- C1
- J7
- PSG-Manchester City (4-2)
Au PSG, une équipe est peut-être née
Au terme d’une soirée qui a peut-être changé son destin, le Paris Saint-Germain a montré des vertus qu’on lui pensait interdites, sous la houlette d’un entraîneur qui a remporté son plus beau succès dans la capitale et devant un public transcendé. Suffisant pour vraiment rêver plus grand ?

Déclic : Ce qui provoque une réaction intellectuelle, psychologique ; moment où elle se fait. Il est environ 22h10 ce mercredi soir porte d’Auteuil quand le Parc des Princes se gratte la tête le temps de quelques instants. Sa saison européenne ne tient plus qu’à un fil, alors que le Manchester City de Pep Guardiola vient de doubler froidement la mise et de mettre Paris à genoux en même pas cinq minutes. Mais il y a dans l’air mouillé d’un soir de Ligue des champions un parfum différent, et le PSG semble étrangement serein. Quelques assauts et moins de dix minutes plus tard, tout a changé, Paris y a cru, et City s’est tu. Avec un succès probant et une très probable qualification pour les barrages de Ligue des champions, qui ne dépend plus que de lui-même, le PSG a probablement fait basculer sa saison dans le bon sens contre le champion d’Europe 2023. À lui de confirmer, maintenant.
Luis Enrique délivré et libéré
Il avait prouvé qu’il pouvait renverser quelques montagnes l’an dernier, en allant chercher une qualification sur la pelouse du Barça, mais rarement Luis Enrique n’aura aussi bien réussi à faire de ce PSG sa machine tant attendue. Son soulagement au coup de sifflet final, accompagné d’une joie partagée avec ses adjoints, dont certains sont même partis célébrer le dernier but avec les joueurs au poteau de corner, vaut mille mots, alors que son équipe a un temps cru à une certaine malédiction. Mais dans une soirée où elle se sera vu refuser deux buts et aura touché deux fois les montants, elle a enfin renversé le fatalisme, à l’image de cette barre qui se transforme en but ou de cette dernière réalisation accordée grâce à la VAR. Comme par magie, Paris s’est trouvé un mental en acier.
Priver du ballon la meilleure équipe du monde était notre premier objectif.
Dès les premières minutes, on a senti les Parisiens au diapason du collectif et de la tactique, à l’image de Désiré Doué, tacleur dans le rond central pour empêcher les projections mancuniennes et d’un pressing tout terrain effectué en équipe, jusqu’à la surface adverse. Un harcèlement étouffant qui a même mené le PSG à inscrire un dernier but dans le temps additionnel. Si Paris a asphyxié City sans ballon, il l’a aussi fait avec. Entre Lee Kang-in effacé mais précieux dans le jeu de possession, et des latéraux placés presque comme un deuxième attaquant axial sur les attaques placées, Enrique a mis de la densité là où les Citizens ont été débordés pour confisquer le ballon. « Priver du ballon la meilleure équipe du monde était notre premier objectif », a ainsi confié le technicien parisien, quand Pep Guardiola concédait un rapport de force perdu : « Ils ont été meilleurs, ils avaient un joueur de plus au milieu avec leur faux numéro 9 et c’était dur de le presser. »
36.9% - Manchester City n’affiche que 36.9% de possession ce soir, soit la 2e plus faible possession pour une équipe dirigée par Pep Guardiola en Ligue des Champions derrière celle avec City déjà contre le Barcelone de… Luis Enrique en novembre 2016 (34.7%). Nemesis. pic.twitter.com/azTfvuq7Fm
— OptaJean (@OptaJean) January 22, 2025
Enfin conforté dans ses idées, si besoin était, il s’est même permis une petite boutade devant la presse à l’issue du match : « Je n’aurais pas imaginé cette conférence de presse quand on était menés 2-0. » Blagueur, l’Espagnol sait aussi à quel point ce succès peut redonner confiance à son groupe, qui s’est imposé pour la première fois de son histoire après avoir été mené de deux buts en Ligue des champions. Tout autant qu’il peut faire peur aux autres ! « Nous n’avons aucun doute : si nous sortons de cette phase de groupes, nous allons être une équipe très, très difficile à affronter », a-t-il assuré. Toujours aussi sûr des forces des siens, il les a encouragés à plus tenter, après 45 premières minutes dominantes mais pas assez folles, à l’image de l’entrée à la pause d’Ousmane Dembélé. « La motivation, c’était d’oser encore plus. Je leur disais : “Il n’y a aucun problème, osez, pas de souci. Allez-y, face à City, on ne peut pas calculer.” […] Je pense qu’on a été très supérieurs à City. »
L’école des tauliers
Le plus paradoxal dans tout ça ? C’est qu’à l’heure où le PSG n’a jamais autant ressemblé à un collectif, les individualités ont brillé plus qu’à l’accoutumée. Dans une atmosphère envoûtée par un scénario fou et l’ivresse des grands soirs européens, Paris s’est trouvé des tauliers. Sitôt sur le pré, Dembélé a changé la face de son équipe, alors que Bradley Barcola a mis quelques doutes de côté. En début de saison, Luis Enrique plaidait pour avoir avec lui « quatre joueurs à 12 buts », plutôt qu’un joueur à 40. Ils sont désormais deux, Dembélé (12) et Barcola (13). Aux autres d’atteindre cette marque, mais son credo semble de plus en plus proche de la vérité, alors que ses joueurs continuent de saluer leurs progrès annuels.
Auteur d’une partition sans fausse note, João Neves a régné sur le milieu, alors que ses partenaires de l’entrejeu ont largement contribué à pousser De Buyne, Silva ou Mateo Kovačić à lever le drapeau blanc. Face à Erling Haaland et ses acolytes, la charnière Pacho-Marquinhos a montré qu’elle était parée pour la suite de la compétition, et Nuno Mendes, en enfer pendant cinq minutes, a su se ressaisir. L’euphorie collective a même permis de voir Gigio Donnarumma soulager sa défense en sortant dans les airs devant tout le monde sur corner (oui, vous avez bien lu). Très bon sur sa ligne, irréprochable et à la limite de l’exploit sur les buts concédés, l’Italien s’est peut-être enfin remis la tête à l’endroit sur la scène continentale.
JOAO NEVES DONNE L'AVANTAGE AU PSG À 10 MINUTES DE LA FIN ! 🤯#PSGMCI | #UCL pic.twitter.com/QxeYolnsVv
— CANAL+ Foot (@CanalplusFoot) January 22, 2025
Nasser al-Khelaïfi, fou de joie au coup de sifflet final, au PSG depuis 2011 et qui a donc vu passer quelques succès d’envergure, osait parler de « l’une des (ses) plus belles émotions » depuis qu’il est au club, après sa traditionnelle sortie médiatique post-victoire marquante. C’était peut-être la chose la moins inattendue de cette soirée, même si les quelques mots du dirigeant qatari illustrent aussi la tension qui régnait en amont de la rencontre. On voit venir les plus pessimistes : ce serait dans l’ADN de ce Paris Saint-Germain de se vautrer à Stuttgart, une semaine après avoir livré son meilleur match de la saison. Les plus optimistes, eux, préféreront sans doute se dire qu’une équipe est peut-être née sous la pluie.
Par Julien Faure, au Parc des Princes