- Premier League
Chamakh, la dernière cartouche d’Arsenal
Selon Le Times et Canal +, l'attaquant des Girondins de Bordeaux aurait conclu un accord avec Arsenal, comme une consécration tardive. Retour sur un joueur longtemps sous-estimé.
Franchement, on aurait dû se douter. Alors que son équipe venait de se faire déniaiser par Manchester United (1-3), Arsène avait retrouvé son petit sourire vorace à la simple vocation de Marouane Chamakh et de l’éventualité d’un transfert à Arsenal. « Dans la vie, il faut réaliser ses rêves » , avait-il glissé l’œil gourmand. Alors aujourd’hui, le manager des Gunners a beau tenter de démentir l’annonce par The Times et Canal + de l’engagement du Bordelais, personne n’est dupe. D’ailleurs, c’est avec une mine dépitée que Rafael Benitez a reconnu que l’hypothèse Chamakh à Liverpool était définitivement terminée. Oui, l’été prochain, l’attaquant girondin réalisera lui aussi son rêve, jouer en Premier League. C’est donc quasi officiel : ce bon Marouane, 26 ans, toujours prêt à partir sans jamais parvenir à foutre le camp de Bordeaux, ne sera pas un Sidney Govou bis, autre champion national des vrais-faux départs.
Lyon, l’occase manquée
Pourtant, à bien regarder la trajectoire du gamin de Tonneins (Lot-et-Garonne), on n’aurait pas forcément misé notre baraque sur sa capacité à évoluer dans un club du standing d’Arsenal. Ou plus précisément, on ne pariait plus dessus. La faute à l’inflexibilité de Bordeaux quand le jeune homme, en 2006, s’est trouvé ciblé par l’Olympique Lyonnais alors au sommet de son épopée hexagonale. Une offre à l’époque très consistante de 12 millions qui avait fait jaser tant le refus de Jean-Louis Triaud était apparu incongru. Car, bien que prometteur, Chamakh n’était jamais plus qu’un attaquant bien incapable de dépasser la barre des dix buts par saison. Fragilisé par cette opportunité manquée, l’international marocain avait passé quasiment deux saisons à déprimer (9 petits pions en tout) avant de renaître l’an dernier.
Oui, on se dit alors que primo, Bordeaux avait laissé une belle occasion de faire un bon deal ; secundo, Chamakh ne s’en remettrait jamais ; tertio, on l’avait peut-être vu un peu trop beau le petit. Ce sentiment d’avoir affaire à une espèce de Tanguy girondin était renforcé par le fait qu’après le titre de la saison dernière, Chamakh avait clamé haut et fort que son avenir n’était plus en Gironde avant d’entamer une drôle de sarabande entre velléité de départ et attachement viscéral à ses couleurs de toujours pour finalement rester à la maison. Govou n’aurait pas fait mieux.
Bon partout, excellent nulle part
Mais au vrai, ce cafouillage de l’intersaison dit beaucoup de la cote de Chamakh, pas nécessairement aussi élevée que sa saison passée pourrait le laisser penser. Car si l’opération « Je me casse enfin du Haillan » a foiré, c’est aussi à cause de son faible pouvoir d’attraction, seuls Sunderland ou West Ham s’étant montrés prêts à s’aligner sur l’appétit bordelais. Il est vrai qu’Arsenal aussi était sur le coup mais à prix cassé, une spécialité d’Arsène Wenger trop conscient de la situation contractuelle du joueur (alors une seule année de contrat restante) et de la valeur intrinsèque du Lion de l’Atlas certes respectable mais pas phénoménale non plus. Car faire le pari Chamakh revient à quoi au juste ? Solide gaillard sans être surpuissant, à l’aise balle au pied sans être virtuose, adroit devant le but sans être clinique. Traduire : bon dans tous les secteurs, excellent nulle part. Et du coup, on se demande : mais pourquoi diable Wenger s’est-il fait chier avec un dossier aussi quelconque ?
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Est-il fait pour Arsenal ?
Déjà, atout non négligeable, Chamakh, qui sera en fin de contrat en juin, est libre de droits. Idéal pour un pingre comme le manager alsacien, d’autant que question salaire, il se murmure que le Marocain n’aurait pas mis le club londonien sur la paille (on parle de 70 000€ par semaine, une somme rondelette, mais très loin des stars de Premier League). Ensuite, le Bordelais peut apporter devant l’impact physique qui fait tant défaut à l’attaque taille small d’Arsenal trahie par l’inutilité de Bendtner entre blessures et nullité. Enfin, un profil bas hexagonal, ça Wenger adore aussi, comme une garantie de bonne intégration dans un vestiaire très francophone et dépourvu de grandes vedettes. Un mariage parfait en somme ?
L’histoire pourrait se révéler un poil plus complexe. En effet, du strict point de vue de sa valeur, Chamakh est très loin de monstres comme Drogba, Rooney ou Torres, ceux-là même, on en a encore eu la preuve récemment, qui font si cruellement défaut à Arsenal. Et puis sur le plan tactique, Arsenal est une équipe bien différente, dans sa culture même de jeu, de Bordeaux. Les Gunners procèdent quasi exclusivement par relais courts, rapides et au sol quand les Girondins n’hésitent pas à multiplier les centres vers ce combattant aérien de haute volée qu’est Chamakh. Oui, on le voit, le doute est permis sur l’exploitation optimale par Arsenal d’un joueur profilé comme le Franco-Marocain qui peut toutefois ressortir les bouquins de la saga Wenger : l’Alsacien n’a pas son pareil pour transformer les attaquants estampillés L1 (Anelka, Henry, Adebayor) en armes absolues de classe mondiale. Au vrai, et si c’était Chamakh qui avait fait la bonne affaire ?
Après tout, sous des dehors faussement bêta, l’ami Marouane a manœuvré comme un pro pour avoir les mains totalement libres en fin de saison et ainsi augmenté ses chances d’aller dans un club prestigieux. Pas un hasard si ce gars figure sur une liste électorale (celle du Modem en l’occurrence) en vue des régionales. On pensait n’avoir affaire qu’à un combattant, on découvre un renard. Chamakh, attaquant complet par excellence.
Dave Appadoo
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