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On était à Hajduk Split – Dinamo Zagreb

par Loïc Tregoures
On était à Hajduk Split – Dinamo Zagreb

1414 jours, soit trois ans et onze mois que le Hajduk Split n'a plus battu le Dinamo Zagreb à domicile en championnat. La dernière fois que ça s'est produit, Lovren avait marqué contre son camp, Mevlüt Erding était la recrue star du PSG, et Thierry Henry n'avait pas encore mis la main. Une autre époque.

Le dernier titre de champion remonte même à 2005. Un titre gag fêté sous les sifflets de la Torcida, qui a vu la magouille arriver de très loin : lors du dernier match, Hajduk assure le titre grâce à une victoire 6-0 contre Varteks, entraîné par Miroslav Blažević, toujours dans les bons coups. Comme la vie est bien faite, Ciro est aussitôt nommé entraîneur du Hajduk pour la saison suivante, avec qui il prendra un 8-0 sur deux matchs contre les Hongrois de Debrecen avant de vite prendre la porte. Depuis, le Dinamo fait la loi en championnat, laissant une coupe traîner de temps en temps. Supériorité sportive ? Pas seulement. La ville de Zagreb finance généreusement le club, qui est public. En le stabilisant, elle lui permet de ne pas brader ses joueurs et d’enclencher un cercle vertueux. Le boss du Dinamo et de tout le football croate, Zdravko Mamić, peut donc s’enrichir tranquille en vendant à prix d’or des joueurs obligatoirement sous contrat avec l’agence de son fils, et dont les cotes augmentent grâce à des sélections en équipe nationale parfois sportivement suspectes.

Pendant ce temps-là, Hajduk vend un quart de finale de Ligue des champions en… 1995. Longtemps public aussi, le club a servi de tremplin, de passe-temps ou de tirelire à la faune politique locale qui a laissé une dette colossale au club, dans l’obligation d’être privatisé, en transformant les dettes en actions. La mairie de Split s’est retrouvée proprio de 56% d’un club en forme de patate chaude qui ne génère que des dettes. À l’époque, les supporters avaient créé une association, Dite Puka (l’enfant du peuple), pour mobiliser les amoureux du club et le racheter à terme. Bon, le plan a foiré, mais l’influence des supporters se fait toujours sentir. Pour faire simple, ce sont eux qui élisent désormais le conseil de surveillance, qui nomme à son tour la direction, apolitique, du club. Avec cette nouvelle gestion, la dette a été réduite d’un tiers en deux saisons, malgré le zéro pointé au rayon vente de joueurs cet été. L’année dernière, le conseil municipal a pourtant refusé de garantir un prêt bancaire indispensable à la survie du club. Une heure plus tard, et malgré une pluie battante, environ deux mille Torcida étaient sous les fenêtres du maire, empêchant tout le monde de sortir. Dans sa sagesse, le conseil a organisé un nouveau vote, positif, qui accorde un sursis au club en attendant un miraculeux acheteur qui s’est présenté cet été sous la forme d’un joueur de foot US, Ndamukong Suh, subitement tombé amoureux du club et de la ville.

Une bière brassée par l’Hajduk

La mairie pousse pour la vente, les supporters jugent que l’offre est bidon et qu’il n’est pas question de brader cent ans d’histoire, un morceau du patrimoine dalmate à des types qui n’ont même pas de business plan en dehors de faire venir Beyoncé en concert au stade, de développer le marketing sur un marché croate inexistant, et de faire des tournées aux États-Unis au moment des tours préliminaires de Coupe d’Europe. Vu le tableau sportif et financier, mieux valait faire vœu de victoire en touchant l’orteil de la statue de Grgur Ninski, à l’entrée du centre historique, ça porte bonheur et ça, au moins, c’est gratuit. Un peu plus loin, l’ancien stade du club, reconverti en terrain de rugby, et les cafés du coin, lieu de ralliement avant le cortège. On boit de l’Hajdučko, une bière spécifique qui rapporte au club 1 kuna la bière (7,5 kunas = 1 euro). Le Dalmate est grand, massif et tatoué, il sait même écrire Hajduk en alphabet glagolitique. Il y a aussi quelques spécimens féminins. Apparemment, le type qui a dessiné les Belgradoises s’est servi du même moule avec succès.

