déjà servi de la sorte pour effacer une balle de set contre Hubert Hurkacz au dernier US Open et une balle de break contre Daniil Medvedev à Madrid. Il avait aussi fait le coup à Thiago Seyboth Wild lors du tournoi de Rio en 2020, sur une balle de break puis sur une balle de set. Ce qui lui avait valu des sifflets jusqu’à la fin du match et une bonne explication avec un spectateur. Une rencontre qui résume bien le personnage. « C’est vrai que j’ai une folie à l’intérieur de moi, mais nous travaillons pour qu’elle soit modérée, expliquait-il à Punto de Break en 2019. Dans certains points clés, il est bon d’avoir ce point de folie pour donner un plus. Sur le terrain, j’ai un comportement désordonné, je suis un peu imprévisible. Quand il y a des points importants, vous devez laisser la folie de côté et être conscient du point que vous jouez, mais dans d’autres points, je deviens fou. J’aime beaucoup Kyrgios, Fognini ou Dolgopolov, des joueurs dont on ne sait pas ce qu’ils vont faire à chaque point. » Maintenant, on comprend mieux.
Parce que plus c’est long, plus c’est bon
Si on aime les tournois du Grand Chelem, c’est pour ces matchs complètement dingues qui durent, qui durent, et qui rendent leur verdict au bout d’un cinquième set. Foki est un bon client puisqu’il a déjà connu cette configuration quatre fois en douze rencontres dans le tableau principal d’un Majeur. Et il en est à chaque fois ressorti vainqueur. 3h04 contre Norbert Gombos à l’Open d’Australie 2020. 2h54 contre Dennis Novak à l’US Open 2020. 3h42 contre Botic van de Zandschulp mercredi à Roland-Garros. 4h35 contre Casper Ruud vendredi. L’Espagnol a aussi à son actif le match le plus long de l’histoire du tournoi de Rio avec 3h49 de jeu contre Thiago Seyboth Wild en 2020. Le mois dernier, il avait passé près de trois heures sur le court pour se défaire de Pierre-Hugues Herbert au premier tour du tournoi de Madrid, sans jamais lâcher, même quand il était mené 4-1 dans le tie-break décisif. Le Malagueño aime ferrailler. Pas étonnant quand on sait que l’ancien marathonien Martín Fiz, champion du monde en 1995, fait partie de son staff. « Je suis un lien entre son psychologue et son préparateur physique. Mais je me concentre surtout sur le côté psychologique, car je viens d’un sport difficile, où il faut travailler dur, où il y a des hauts et des bas, et c’est ce que j’essaie de transmettre à Alex, confiait l’athlète à l’ATP en avril. Je lui répète de croire en lui dans les moments difficiles, de continuer même s’il perd un set. Je veux qu’il soit fort mentalement. » Ça ne marche pas trop mal jusqu’à présent.
Parce qu’il est sur toutes les balles, et sur tous les terrains
Davidovich Fokina sait s’adapter. Et pas seulement sur le court. Vous ne l’imaginez certainement pas avec un tablier autour de la taille, et pourtant… « J’aime beaucoup cuisiner, j’adore ça, révélait-il à Punto de Break. Les jours où je ne rentre pas crevé de l’entraînement, j’aime faire mes petites préparations, j’adore mettre le bazar dans la cuisine. (Rires.) Avec le Thermomix, je fais des merveilles. » Le côté pile, et le côté face, puisqu’il ne s’était pas privé pour s’envoyer du gras et du sucre pendant l’intersaison. « J’ai mangé beaucoup de malbouffe parce que c’est la seule partie de l’année où je peux manger tout ce que je veux, j’en ai profité », racontait-il à Marca en janvier. Polyvalent, il marche aussi sur les plates-bandes de notre Djibril Cissé national : « Je veux apprendre à être DJ, j’ai acheté une table portable. Je l’emmène avec moi aux tournois[…], j’ai quelques amis qui sont DJ et qui mixent dans des clubs, ils m’ont donné des conseils. » Cerise sur le gâteau : c’est un mec généreux qui a lancé une plateforme nommée Adoptas.org pour lutter contre l’abandon des animaux et favoriser les adoptions en Espagne. Le joueur qu’on veut tous voir, et le pote qu’on aimerait tous avoir.
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Par Quentin Ballue