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Hassen : « Je mérite d’être à Châteauroux »

Propos recueillis par Maxime Brigand, à Châteauroux
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Hassen : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Je mérite d&rsquo;être à Châteauroux<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Titulaire en Ligue 1 à 19 ans avec l'OGC Nice, son club formateur, Mouez Hassen a rebondi cet été à Châteauroux où il enchaîne un second prêt après six mois passés à Southampton avec Claude Puel. Si Yoan Cardinale s'éclate aujourd'hui chez les Aiglons, celui qui était devant lui il y a quelques années vient juste de « faire le ménage dans sa tête ». Rencontre avec un mec qui s'imagine désormais en bombe à retardement.

Il y a quelques mois, tu expliquais vouloir sortir de ton cocon et partir de Nice. Pourquoi ? Parce que j’étais dans un confort avec mes amis, ma famille, que des gens qui m’aiment quoi. Des gens qui ne te disent pas vraiment la vérité aussi. Ils essayent de te rassurer, de te maintenir dans le bon wagon. J’avais besoin de partir pour me retrouver un peu seul, je ressentais l’envie de me retrouver face à des gens que je ne connaissais pas pour me remettre à bosser, mais aussi pour entendre leurs critiques.

C’est ce que tu as trouvé à Châteauroux ?Oui, tout se passe très bien. On essaye de bâtir un truc au-delà du maintien qui est l’objectif principal du club. Chaque matin, on vient tous avec la même idée : bosser, et se relancer pour certains qui sont dans la même situation que moi. Ok, on traverse une période de moins bien (quatre défaites consécutives, ndlr), mais je pense que c’est aussi quelque chose qu’on attendait. On sait que chaque équipe vit un moment de creux dans une saison.

Qu’est-ce que tu as trouvé à Châteauroux que tu n’avais jamais trouvé ailleurs, que ce soit à Nice ou à Southampton ?Du temps de jeu, déjà. C’est ce que je suis venu chercher avant tout ici. C’est d’autant plus important pour un gardien, car il n’y a que comme ça que tu reprends de la confiance. Là, dans ma tête, je suis bien, je suis heureux. Je n’avais pas joué depuis un an, donc j’avais perdu des repères et j’essaye aujourd’hui de gommer toutes les mauvaises habitudes que j’ai prises pendant cette période.

Tu as ramené ça d’Angleterre ?Là-bas, tu bosses beaucoup plus, et franchement, ça a été très enrichissant. Le déclic vient certainement de mes six mois passés là-bas, oui. Au départ, j’avais peur de partir de Nice, mais j’ai eu la chance que le coach Puel m’ait appelé. Il m’a dit de le rejoindre pour travailler, avant tout. On a énormément parlé tous les deux, de mes défauts, de mes qualités, et tout ça m’a surtout fait grandir dans la tête. Le problème central était là : dans la confiance en soi, un truc essentiel dans le sport de haut niveau et peut-être encore plus dans le foot. J’en avais marre d’entendre des phrases comme « t’inquiète pas, ça va s’arranger » . J’avais besoin qu’on me rentre dedans et c’est ce que Puel a fait.

J’en avais marre d’entendre des phrases comme « t’inquiète pas, ça va s’arranger« . J’avais besoin qu’on me rentre dedans et c’est ce que Puel a fait.

Bizarre venant d’un coach qui t’avait lui-même placé sur le banc à Nice, non ?Oui, mais il m’a aussi tout apporté sur et en dehors du terrain. C’est lui qui m’a fait confiance, lui qui m’a lancé en pro, lui qui m’a installé numéro un. Le foot est complexe : tu peux avoir toutes les qualités du monde, on peut te parler d’un éventuel talent depuis que t’es gamin, si tu n’es pas concentré, que tu ne travailles pas, que tu n’es pas vigilant sur ta vie en dehors, ça ne va pas marcher. À Southampton, on a surtout bossé là-dessus. Les consignes étaient claires : tu viens le matin, tu manges, le midi tu restes ici aussi, quelque chose qu’on essaye aussi de faire à Châteauroux. On te met un cadre, une structure, et j’ai vu ce qu’était le vrai travail. C’est à Southampton que je me suis dit : voilà, c’est ce que je veux faire, je veux être footballeur professionnel et je veux l’être comme ça.

Tu as pensé tout abandonner à un moment donné ?Pas forcément abandonné, mais j’ai pensé à un moment donné partir loin, très loin de ce milieu pendant une certaine durée. Je voulais couper avec le monde du foot. Après, tu as deux options : si tu fais ça, les gens vont dire que tu es faible mentalement, que tu es un lâche, parce qu’en prenant cette décision, tu lâches aussi ton équipe ; ou tu restes, en te disant que tu es dans le dur, mais que tu vas travailler pour revenir en te disant que la roue va bien finir par tourner.

