Avec ce récent transfert à Bastia, l’année 2015 a bien débuté pour toi…
Cette année débute bien pour la simple raison qu’aujourd’hui, je peux exercer mon métier pleinement. Je suis un compétiteur, j’ai envie de retrouver les terrains, donc c’est un vrai plaisir, ma situation actuelle à Bastia.
Comment tu expliques ce point de non-retour atteint à Lyon ?
Faudra demander aux dirigeants lyonnais… C’est eux qui ont les réponses dans la mesure où ils ont décidé de ne plus me faire jouer. C’est eux qui prennent les décisions comme ils disent, et notamment Hubert Fournier qui disait avoir la main sur le sportif. Aujourd’hui, il faut lui poser la question : pourquoi je n’apparaissais même pas dans le groupe ? Après, pour le temps de jeu, l’équipe avait des résultats, donc c’est compréhensible de ne pas en avoir, mais ne pas apparaître dans le groupe en revanche, c’est difficile à comprendre.
Il y a eu un tournant dans ta carrière lyonnaise, un moment où tu as senti que c’était mal goupillé ?
Quand j’arrive, je fais tous les matchs amicaux, les matchs de Ligue des champions contre Grasshoppers Zurich, puis arrive la Ligue 1, et je suis sur le banc, alors que le coach de l’époque (Rémi Garde, ndlr) m’avait dit être satisfait de mes débuts.
« Le football, ce n’est pas l’univers des Bisounours »
Tu as peu joué la première saison, quasiment pas la seconde, avec ce match retour de Ligue Europa contre Astra où tu te fais démonter par Jean-Michel Aulas sur Twitter…
Je m’en souviens, il m’a dégommé à l’époque pour protéger le groupe. On avait un groupe jeune, le président a été très malin en créant un buzz autour de moi pour qu’on évite de pointer du doigt les carences de l’équipe et l’absence du club dans une phase finale de Coupe d’Europe. Cela faisait 17 ans que Lyon était en Coupe d’Europe, pour éviter qu’on ne parle trop de cette absence, il a sacrifié un joueur. Dans la mesure où il était plus facile de me tirer dessus, le choix était simple. Pour rappel, il m’a tué publiquement, mais ce match en Roumanie, on le gagne 1-0, on ne passe pas parce qu’on a perdu l’aller à la maison 2-1, alors que je n’étais pas dans le groupe.
Donc selon toi, Aulas qui te charge sur Twitter, ce n’est pas une réaction impulsive de sa part, mais une communication calculée : sacrifier un individu pour protéger les intérêts du groupe ?
Exactement, c’est mon point de vue, cela n’engage que moi, mais je lui ai fait part de cette réflexion en entretien. Il n’a ni démenti ni acquiescé, il est resté stoïque.
Ton propre président qui t’attaque personnellement et publiquement, j’imagine que ce n’est pas simple à gérer mentalement…
Pour moi, cela allait. Cela a été beaucoup plus difficile pour ma famille et mes amis. C’est pour cela que j’en ai voulu au président. Quand je dois laver mon linge sale, je le fais en famille, pas sur la place publique, chose que lui a faite. De la part d’un président de renom comme Aulas, j’ai trouvé cela complètement déplacé.
C’était inhumain ?
Inhumain non, le football, ce n’est pas l’univers des Bisounours, il faut s’y attendre. Mais Aulas, c’est quelqu’un qui est très fort en communication, il a dévié le problème en créant un buzz autour de moi. Cela a très bien marché, car pendant deux semaines, on a avant tout parlé de cela, de ce qu’il avait pu dire sur moi, mais personne n’a vraiment mis en évidence l’absence de Lyon en Coupe d’Europe.
« J’ai retrouvé le sourire, l’envie de jouer et de rendre service »
Les derniers mois à Lyon ont dû être très longs et frustrants…
C’était très long et frustrant, mais j’ai eu la chance d’être dans un groupe formé de jeunes et de moins jeunes qui, à aucun moment, ne m’ont mis sur le côté. Ça, c’est très important dans la semaine d’avoir les collègues pour encourager, dire un mot gentil, inciter à ne pas lâcher. Quand vous avez le soutien de vos partenaires, c’est toujours agréable.
