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Ici, c’est Drancy !

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes
Ici, c’est Drancy !

Le Red Star étant retourné en Ligue 2 et surtout exilé à Beauvais, il existe néanmoins toujours un digne représentant du foot du 9-3 en National. Très loin des stéréotypes attachés au département. Il s'agit de la Jeanne D'Arc de Drancy. Un ancien patronage catholique, fer de lance de la résistance cléricale en banlieue rouge, devenu désormais l'emblème d'un foot de valeurs et d'humilité très dans l'air post-Mondial 2018. Bref, une AJA aux portes de Paris, mais au cœur des cités. Et sans Guy Roux.

C’est soir de match au stade Paul-André. Un édifice planté au cœur de Drancy, l’antre et le siège de la Jeanne d’Arc, dont l’équipe première reçoit Boulogne (20h). Le jeune promu va tenter de faire bonne figure avec son effectif composé en grande partie d’hommes qui ont un boulot à côté et un budget de moins d’un million d’euros. « L’anonymat de nos villes de banlieue n’aide pas à trouver des soutiens économiques » , regrette Jean-Christophe Lagarde, député de la circonscription. Alors que le championnat National s’avère de plus en plus gagné par le professionnalisme, voilà un club qui semble d’une autre époque, ou tout du moins d’une autre histoire.

Éducation d’abord

Pour comprendre la JAD, association omnisports forte de 20 sections et 3 800 licenciés, il faut d’abord en effet remonter le fil de ses 115 ans d’existence. Sa nature souligne son enracinement dans le sport catholique, une partie de ses adhérents demeure encore licenciée à la FSCF (Fédération sportive et culturelle de France), descendante de la FSGPF (Fédération sportive et gymnique des patronages de France) fondée en 1898, et qui dispose toujours d’un évêque conseil. « La Jeanne d’Arc, explique d’ailleurs la vice-présidente de la FSCF, Laurence Munoz,a gardé les valeurs originelles qui ont prévalu à la création des clubs sportifs dans les patronages catholiques à la fin du dix-neuvième siècle. Notamment dans les banlieues ouvrières, avec un gros effort sur l’éducation en direction de l’enfance et la jeunesse. Il existe toujours au sein du club des services d’aide aux devoirs et d’accompagnement éducatif. » Le président de la JAD, Alain Melaye, ne dit pas autre chose : « Notre valeur centrale, c’est l’éducation. On ne peut pas être un club de banlieue sans valeur humaine. Bien sûr, la réussite de l’équipe nous réjouit, mais on continue à faire du social, c’est le plus important. Tant que je serai président, je continuerai d’agir ans ce sens. La réussite humaine passe par l’éducation. »

Un seul Dieu et un seul football

Il faut se replacer dans le contexte. 1903, la naissance. Le football apparaît alors déjà un moyen idéal pour reconquérir des gamins des faubourgs, plus près du bistrot que de l’évangile, sans parler des mauvais prophètes du socialisme impie. Du coup à Drancy, on rejoue Peppone contre Don Camillo, face aux communistes qui conquièrent la ville en 1935 et surtout face au puissant représentant de la FSGT, l’Art et Sport de Drancy. Pourtant, les temps changent. En 2001, la droite gagne l’hôtel de ville. De son coté, la section foot a rejoint la FFF en 1979 et grimpe un à un les échelons. Le rapport au patronage se distend, du moins officiellement. La crise économique affaiblit le tissu social. La situation locale se durcit. En 1995, un supporter extérieur est tué par un jeune du quartier refoulé du stade à l’occasion d’une rencontre ordinaire. Un souvenir encore douloureux. Un fait va s’avérer déterminant : l’immigration ne vient plus d’Italie ou du Portugal, mais du Maghreb ou d’Afrique noire. Elle est souvent musulmane et pratiquante, ce qui sera l’une des sources de la force actuelle de la JAD.

« Si certains joueurs non catholiques, et surtout musulmans, viennent chez nous, prolonge Laurence Munoz, c’est souvent évidemment d’abord pour des raisons de proximité. Toutefois ils retrouvent aussi dans nos clubs, dont la Jeanne d’Arc, une sensibilité particulière, une approche du sport, des valeurs liées à la religion qui leur conviennent. À l’image des enfants musulmans scolarisés dans les écoles privées catholiques en Seine-Saint-Denis, c’est la question des valeurs qui séduit ce public qui partage notre vision du sport et de l’éducation. » Alain Mehaye résume simplement cette politique : « La Jeanne d’Arc est un club catholique, mais nous avons un fonctionnement laïc. Le club, cosmopolite, est le reflet de la société française qui a évolué depuis un siècle. »

Aujourd’hui , forte de cette identité singulière et atypique, la Jeanne D’Arc va devoir affronter de nouveaux enjeux et contradictions qui vont peser sur ses frêles épaules, et trouver le bon chemin sans se renier. « C’est un club très familial, qui rassemble des gens très divers de tous les quartiers de la ville, souligne en bon politique Jean-Christophe Lagarde, ancien boss de la ville qui ravit la mairie au Parti Communiste. Avec des jeunes que j’ai connus au collège quand j’étais surveillant. On trouve rarement cela en banlieue, plutôt en province d’habitude. Nous espérons que cette équipe va montrer un exemple pour la jeunesse de la ville, de réussite, mais pas celle qu’on voit à la télé. »

Comment assumer une équipe première à un niveau quasi-professionnel sans perdre ou vendre son âme ? Une petite prière peut-être ?

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