Quand tu étais au centre de formation, à Nice, certains formateurs avaient prévenu qu’à un moment, ta tête te rattraperait, tu t’en souviens ? Un formateur m’a dit ça : mon entraîneur des gardiens à Saint-Raphaël. Il me disait que j’étais l’un des plus gros talents, mais que mentalement, je n’étais pas assez fort. C’était une période où tout était « facile » pour moi. Il m’avait prévenu qu’à un moment donné, je devrais travailler plus dur. Il me disait aussi de faire attention à moi, de ne pas me disperser. Résultat, à un moment donné, face à ce monde spécial qu’est le foot, j’ai manqué d’expérience. J’ai fait des erreurs que je préfère avoir faites à cet âge-là.

Manu Pirès, qui était ton directeur au centre de formation, aime répéter que Cardinale a bouffé tout le monde mentalement. Tu sentais qu’il était plus fort que toi ?Je savais qu’il était fort mentalement, oui. S’il l’était plus que moi, probablement aussi. Il s’est servi de ce qu’il a connu en dehors du foot pour ne jamais rien lâcher, mais je pense que tout le monde a connu des épreuves. Je ne pense pas avoir été battu là-dessus, mais plutôt par ce qui m’entourait : les amis, tu commences un peu à sortir à droite, à gauche, puis tu perds le fil, tu n’es plus concentré sur ton truc. Si Puel m’a sorti de l’équipe, c’est pour ça, et certains en ont profité. Tant mieux pour eux. Yoan a de la chance parce que l’équipe marche bien en plus. Moi, quand j’étais titulaire, c’était une autre histoire. Et quand l’équipe ne marche pas…

Quand ton équipe ne tourne pas, on pointe l’attaquant, le gardien et le coach. C’est frustrant. Après, c’est aussi un milieu où tout va très vite. Aujourd’hui, certains ont une place, mais est-ce qu’ils l’auront demain ? Difficile à savoir.

Tu as eu l’impression d’être désigné comme coupable d’une situation ?Oui et non, ce sont les règles du foot. Quand ton équipe ne tourne pas, on pointe l’attaquant, le gardien et le coach. C’est frustrant. Après, c’est aussi un milieu où tout va très vite. Aujourd’hui, certains ont une place, mais est-ce qu’ils l’auront demain ? Difficile à savoir. Moi, on me dit que je ne suis pas à ma place, mais si, je suis à ma place : je suis à Châteauroux parce que je mérite d’être à Châteauroux. Aujourd’hui, je peux bosser sans qu’on me casse les couilles, il y a moins de pression, les médias ne sont pas là tous les jours à analyser ma forme à chaque entraînement. Je suis ici pour me relancer, mais je sais aussi que cette période ne sera qu’un mauvais souvenir dans quelques années.

Tu évoques souvent l’entourage des joueurs. Est-ce que tu as l’impression de ne pas avoir été assez bien préparé à tout ce qui allait te tomber dessus une fois le premier contrat pro signé ?Et pourtant, tout le monde te prévient : les parents, les coachs… Mais quand ça arrive, tu as deux genres de personnes : ceux qui arrivent à gérer et qui parviennent à s’éloigner de tout ça ; et les gens comme moi. Peut-être que j’ai été trop gentil, mais je suis comme ça, je l’ai toujours été. J’étais jeune et con quand j’étais à Nice. J’ai été naïf, têtu, je n’ai pas forcément écouté les bonnes personnes et aujourd’hui, j’ai fait le tri. On a aussi un préparateur mental qui m’a permis de faire le ménage dans ma tête. Je suis reparti de zéro.

Lorsque Châteauroux t’a recruté cet été, on t’a dit que tu aurais du temps pour t’adapter et revenir à ton meilleur niveau ?Non, on m’a dit : tu veux travailler, tu veux réussir, alors viens ici, c’est par-là que tu vas devoir passer. Le projet était assez clair, Châteauroux vient de remonter en Ligue 2 et je n’ai même pas hésité, c’était parfait pour moi. Jérôme Leroy m’avait prévenu qu’il n’y avait rien ici, mais je m’en foutais.

J’étais jeune et con quand j’étais à Nice. J’ai été naïf, têtu, je n’ai pas forcément écouté les bonnes personnes et aujourd’hui, j’ai fait le tri. On a aussi un préparateur mental qui m’a permis de faire le ménage dans ma tête. Je suis reparti de zéro.

