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Il y a 20 ans, Roberto Baggio inscrivait cette merveille face à la Juve

Par Éric Maggiori
Il y a 20 ans, Roberto Baggio inscrivait cette merveille face à la Juve

Le 1er avril 2001, il y a vingt ans jour pour jour, Roberto Baggio inscrivait l'un des plus beaux buts de sa carrière face à la Juventus. Un instant de grâce, raconté par son coéquipier de l'époque sur le front de l'attaque de Brescia, le mythique Dario Hübner.

Les supporters de Brescia avaient bien senti le coup. Avant ce déplacement au stadio delle Alpi de Turin, le 1er avril 2001, ils avaient préparé une jolie banderole de circonstance : « Poisson d’avril ». Dans le mille : la blague s’est en effet concrétisée à la 87e minute de ce Juventus-Brescia. Alors que la Juventus mène 1-0, et se dirige tranquillement vers un 15e succès de la saison, deux joueurs de Brescia s’apprêtent à lui jouer un bien vilain tour. Dans sa moitié de terrain, Andrea Pirlo, 21 ans, avance balle au pied. Dans le rond central, le garçon aux cheveux longs décide d’enfiler ses plus beaux souliers de quarterback, et de balancer une ouverture vers son attaquant. L’instant qui suit, magique, va entrer dans la légende du football italien. À tel point que vingt ans après, tous les protagonistes s’en souviennent comme si c’était hier.

Une qualif en Coupe pour donner confiance

Retour en arrière de quelques mois. À l’été 2000, alors que l’Italie sèche encore ses larmes de la finale perdue contre la France, Roberto Baggio, laissé sur le carreau par Dino Zoff, veut s’offrir un dernier frisson. Le Divin Codino, 33 ans, signe à Brescia, qui vient tout juste de remonter en Serie A. Le Ballon d’or 1993 débarque dans une équipe de province après avoir porté les maillots des trois plus grands clubs italiens, la Juve, le Milan et l’Inter. « Et pourtant, dès qu’il est arrivé, il s’est immédiatement uni au groupe, se souvient Dario Hübner, mythique buteur à moustache des années 1990-2000. Il avait disputé trois fois la Coupe du monde, et pourtant, il est arrivé là avec une telle humilité… »

Il avait disputé trois fois la Coupe du monde, et pourtant, il est arrivé à Brescia avec une telle humilité…

Ironie du destin, Baggio dispute son premier match avec Brescia le 16 septembre 2000, en huitièmes de finale aller de Coupe d’Italie, contre… la Juve. Le match se termine sur le score de 0-0. « Au retour, une semaine plus tard à Turin, on est allés gagner 2-1 chez eux, et j’ai marqué les deux buts, abonde Hübner. Si je ne dis pas de bêtises, c’était la première fois dans son histoire que Brescia éliminait la Juve en Coupe. Et Baggio n’était là que depuis 10 jours… » Quelques semaines plus tard, les deux équipes se retrouvent en championnat, et le match se termine à nouveau sur le score de 0-0. Trois confrontations, donc, et aucune défaite pour les Rondinelle. De quoi, forcément, semer le doute dans la tête des joueurs bianconeri.

Huit secondes de plaisir

Nous voici donc à ce 1er avril 2001. La saison de Brescia est, jusqu’ici, compliquée. Malgré Baggio, Pirlo et Hübner, l’équipe entraînée par Carlo Mazzone pointe à la seizième place, en position de relégable. La Juve, elle, est deuxième, sept points derrière la Roma. Quand Gianluca Zambrotta ouvre le score à la demi-heure de jeu, on se dit que, enfin, la Vieille Dame va briser le tabou Brescia. « En général, quand tu t’appelles Brescia, que tu viens jouer à Turin, et que tu perds 1-0, tu t’attends à encaisser le deuxième, puis le troisième but, assure Hübner, qui avait frappé le poteau en première période. Mais là, on a tenu. Peut-être aussi que les trois matchs joués à l’automne ont eu leur importance, à ce moment-là. »

Il savait que le gardien allait sortir, et que la clef, c’était d’aller sur un côté. Alors, il a réalisé un contrôle orienté qui a surpris Van der Sar, et qui lui a permis de se mettre dans le sens du but. C’est de la magie.

