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Toulouse, un moment Capitole

Par Benjamin Laguerre, à Toulouse

Le peuple violet était en transhumance ce week-end. La montée vers la capitale était empreinte d’un engouement inédit lié à la découverte d’une finale de Coupe de France inespérée. La descente vers le Capitole au coup de sifflet final a été synonyme d’une fierté et d’une dignité enfin retrouvées à Toulouse.

Toulouse, un moment Capitole

Ils étaient plus de 25 000 au Stade de France à Saint-Denis, et presque 20 000 au Capitole samedi et dimanche, lieu symbolique des célébrations toulousaines, plutôt habitué au rouge et noir du Stade toulousain. Des chiffres inédits et inimaginables pour un club qui était au bord du gouffre il y a encore peu de temps. Pour les supporters du club, la nuit a été courte, mais magique, car tous ont le sentiment d’avoir vécu un moment historique dans l’histoire du TFC. Avant la finale, dans les gares de France, entre Matabiau et Montparnasse, sur les aires d’autoroute, entre Montauban et Orléans, ou entre les aéroports de Blagnac et d’Orly, on a pu croiser des milliers de maillots violets à la recherche de leur première consécration et de reconnaissance. Les mots échangés entre inconnus sur ce moment trop longtemps espéré avaient comme point commun une couleur, un accent, l’amour d’un club et l’espoir de placer enfin le TFC sur la carte du football hexagonal. Avec cette victoire en Coupe de France, c’est chose faite.

Leur jour de gloire

Ce dimanche, deux heures avant l’arrivée des héros dans la salle des Illustres du Capitole et au balcon pour la présentation du trophée, la foule est déjà dense et il est difficile d’accéder à la place du Capitole. Sous les arcades qui font face à la place, lieu de fondation du club en 1937, les allées et venues des supporters se font en rangs très serrés, alors que la pluie s’annonce. Depuis les rues adjacentes, tout ce beau monde en blanc et violet se prépare à recevoir la « Vieille Dame » comme il se doit, car c’est une première ici. En 1957, pour la seule et unique victoire toulousaine en coupe, une simple réception avait été « demandée » expressément par le club à la mairie, « sinon rien n’aurait été fait pour célébrer notre victoire » rappelle le gardien moustachu de l’époque Guy Roussel. Mais en ce dimanche après-midi, l’attente est synonyme de prolongement de l’extase de la veille.

On est allés à Épinal, à Wasquehal en National… On a souffert… Et maintenant, on est sur le toit de la France, c’est un rêve qui se réalise pour nous tous ici à Toulouse ! C’est notre apothéose footballistique.

Jérôme, sur son nuage

Les adjectifs « rêvée » et « parfaite » reviennent dans plusieurs bouches pour qualifier cette finale. « C’était quand même presque irrationnel ce début de match, comme l’a dit le président Comolli hier soir à la radio », explique Jérôme, abonné depuis plus d’un quart de siècle et présent la veille au Stade de France. Il enchaîne : « Il y a un an jour pour jour on jouait contre Niort… Franchement, c’est inimaginable, ce que l’on vit ! On a tellement mangé notre pain noir pendant des saisons que maintenant, on a du mal à réaliser qu’on a gagné la Coupe de France ! On est allés à Épinal, à Wasquehal en National… On a souffert… Et maintenant, on est sur le toit de la France, c’est un rêve qui se réalise pour nous tous ici à Toulouse ! C’est notre apothéose footballistique. »

Familles, fumigènes et Se canto

Cette communion, ce moment d’histoire pour tous les amoureux de ballon rond de la ville rose, beaucoup sont venus les vivre en famille. Ausias, la quarantaine passée, est venu accompagné de ses deux enfants, Pablo et Amaya, en tenues officielles du club. « On a commencé à être assidus au stade quand les résultats en Ligue 2 étaient bons, avec surtout du beau jeu dès la première saison. Il y a eu une vraie communication du TFC vers les clubs amateurs de la région depuis la reprise du club il y a 3 ans. L’an dernier par exemple, les enfants ont pu faire un tournoi sur les terrains annexes et sur le terrain du Stadium ! Pour eux, c’est extraordinaire de vivre ça, de visiter les vestiaires et c’est une façon de créer un lien direct avec le club, raconte-t-il. Dans la foulée, on a pris nos abonnements au TFC via le club de mon fils pour un super prix, une centaine d’euros chacun. Et puis autour du match, tout est bien fait maintenant, c’est une véritable expérience familiale quand on y va. »