Châteauroux, ça bouscule quand on arrive de Nice quand même, non ?Oui, mais quand tu parles avec les joueurs qui vivent ici, tu vois qu’ils sont très contents. Je viens de Nice, qui est une ville assez populaire, mais je cherchais du calme. Je voulais surtout qu’on me laisse tranquille en fait.

Parce qu’on en a trop fait avec toi à un moment donné aussi ? Tu as quand même été balancé titulaire en Ligue 1 à 19 ans. On en a fait avec moi comme on en fait avec tous les jeunes joueurs. Je n’ai pas non plus été aidé par le contexte, car je me suis retrouvé gardien d’une équipe où des joueurs voulaient partir, où d’autres ne savaient pas trop ce qu’ils voulaient faire, il n’y avait pas de recrues et on prenait beaucoup de buts. Dans ces cas-là, faut faire des choix, et le premier choix, c’est d’enlever le jeune plutôt que le vieux.

On discute avec le numéro deux – ici Simon Pouplin – quand il prend notre place de titulaire ?Je n’en ai pas ressenti le besoin parce que je savais que j’allais récupérer ma place. Je pars du principe que le gardien aligné le week-end est le meilleur, donc si je suis numéro deux, c’est parce que le numéro un a été meilleur que moi et que je n’ai pas été bon. Maintenant, à moi de travailler pour la récupérer, mais je sais qu’un jour, je retrouverai ma place à Nice.

On peut apprendre quand même d’un numéro un, non ? J’imagine que ça a été le cas à Southampton avec Fraser Forster par exemple.Le truc, c’est qu’après sa grosse blessure, il n’était plus vraiment le même. J’ai eu la chance de jouer là-bas parce que j’étais bon à l’entraînement et avec la réserve. Après, c’est compliqué quand tu es français, que tu arrives en Angleterre, c’est aussi ce qu’il s’est passé avec le coach d’ailleurs. Si je n’ai pas joué, c’est en partie à cause de ça, et les Anglais ne cherchent pas à comprendre : si ça se passe mal, ils te donnent ton argent et tu te casses.

T’en retiens quand même du positif ?Je retiens surtout que l’anglais est indispensable. (Rires.) Je suis arrivé, je ne parlais pas un mot. La majorité des jeunes joueurs français s’en fichent au départ en fait. Quand tu es au centre de formation, que tu commences à être bon, on ne te parle plus que de terrain et on met progressivement les cours de côté. Moi, je n’avais pas l’envie de gérer les deux. J’ai toujours voulu faire du foot mon métier, au risque de faire certains choix par inexpérience. Maintenant que j’ai été en Angleterre, je sais ce qu’il faut ce que je fasse pour y retourner. Je me posais l’autre jour la question de prendre un prof particulier. Je suis devenu quelqu’un d’assez solitaire et ici, j’ai plus de temps libre, donc pourquoi pas.

Nice, c’était le stade du Ray, c’était la folie quoi. Maintenant, on a changé de dimension avec un président qui souhaitait aller plus loin. Aujourd’hui, qui refuserait de venir à Nice ?

Nice surveille tes performances aujourd’hui ?Je sais qu’il y a un suivi oui, qu’un recruteur du club vient souvent voir mes matchs et que l’entraîneur de gardiens me surveille aussi. J’essaye aussi de penser au projet de jeu du coach Favre et ça reste assez similaire à ce qu’on essaye de faire ici, notamment dans les sorties de balle. Je travaille pour pouvoir postuler dès mon retour.

Tu regardes encore les matchs du coup ?C’est mon club de cœur, donc oui. Je suis supporter. Jusqu’à il y a encore quelques années, Nice restait une équipe qui ne jouait pas beaucoup, mais qui rentrait dans ses adversaires avec le cœur. Qui aurait pu croire qu’un jour Mario Balotelli vienne chez nous ? C’était le stade du Ray, c’était la folie quoi. Maintenant, on a changé de dimension avec un président qui souhaitait aller plus loin. Aujourd’hui, qui refuserait de venir à Nice ? Presque personne et l’arrivée d’un joueur comme Dante a beaucoup aidé pour l’attractivité du club aussi. Grâce à ses connaissances, tu peux faire des belles affaires. Pareil avec Bodmer qui a été impliqué dans la plupart des transferts. Je suis fier de ce club et je suis persuadé qu’il défiera les plus gros dans les prochaines années.

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Propos recueillis par Maxime Brigand, à Châteauroux

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