Ce moment-là, tiens. C’est la 86e minute. La Juventus vient de terminer une nouvelle phase offensive, sans succès. Après un ballon perdu par Antonio Conte dans le rond central, le cuir revient dans les pieds d’Andrea Pirlo qui, malgré ses 21 ans, a déjà du talent dans les godasses. Le natif de Flero voit Baggio partir dans le dos de la défense turinoise. Ni une ni deux, il envoie un long ballon vers son capitaine. La suite, c’est Dario Hübner, qui se trouvait à quelques mètres de l’action, qui la raconte. « Andrea envoie un long ballon à Roberto. Le ballon vient de derrière, c’est très difficile de le dompter. Mais lui avait ce génie qui lui a permis de tout voir avant. Il savait que le gardien allait sortir, et que la clef, c’était d’aller sur un côté. Alors, il a réalisé un contrôle orienté qui a surpris Van der Sar, et qui lui a permis de se mettre dans le sens du but. C’est de la magie. »

L’instant dure 8 secondes, mais 8 secondes de pur plaisir. D’un contrôle orienté, Baggio contourne donc Van der Sar, et dépose le ballon dans le but vide. 1-1. Hübner est le premier à venir l’enlacer, suivi par Igli Tare, puis Andrea Pirlo. Sur son banc, Carlo Mazzone (qui se trouvait quelques mois plus tôt sur celui de Perugia, le jour où la Juventus a perdu le Scudetto sous le déluge), ne peut qu’applaudir. « Roberto fait ce contrôle orienté tout doux, le gardien se retrouve le cul par terre, et il dépose le ballon dans le but vide, rembobine le coach pour l’émission Sfide. Tout ça avec un naturel et une facilité extrêmes. » Milieu de terrain de Brescia, Antonio Filippini est resté scotché par le geste de Baggio : « Évidemment, on s’est tous dit que le gardien allait la prendre, parce qu’il avait anticipé le long ballon. Et en revanche, d’un éclair de génie, Baggio a réussi à regarder le ballon d’un œil, la position du gardien de l’autre, et à le contourner avec un contrôle orienté pour se retrouver face au but vide. C’était vraiment impressionnant. »

Au cinéma

Ce but, sublime, va avoir un impact considérable sur la suite de la saison. « C’est un but qui a potentiellement coûté le Scudetto à la Juve puisqu’ils ont terminé deux points derrière la Roma », se remémore Mazzone, romanista assumé. Surtout, il va totalement donner des ailes aux Bresciani qui, dès lors, vont enchaîner les bons résultats. Baggio marque pratiquement à tous les matchs, comme le 29 avril, où il est le seul buteur de la rencontre face à l’Inter (1-0), ou le 5 mai, quand il s’offre un triplé sur la pelouse de Lecce (dont un but sur corner direct), lors d’un duel décisif pour le maintien.

C’est simple : après son nul à Turin, Brescia ne perdra plus le moindre match jusqu’à la fin de la saison. Le 17 juin, lors de la dernière journée, les Rondinelle s’imposent 3-1 face à Bari (doublé de Tare, but de Hübner) et bondissent à la huitième place, le meilleur classement de leur histoire. Hübner s’en souvient avec une fierté non dissimulée : « Il faut se souvenir ce qu’était la Serie A de l’époque… Un week-end, j’arrivais sur la pelouse, et j’avais Nesta et Mihajlović en face de moi. Le week-end d’après, j’avais Maldini et Costacurta. Celui d’après, Thuram et Cannavaro… Terminer huitième avec une équipe provinciale comme Brescia, c’était comme gagner le Scudetto. »

Un week-end, j’arrivais sur la pelouse, et j’avais Nesta et Mihajlović en face de moi. Le week-end d’après, Maldini et Costacurta. Celui d’après, Thuram et Cannavaro…

Baggio, lui, disputera quatre saisons pleines en Lombardie (95 matchs, 45 buts). Le peuple italien implorera Giovanni Trapattoni de l’emmener au Mondial 2002. Mais le Trap fera la sourde oreille. Baggio raccrochera finalement en 2004. Son dernier match, il le disputera à San Siro face à l’AC Milan, le 16 mai 2004, et recevra une standing ovation au moment de sa sortie, après avoir été enlacé par une autre légende du football italien, Paolo Maldini.

Vingt ans après, Dario Hübner, aujourd’hui âgé de 54 ans, « profite de la période actuelle pour pêcher au soleil ». Surtout, il garde précieusement en mémoire ces moments passés aux côtés d’un tel champion. « À la fin des entraînements, tout le monde rentrait au vestiaire, mais moi, j’allais m’asseoir sur le banc. Pendant dix minutes, je regardais Baggio et Pirlo tirer des coups francs. Ils en tiraient dix chacun, et à chaque fois, ils en mettaient au moins 7 ou 8 chacun. J’avais l’impression d’être au cinéma. »

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Par Éric Maggiori

Tous propos recueillis par EM, sauf mention.

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