Le fiston, licencié au club de l’Entente Verfeil Castelmaurou, acquiesce : « Moi, ce que j’aime au TFC, c’est l’ambiance au stade, et puis le jeu aussi ! Je suis fier de notre club parce que ça représente ma ville, ma région, et aujourd’hui, on est présents pour montrer notre fierté d’avoir gagné ! » Sentiment d’appartenance à une région confirmé par les nombreux drapeaux à la croix occitane dans la foule, ou encore au moment où le chant occitan Se canto est entonné a cappella par l’ancien joueur de rugby du Stade toulousain Omar Hasan et repris en chœur par la foule. Quelques minutes plus tard, les joueurs descendent du bus, le capitaine Brecht Dejaegere en tête avec la coupe à la main, suivi des autres vainqueurs, portables à la main pour la plupart, quand le double buteur de la veille, Logan Costa, s’amuse à craquer un fumigène devant un public aux anges.

« On entre dans la catégorie des gagnants  »

Un sentiment nouveau pour des Toulousains qui n’avaient jamais connu une telle passion autour du club. En effet, depuis la reprise du club en 2020 par le fonds d’investissement américain Redbird, le scepticisme initial a vite disparu grâce au projet proposé par le président Comolli et mis en place par le coach Montanier sur le terrain depuis deux ans. En parallèle, dans les tribunes, le changement saute aux yeux, et le Stadium ne sonne plus creux. À Toulouse, il y a toujours eu un amour du foot, mais pas vraiment une culture du « supporterisme ». Les meilleures saisons, il y avait environ 8000 abonnés, à l’époque Elmander, mais cette année, ils sont plus de 13 000, avec une moyenne de 23 000 supporters à domicile.  « Debout. Toujours. » Le slogan du club présent sur le bus violet, arrivé vers 18h30, prend tout son sens pour la foule patiente et passionnée qui voit enfin le soleil percer les nuages. Reçus par le maire Jean-Luc Moudenc et Laurence Arribagé, adjointe en charge des sports, mais aussi femme de l’ancien capitaine et entraîneur du club Dominique Arribagé, les joueurs n’ont peut-être pas encore totalement conscience d’avoir marqué l’histoire du club. Contrairement à leur président, ému lors de son discours. Tout comme Younès dans la première rangée contre les grilles face au balcon : « On rentre dans une autre catégorie depuis hier soir : celle des gagnants ! L’an dernier, nous étions là pour le titre de Ligue 2, même si un peu moins nombreux quand même. Aujourd’hui, c’est différent : c’est la coupe de France au Capitole ! Ta vie de supporter change avec cette victoire, tu es reconnu avec ce titre aux yeux de toute la France ! »  

Pour le TFC, le 29 avril 2023, c’est votre Naples à vous, et à nous tous : c’est notre Coupe de France !

Michel Fraysse, auteur du roman Ferveur violette

En effet, les références historiques étaient très, trop, lointaines dans les mémoires toulousaines. Michel Fraysse, auteur du roman Ferveur violette sur l’histoire d’un jeune Toulousain accro au TFC, présent lui aussi à Saint-Denis et sur la route du retour ce dimanche, voit dans cette finale un bouleversement qui s’inscrit dans la légende du club : « Hier soir, j’étais très heureux de pouvoir dire à ces jeunes autour de moi : “Ce soir, c’est votre Naples ! Et c’est même encore plus beau que Naples. Pour le TFC, le 29 avril 2023 c’est votre Naples à vous, et à nous tous : c’est notre Coupe de France !” Monter à Paris, être sous le tifo des Indians au Stade de France, c’est une émotion très forte… Cette bâche qui se déploie comme la grand-voile d’un immense vaisseau en route pour la victoire. On ne sait pas ce qui est dessiné dessus, mais on entend le Stade qui vibre… Merci aux Indians pour ce tifo et à tous les supporters toulousains pour cette ferveur. »

