- 2010
- Barrage France/Eire (1-1)
On était au SdF pour France-Eire
16 ans et un jour après France–Bulgarie, les Bleus jouaient leur qualification pour le Mondial. Cette fois-ci au Stade de France et loin du cimetière indien du Parc de Princes. Jouer dans un stade de merde : la voilà la solution pour que les Bleus aient de la moule !
« Finir le travail » , « Le plus dur est fait » , « L’Arnaque Trappatoni » . C’est ce qu’on pouvait lire dans la presse avant France-Irlande. Avec le très bon résultat du match aller, le retour du SdF s’annonçait comme un amical pour célébrer la Saint-Patrick. D’ailleurs, 60 euros pour un match pareil, ça faisait limite mal au cul.
Les Irlandais allaient manger cher, eux-mêmes en étaient convaincus. Dans les bistrots de Gare du Nord, les rouquins éclusent les pintes devant Algérie-Égypte. Les pronostics vont bon train, 2-1, 1-1, 8-3, toujours pour la France. Personne n’ose vraiment croire à un exploit. Faut dire que pour l’Irlande, la lose, c’est dans les gènes. A la Coupe de Monde 1990 d’abord, où l’Italie de Toto Squillaci réalise un honteux hold-up. Puis au Mondial asiatique de 2002 quand l’Espagne s’impose avec chance en ¼ de finale.
Pour conjurer le mauvais sort, les Giovanni Boyz prient autour de leurs Guiness. Le chant “Stand up for the boys in green” fait office de cantique. Sur la mélodie de “Go West” de Village People. Par fraternité verte sans doute, les paroles deviennent “Stand up for the Algerians” quand Yahia ouvre le score pour les Fennecs. Puis plus tard “You can stick your fucking pyramids up in your ass” en l’honneur des Égyptiens.
Tout ce beau monde a rendez-vous au Stade de France. Les gros tatoués “made in Limerick” et les lads avec leurs coupes en brosse défilent avec les footix entre les immeubles de Xerox, GDF Suez, Pathé, BNP Paribas de la Plaine Saint-Denis. Le Stade de France ressemble à un centre commercial. Les Irlandais chantent pendant que les supporters bleus contemplent. Les Français vont au match comme on va à l’UGC. Ça chambre : « Henry, Henry, Henry is a laught » . Rira bien qui rira le dernier.
Dans le stade, le speaker annonce les prénoms et le public scande les noms. Ça se paluche sur Lloris et Gignac. La France d’en bas a trouvé ses héros. Pour Momo Sissoko et Loic Rémy, y a franchement moins de monde. Les joueurs entrent sur du Alan Parson Project. Des personnages bleu-blanc-rouge en ballons saucisses sont érigés autour de la pelouse, dans la lignée des géants de 98. Dernière annonce avant le coup d’envoi : « Les petits porteurs de bâche sont sponsorisés par le Crédit Agricole d’Ile et Vilaine » . Kick Off : l’humiliation peut enfin commencer.
Sur le terrain, c’est la catastrophe. Les Verts n’en croient pas leur yeux. Tellement ahuris de voir le PSG jouer au Stade de France qu’ils en oublient presque de chanter. Côté français, la frustration entraîne une rébellion de public qui donne dans un classique « Allez les Bleus » . Cette fois-ci, ils ne sont pas 30 000, les Irlandais Titi ! Mais les Bleus n’ont même pas été à la hauteur du public du SdF, c’est dire. Robbie Keane refroidit tout le monde avec son goal et l’Irlande est en route pour l’exploit. La pause est sifflée, le public français conspue ses joueurs.
Le show de mi-temps est assuré par le quatuor PPDA, Richard Virenque, Patrice Carmouze, Teddy Rinert qui nous infligent une fausse séance de tirs au but. Du rêve en boite. Virenque met une mine. Rinert tire à côté. Trop d’alcool en présidentielles. 24 000 euros sont récoltés « pour aider les enfants qui ont des problèmes de cœur en Afrique » . Les joueurs français, eux, toucheront chacun 150 000 euros pour leur qualification au Mondial. A vomir.
Le match repart après une pub pour France Telecom, histoire de nous remonter le moral. Sur la pelouse, rien n’a changé. Gourcuff continue son festival du mois de novembre entre panenka ratée et ailes de pigeon douteuses. Les Diarra’s manquent tout. Ça sent vraiment mauvais. Et si on assistait au dernier match en bleu de Thierry Henry ? Sur l’écran géant aussi, Trappatoni la met profond à Raymond. 12 apparitions à 2 pour l’Italien. Aurait-on peur des sifflets du côté de la régie du Stade de France ? Le speaker, lui, a tout compris : il réclame une Ola. Govou, bouc-émissaire de l’année 2006, rentre sous les ovations. Gignac est sifflé, deux mois seulement après avoir connu la gloire. Même affront pour l’ex-idole Gourcuff. La fin du temps règlementaire est sifflée. Muse envahit la sono. Richard Virenque ne revient pas pour régaler la chique.
En prolongation, les supporters français troquent « Allez les Bleus » pour « Arbitre enculé » . A cause du penalty (?) sur Anelka et du but hors-jeu de Govou. La troisième ruse sera la bonne. L’arbitre craque devant la pression populaire. Moment de flottement puis but. « Et ils sont où, et ils sont où les Irlandais » devient l’hymne du deuxième overtime. Dégueulasse. Les Irlandais chantent de désespoir dans les utiles minutes de la rencontre. Et couvrent quand même la joie des Froggies avec leurs mugissements.
C’est enfin fini. Le speaker remercie « le corps arbitral » dans une dernière sortie, puis balance du David Guetta pour fêter la qualification. Un équipe de mauvais goût, pour de la musique de merde. C’était ça France–Irlande au Stade de France.
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