On remonte Zrinsko-Frankoposta vers le stade Poljud. Derrière, la mer, un peu plus loin en contrebas, l’immense parc Marjan, où l’on peut rêver secrètement de croiser Blanka Vlasić faire son jogging. Aux abords du stade, la foule grossit, la présence policière est relativement légère. Des personnes âgées ramassent bouteilles et canettes vides pour revendre plastique, verre et ferraille. Deux vieilles dames édentées se disputent un cadavre d’Hajdučko, et finissent même par se mettre dessus à coups de bouteilles, le vrai visage du hooliganisme. Direction la tribune nord, celle de la Torcida. Tiens, une nouvelle caméra de surveillance juste en face. De l’autre côté, les Bad Blue Boys du Dinamo ont rempli le parcage malgré les pressions du club et de la police, qui font pleuvoir les listes noires et les interdictions de stade.

Halilović se la raconte

Les joueurs locaux entrent avec une banderole, très applaudie, « Vukovar croate » , réponse à la provocation des supporters serbes de la semaine dernière. Première chorégraphie avec l’emblème du club, les mecs aux tambours commencent à donner le rythme. C’est sûrement eux qui ont le plus mouillé le maillot en première mi-temps, très pauvre en occasions, juste le temps de voir l’intéressant Giorgi Iluridze, un milieu de terrain géorgien de 21 ans qui a gagné son transfert à Poljud en éliminant le Hajduk cet été avec son club de Dila Gori. À la reprise, ça s’anime un peu. Corner, l’Ivoirien Kouassi bute sur le gardien, et Pašalić (18 ans, retenez bien ce nom) reprend de façon acrobatique. But et craquage total de fumigènes et pétards. Tant pis pour les cendres, on lavera le polo en rentrant. Entre-temps, on découvre une bâche qui représente le sélectionneur Igor Štimac, ancienne légende du club, mais perçu comme vendu à la fédé, s’adonnant avec volupté à la pratique du sexe oral sur un Zdravko Mamić enjoué. Ah, si D’Hallavillée voyait ça.

Tiens, entrée en jeu du petit prodige Alen Halilović. On lui a tellement dit que c’était un crack que ça lui est un peu monté au cerveau, et à celui de son père. Il ressemble à un gosse au milieu d’adultes, mais sa technique et sa prise de balle sont déjà au-dessus. Le gamin a même les tripes d’aller tirer un corner alors que la tribune lui balance tout ce qu’elle peut. Sauf que le gamin en or du jour, c’est Pašalić, qui claque un gros coup de boule sur corner pour le doublé. Re-craquage… des deux côtés. Les fumis des Bad Blue Boys atterrissent sur la pelouse. Même pas peur pour les pompiers qui y vont, rien à foutre pour l’arbitre qui laisse le jeu se poursuivre. Après un dernier spectacle de drapeaux, le capo demande le silence, donne un ordre, puis tout le monde se fout à poils et fait tourner les T-shirts. Prends ça, Patrick Sébastien.

Fin du match, les joueurs viennent remercier, personne n’a envie de partir, on fait attention aux sièges du premier rang qui brûlent depuis une demi-heure, et on finit par remballer. Dehors, il y a ceux qui restent aux abords du stade, ceux vont faire le tour de la ville en klaxonnant, et ceux qui se dirigent vers le centre sur la Riva, face à la mer. Dans la vieille ville, devant le très chic restaurant Luxor, un type donne un concert guitare-voix aux touristes. Deux atmosphères différentes, deux mondes parallèles. Les visiteurs profitent encore un peu du cœur de Split. Son cœur, oui, mais son âme, elle est au Nord.

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