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Révolution culturelle à Bilbao
A l'heure où le débat sur l'identité fait rage en France, l'Espagne s'est également mise au diapason via le football. Et si le Barça est actuellement en plein délire indépendantiste, l'Athletic Bilbao entame de son côté une rupture tranquille avec ses traditions, en intégrant à son effectif le premier joueur noir de sa longue et conservatrice histoire.
Depuis quelques semaines déjà, le ton du président du Barça s’est radicalisé de manière presque inquiétante. Arrivé en fin de mandat à la tête du club, le président blaugrana se verrait bien devenir un jour le “Braveheart” d’une possible indépendance catalane. Dosé par la domination sans partage de sa Dream Team en Liga et en Europe, Joan Laporta n’essaie même plus de faire la différence entre les performances de son club et son combat politique aux desseins indépendantistes. Le Barça, comme l’avait écrit un jour Montalban, est plus que jamais devenu « l’armée d’un peuple sans nation » . Malgré l’Unicef, et son image de chevalier blanc du football, le FC Barcelone commence sérieusement à irriter ses socios à ascendance non catalane. A force de radicaliser son discours, l’un des clubs les plus universels du monde est paradoxalement en train “d’exclure” la majorité de ses aficionados (les Espagnols des autres régions du pays et les étrangers) : un comble. Dernièrement, l’énervant Laporta s’est fait reprendre de volée à ce sujet par un socio andalou, lors du déplacement à Xerez : « Laporta, je suis plus Blaugrana que toi malgré que je ne sois pas catalan. Arrête de nous ignorer et respecte nous ! » . Le “FC Barcelogne” étant principalement diffusé par la chaîne catalane TV3, des millions de téléspectateurs espagnols se retrouvent privés du spectacle livré par l’équipe de Pep pour des questions indépendantistes qui ne les concernent pas. Faut-il être catalan pour supporter le Barça ? Peut-être que oui désormais.
Par ailleurs, pendant longtemps, l’Athletic Bilbao a fait office de “Mes que un club” à la sauce basque. Ses penchants clairement nationalistes affichés sur le terrain par un onze historiquement et exclusivement composé de joueurs locaux en ont fait une équipe à part dans la Liga. Le poids de la tradition, l’amour du maillot et l’identité marquée ont autant forcé le respect que l’indignation de ses adversaires. Désormais, l’Athletic apprend doucement à vivre avec son temps. Les détracteurs des Leones, qui les considéraient comme une équipe limite “raciste” de par leur singularité, peuvent désormais chercher d’autres arguments à opposer aux Rojiblancos. Du haut de ses 16 ans et de son mètre quatre-vingts, Jonas Ramalho a fait basculer son club formateur dans le XXIème siècle. Défenseur de métier, l’adolescent est le plus jeune joueur à avoir débuté sous les couleurs de l’Athletic (à 14 ans lors d’un match amical contre le club d’Amorebetia). Une sacrée prouesse pour un métis né d’un père angolais et d’une mère basque…
« L’Obama basque du football » comme le surnomme déjà la presse espagnole n’a pas encore débuté chez les pros mais ce n’est plus qu’une question de temps. Son entraîneur Caparros -accessoirement le meilleur formateur d’Espagne (il a lancé feu Puerta, Navas, Daniel Alves, Reyes, etc…)- l’a déjà inscrit pour l’Europa League et compte sérieusement sur lui en Liga. « C’est un joueur avec une très bonne relance, à l’aise techniquement et incroyable dans les duels. Et il est noir. Ça pose un problème à quelqu’un ? » . A vrai dire, ça ne pose plus vraiment de problème, du moins à l’Athletic. En effet, ces dernières années, la plupart des jeunes lancés dans le grand bain par les Leones n’étaient pas vraiment 100% basques. Fernando Llorente, Muniain, Gorka (en provenance de l’Espanyol), Gurpegui, Toquero et Javi Martinez sont tous navarrais, une région limitrophe du Pays Basque mais qui ne fait pas partie de l’Euskadi. Le talentueux Amorebieta, né d’une mère vénézuelienne et d’un père basque, faisait partie de cette mini révolution culturelle avant l’arrivée de Jonas Ramalho dans l’effectif pro. Et malgré quelques entorses à l’identité basque, l’Athletic Bilbao n’a jamais compté autant de socios à travers le monde de toute son histoire. La preuve que l’on peut faire une crise d’identité sereinement tout en continuant à interdire à la sélection espagnole d’entrer à San Mames. Sans emmerder personne… N’est-ce pas Laporta ?
Vidéo du supporter du Barça andalou qui tance Laporta :
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