Dans le même ordre d’idées, le grand Olivier, maillot des 80 ans du club sur les épaules et suiveur averti des Violets malgré ses pérégrinations à travers le monde, pense que pour les Toulousains, ce sacre marquera un changement profond : « En voyant les Violets soulever le trophée, je me suis dit que la performance allait bien au-delà de l’obtention d’un titre, aussi prestigieux soit-il. Le Téfécé a surtout semé les graines d’une relation affective sur le long terme avec une partie des enfants et adolescents que j’ai vus en tribune. Ces moments sont fondateurs dans une vie de supporter. Il manquait ce lien émotionnel originel avec le club, cette grande épopée à laquelle on peut tous se rattacher. Beaucoup s’en souviendront probablement dans dix ou vingt ans, en période de vaches maigres, lorsqu’il s’agira de traverser les orages. Pour nous, plus anciens, c’est une autre forme de plaisir : un (juste ?) retour des choses après de longues – très longues – années d’attente et de désillusions. Presque une récompense. »

L’héritage du passé, la joie du présent

Les anciens, justement, c’est aussi pour eux que certains sont là aujourd’hui place du Capitole et étaient présents la veille pour la finale. Dans la salle des illustres du Capitole, Damien, un amoureux du club qui a eu l’honneur de toucher cette coupe, nous confie que pour lui, ce week-end, « c’était un peu comme un pèlerinage. Un hommage à nos grands-pères ou nos pères qui nous parlaient de la victoire en Coupe, à Colombes en 1957, ou du match de la montée en D1, en 1982 à Saint-Dié… Des moments fondateurs trop rares dans notre histoire. Ce sont eux qui nous ont transmis le virus du Tef, ce sang violet que l’on a dans les veines. Alors cette semaine, j’irai au cimetière pour voir mon grand-père et lui raconter notre victoire de ce samedi. On a enfin notre date historique : le 29 avril 2023 ! Et maintenant, nous aussi, on va enfin pouvoir transmettre à nos enfants une partie de l’histoire du Tef ! »    

Cette semaine, j’irai au cimetière pour voir mon grand-père et lui raconter notre victoire de ce samedi. On a enfin notre date historique : le 29 avril 2023 ! Et maintenant, nous aussi, on va enfin pouvoir transmettre à nos enfants une partie de l’histoire du Tef !

Damien, un amoureux du TFC

Face à la trop forte affluence, nombreux sont ceux qui sont restés bloqués à quelques mètres de la place du Capitole et n’ont pas pu voir les nouveaux héros toulousains, notamment Branco van den Boomen, plébiscité à l’applaudimètre. Déçus, mais prêts à revenir mardi soir face à Lens pour un nouveau moment de communion, quand le Stadium fera le plein pour voir la présentation de la Coupe de France. Contrairement à celle de 1957, celle-ci ne risque pas d’être perdue tellement elle était attendue. En s’éloignant du Capitole à la nuit tombante, Alain et Fabienne, un couple de retraités, se dirige vers la place Jeanne d’Arc, à quelques pas de la boutique du club. « On a suivi ça de loin, mais en tant que toulousains, ça nous touche quand même, commentent-ils. Nos enfants qui n’habitent pas Toulouse nous ont dit que c’était vraiment inattendu de gagner cette coupe et nous ont demandé les tee-shirts spéciaux faits par le club. » Et d’ajouter : « Chez nous dans le jardin, on a une belle glycine violette (plante grimpante que l’on retrouve dans de nombreuses maisons toulousaines, NDLR). On pensait qu’elle était morte, mais cette année elle est repartie de plus belle et a fleuri comme jamais ! On y voit un joli clin d’œil au club de la ville avec cette victoire, tellement belle elle aussi. » Personne aujourd’hui à Toulouse ne pense qu’il faudra attendre à nouveau 66 ans, et sauter des générations de supporters, pour voir refleurir à nouveau le drapeau violet au balcon du Capitole.

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Par Benjamin Laguerre, à Toulouse

Tous propos recueillis par BL

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