Comment se sont déroulés les premiers contacts avec Bastia ?
Cela remonte à une semaine avant la fin du mercato. Je suis ami avec Jean-Louis Leca, le deuxième gardien du Sporting avec qui j’ai joué cinq ans à Valenciennes. C’est un ami que j’ai souvent au téléphone, et je lui ai fait part sans arrière-pensées de ma situation à Lyon, du fait que cela commençait à devenir invivable. Un jour, il m’appelle et me dit : « Tu veux venir à Bastia ? » Au préalable, sans me sonder, il avait parlé de moi à ses dirigeants pour savoir si je pouvais les intéresser. Dès lors qu’ils ont émis le souhait de pouvoir travailler avec moi, j’y ai réfléchi et me suis dit : « Pourquoi pas ? »
Aujourd’hui, tu joues – déjà six titularisations -, ton équipe tourne bien, va disputer une finale contre le PSG. Tu as trouvé une belle porte de sortie à ton impasse lyonnaise…
C’est sûr. Quand on dit que tout peut aller vite dans le football, ma situation personnelle donne tout son sens à cette phrase. En janvier, j’étais encore à la cave, et là j’ai la possibilité de jouer une finale de Coupe de la Ligue contre le PSG. Je suis tombé dans un groupe de qualité, je m’épanouis, j’ai retrouvé le sourire, l’envie de jouer, l’envie de rendre service. Je me sens utile et c’est bénéfique.
« Nabil Fekir a un mental d’acier »
On attribue le renouveau de Bastia à Ghislain Printant, un entraîneur qui est réputé s’appuyer sur les valeurs et l’identité corse du Sporting. De l’intérieur, cela ressemble à quoi ?
C’est quelqu’un qui arrive à faire que chacun se sente concerné. On est trente, on se sent tous concernés, qu’on joue beaucoup ou pas. Il communique beaucoup, il ne met personne sur le côté, car il sait qu’à n’importe quel moment, il peut avoir besoin de ceux qui ne sont pas actuellement dans ses plans. Il arrive à bien gérer son effectif, c’est ça qui fait sa force. Même ceux qui ne jouent pas beaucoup, au moment où ils sont amenés à entrer en jeu, ils ne sont ni aigris ni sous pression, perturbés par rien, car il y a un travail en amont pour que chaque joueur soit prêt et investi. Le coach explique clairement tous ses choix et insiste auprès de chacun pour dire qu’il faut continuer de travailler et que cela paie toujours. On est trente joueurs, trente joueurs concernés, c’est important.
Quels sont tes objectifs personnels d’ici la fin d’année ?
J’ai des objectifs personnels, mais ils sont tronqués, car je ne suis arrivé qu’en février. Je ne me fixe pas d’objectifs chiffrés. Je veux être le plus décisif possible, apporter ce que je sais faire. Surtout, j’ai des objectifs collectifs : se maintenir le plus vite possible, car on a un groupe de super qualité, j’insiste vraiment dessus, et puis il y a cette finale. On va jouer un monstre européen, quand on voit ce qu’ils ont pu faire contre Chelsea. Mais comme on dit, sur un match…
Didier Deschamps vient d’annoncer sa liste pour France-Brésil et France-Danemark, avec Nabil Fekir dedans. Toi qui l’as côtoyé, penses-tu qu’il a le potentiel pour s’imposer en Bleu ?
Je ne sais pas s’il peut s’imposer, car il n’a pas encore joué une seule minute avec l’équipe de France, cela va dépendre de sa capacité à s’adapter à un environnement qu’il ne connaît pas. Ce que je peux dire, c’est qu’au-delà d’avoir des qualités techniques impressionnantes, il a un mental d’acier, ce qui fera la différence.
L’Atalanta conserve la bonne Dea