- CAN 2010
- Jacques Songo'o
«Pas la culture de l’entraînement des gardiens»
Gardiens sans mains, gardiens sans pieds, gardiens gymnastes mais gardiens de but, pas vraiment. Cette CAN 2010 est pour le moment dure à vivre pour des portiers plutôt mauvais. Constat brutal mais réel, que ne nie pas Jacques Songo'o, à l'aise avec ses mains, ses pieds et sans doute sur une barre fixe. Entretien avec l'un des gardiens africains les plus efficaces des 15 dernières années.
Que devenez-vous depuis le temps ?
Ça va, ça va bien, je suis toujours dans le milieu du foot en Espagne. Je suis superviseur pour le Deportivo La Corogne. Mais, je ne regarde pas seulement les gardiens de but. Je vais voir aussi d’autres jeunes sur d’autres postes.
Vous avez quand même le temps de suivre la CAN en Angola ? Quel est votre avis sur le tournoi ?
La CAN ? Pour l’instant, ça se passe bien malgré l’incident dramatique survenu en tout début de compétition. Côté sportif, l’Egypte a l’air de se présenter comme le principal favori à sa succession. Elle a vraiment un jeu complet. La Côte d’Ivoire peut également prétendre à quelque chose de bien. J’ai bien aimé le Mali aussi, mais je trouve dommage qu’il soit éliminé de la compétition.
Rien sur le Cameroun ?
Je suis un peu triste de leur parcours, ils ne sont vraiment pas bien entrés dans la compétition. Il faudra attendre la fin du tournoi pour un faire un bilan de ce Cameroun-là. Pour le moment, cette équipe ne joue pas bien au ballon, elle n’a pas démontré grand-chose et elle joue son prochain match contre l’Egypte, le favori. Je me dis que ce sera peut-être une chance pour le Cameroun de montrer vraiment ce qu’il vaut. Il a l’expérience de ce genre de rendez-vous.
Évidemment, on ne peut s’empêcher de vous interroger sur le faible niveau des gardiens pour cette édition 2010…
C’est normal de se poser cette question. Actuellement, la plupart des gardiens africains sont mauvais. Il faudrait que la CAF se penche sérieusement sur ce problème. Nous n’avons pas la culture de l’entraînement pour les gardiens de but. Le jeu a changé. Aujourd’hui, il va beaucoup plus vite, un gardien doit savoir jouer des pieds, des mains, doit relancer, doit savoir lire le jeu et jouer un peu plus haut aussi.
Et aucun des portiers de cette CAN ne correspond à ce profil ?
On ne peut pas dire pour le moment qu’on ait vu un gardien sortir du lot depuis le début de la compétition. Mais, ça ne veut pas dire qu’il n’y en a pas avec un bon niveau.
Qui ?
Selon moi, le meilleur gardien africain, c’est Carlos Kameni, sans aucun doute. Il est monté à un très haut niveau et a beaucoup progressé. Mais là, il ne sort pas du lot, à l’image du Cameroun.
Mais alors comment faire pour voir plusieurs Kameni sortir d’Afrique ?
Il faudrait pouvoir proposer des entraînements spécifiques aux gardiens de but dès le plus jeune âge, en proposant des nouvelles méthodes d’entraînement, et avec des personnes qui ont une bonne connaissance du poste de gardien et de son évolution, des personnes qui ont des diplômes, formés pour l’exercice. N’Kono en a un, moi aussi d’ailleurs, je viens de l’obtenir.
Bon, on va pas se mentir, vous vous dévouez pour améliorer le niveau des gardiens africains en fait ?
Ce n’est pas ce que je dis. Ce n’est pas le sujet du moment.
Mais le poste de gardien intéresse-t-il toujours les jeunes Africains ?
Évidemment qu’ils aiment bien ce poste. Il y a quand même eu de très bons gardiens africains, qui ont donné une bonne image du poste. Cela les inspire. Après, si l’entraînement n’est pas adéquat, forcément, on ne peut pas les retrouver à un haut niveau. Actuellement, en Afrique, il n’y a pas l’entraînement pour.
Comment aviez-vous débuté dans les cages, vous ?
Au début, moi, j’étais milieu défensif, et lors d’un match, notre gardien s’était blessé. Je me suis proposé pour le remplacer, et ça a bien fonctionné. C’était à 15-16 ans et je n’ai plus quitté le poste ensuite. C’est aussi grâce à l’entraîneur qui m’a laissé ma chance. C’est un choix que je ne regrette pas, bien entendu.
Propos recueillis par Ronan Boscher
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