- Amical
- France-Pays de Galles (3-0)
Karim Benzema, si près du but
Il n'attendait peut-être plus cette 82e sélection. Pourtant, elle est bien arrivée. Titulaire à la pointe de l'équipe de France face au pays de Galles (3-0), ce mercredi à Nice, Karim Benzema a repris le fil d'une histoire internationale qui ne méritait pas de s'achever sur un imbroglio. Mais un penalty raté l'a empêché de boucler ce match de manière parfaite. Pour sûr, ce n'est que partie remise.
Cela faisait trop longtemps qu’il n’avait pas connu ces sensations. Une tunique bleue à enfiler, une Marseillaise murmurée du bout des lèvres, une voiturette Volkswagen apportant le ballon du match (les mauvais esprits y auront vu un kart ou une F1), les espoirs de toute une nation sur ses épaules… Et c’est exactement ce qu’a trouvé Karim Benzema ce mercredi soir à l’Allianz Riviera de Nice. « Ce que j’ai ressenti en portant ce maillot ce soir ? De la fierté. Beaucoup de fierté, beaucoup de joie, confiait-il au micro de TF1 en sortant de l’arène. J’avais envie de montrer ce que j’ai fait ce soir sur ce terrain. » À savoir : une activité monstre, des efforts sans relâche et surtout de l’acharnement à marquer, coûte que coûte, ces retrouvailles par un but. Les 90 minutes offertes par Didier Deschamps allaient évidemment dans ce sens, mais ce but n’est finalement jamais venu.
Ce n’est pas faute d’avoir vu Antoine Griezmann lui transmettre le témoin au point d’un penalty qu’il a lui-même provoqué. Mais l’un comme l’autre resteront sur trois penaltys consécutifs manqués avec les Bleus. Ce n’est pas faute non plus de lui avoir laissé l’ensemble du match pour venir à bout de ce diable de Danny Ward et son 1,91m, puisque Deschamps a remplacé l’ensemble des joueurs gravitant autour du Madrilène, peut-être dans l’espoir lui aussi de le voir planter. Mais c’est bien un remplaçant, Ousmane Dembélé, qui a pu profiter du sublime enchaînement de Benzema terminant sur le poteau pour parachever le score. Au bout du compte, et malgré un match abouti collectivement parlant, cette soirée sans but laissera l’étrange impression qu’après cinq ans et demi d’absence, l’heure de Karim Benzema n’était pas encore complètement arrivée.
La promenade du Français
Un rendez-vous manqué ? C’est bien ce qu’on redoutait dans les rues de Nice au cours de la journée. À l’image de ce pizzaïolo dans la vieille ville, qui prédisait les futurs tracas, tout en pétrissant sa pâte : « Il a intérêt à marquer maintenant, sinon tout le monde va lui tomber dessus. » Preuve des attentes qui pèsent sur le joueur du Real. À deux heures du match, c’était toujours lui qui était attendu au tournant. Ou plutôt à la sortie de l’hôtel Radisson, sur la promenade des Anglais. Il y a ici des ados triturant nerveusement leurs smartphones sur la pointe des pieds, un mec du BTP encore vêtu de son gilet fluorescent ou encore des pères de famille portant leur progéniture sur les épaules.
Tous ont stoppé net leur activité pour se masser derrière les barrières, depuis une bonne heure avant le départ bordant le bus des Bleus. Et tous n’ont qu’un nom à la bouche : « Benzema ». Les Bleus défileront à la manière Champs-Élysées, grimpant dans le véhicule en 1 minute et 19 secondes, montre en main. Pourtant, au moment de mettre le contact, c’est une flopée de supporters, les seuls que les joueurs croiseront durant ce séjour azuréen, qui débordent sur la chaussée pour scander le nom du repenti. La Baie des Anges, si calme en ce début de mois de juin, avait bien besoin de ça pour reprendre des couleurs.
« Karim ! Karim ! » C’est la promenade des Benzemix à Nice. #EquipedeFrance pic.twitter.com/ig9dXXleBf
— Mathieu Rollinger (@MatRollinger) June 2, 2021
Deschamps : « Je trouve que le penalty est bien tiré »
Cette nuit, quand Karim a retrouvé sa chambre, plus aucun Niçois n’était là pour lui rappeler sa scoumoune devant les cages. Le couvre-feu y était peut-être pour quelque chose, mais surtout parce que personne ne pourra lui reprocher quoi que ce soit. Dans ce stade, il avait brillé d’un doublé contre l’Arménie lors de sa désormais avant-dernière en sélection. Cinq ans et demi plus tard, la boucle ne sera pas complètement bouclée, mais qu’importe : l’ancien Lyonnais a apporté sa pierre à l’édifice d’une équipe déjà bien bâtie. Pour Didier Deschamps, l’apport de Karim Benzema « ne change pas grand-chose » à ce que les autres joueurs faisaient auparavant. Il y a du vrai : Kylian Mbappé a bouffé les grands espaces, Antoine Griezmann s’est régalé entre les lignes et tous les deux ont marqué dans un style plutôt caractéristique. KB19, lui, s’est occupé du reste. Dézonant par moments, permutant constamment, aucun dribble superflu n’a été à signaler. Et c’est le menton levé que le goleadormadrilène a su combiner avec les autres, avec un naturel assez déconcertant.
« Karim a fait de très bonnes choses dans son registre. Il a été malheureux, bien que très bon, évaluait Didier Deschamps en conférence de presse. Ne serait-ce que sur le penalty, je trouve qu’il est bien tiré, après, il a eu d’autres situations. Pour un attaquant, marquer c’est concrétiser (sic). Ça n’a pas été le cas ce soir. Mais forcément avec sa palette élargie, ça permet à l’équipe d’avoir une maîtrise et de la complémentarité. » L’intéressé est lui-même bien conscient de l’état du chantier : « On aura le temps de peaufiner, on a fait un très beau match et on a tenté, c’est le plus important. » Ce qui compte également ce jeudi matin, c’est que les controverses autour de ses rapports avec Deschamps, de ses bisbilles avec Olivier Giroud (ils partageraient par ailleurs la même table à la cantine, si vous voulez tout savoir) ou l’avis des polémistes sont aujourd’hui à peine audibles. Il est plus doux de se demander quand Karim Benzema retrouvera le chemin des filets, que de désespérer le revoir sur le chemin de Clairefontaine. On sait que ce n’est plus qu’une question de temps. Et ça tombe bien, celui-ci n’a pas d’emprise sur Karim Benzema.
Par Mathieu Rollinger, à Nice
Tous propos recueillis par MR, sauf ceux de Benzema.