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Les supporters des autres clubs français seront-ils à fond derrière le PSG ?

Par Evan Glomot et Mathieu Plasse
12 minutes

La France doit-elle être derrière le Paris Saint-Germain en finale de la Ligue des champions ? La question ne cesse de revenir sur la table, dans les médias comme dans une discussion entre copains, à l’approche de PSG-Inter, samedi à Munich. Alors, on s’est tourné vers ces autres supporters, d’un président de la République à un étudiant en passant par un artiste contemporain, pour avoir des réponses diverses et variées. Tour d’horizon.

Les supporters des autres clubs français seront-ils à fond derrière le PSG ?

Antonin, étudiant en droit et amoureux de Brest :

« Franchement, ça me fait bizarre de dire ça, mais ouais, je vais peut-être soutenir Paris samedi. Pas par amour du PSG, il ne faut pas exagérer. Mais ils nous ont sortis en barrages, donc si au moins ils vont au bout, on pourra se dire qu’on a perdu contre les champions. Puis, sans Mbappé, c’est un peu un “nouveau” PSG. Moins bling-bling, plus collectif. Bon, ça reste Paris, et en tant que Brestois, ou “Paysans” comme ils nous appellent, ce n’est pas naturel de les encourager. Mais face à l’Inter, je me dis que si un club français peut enfin ramener la coupe à la maison, c’est pas rien. Alors non, je ne sortirai pas l’écharpe, mais au fond, je ne serai pas mécontent s’ils gagnent. Si on les tape en championnat la saison prochaine, on pourra dire qu’on a battu les champions d’Europe ! »

Alice Pol, actrice, romancière et fan de l’OM :

« Cette question existentielle me contrarie depuis des mois. Me voilà obligée d’y réfléchir encore plus grâce à vous ! Mon cœur saigne en disant cela, mais j’aime bien trop le sport et ses exploits en tous genres pour ne pas encourager Paris à aller au bout de cette réussite. Donc je suis de leur côté pour cette fois, une exception assez douloureuse. »

François Hollande, ancien président de la République :

« Paris n’a jamais eu les faveurs de l’opinion publique, souvenons-nous des sarcasmes qui avaient précédé le lancement des Jeux olympiques. Au fil des jours, les mêmes ont fini par comprendre que cette réussite était aussi celle de ceux qui n’y habitaient pas. Le PSG, en dehors des soutiens nombreux qu’il reçoit, suscite souvent des réticences, en raison d’un actionnaire qui apporte des moyens qu’aucun club ne peut mobiliser. Sans compter qu’ils dominent constamment le championnat français, ce qui ajoute encore à une forme de jalousie. Mais pour la finale de Ligue des champions, il y aura une unanimité. Le Paris Saint-Germain va représenter la France et le football français. Il porte l’espoir qu’un autre club puisse accéder à un des plus beaux trophées aux yeux du monde. En ce qui me concerne, je peux être pour Marseille, pour Monaco, et ce week-end, je supporterai le Paris Saint-Germain. Il y a des clubs que je préfère à d’autres, mais je soutiens tous les clubs français.

La réalité, c’est que les Français aiment gagner. Disons que si le PSG gagne, je suis sûr qu’il y aura une fête un peu partout, et pas simplement à Paris. Pour prendre l’exemple de la Corrèze, il y a beaucoup de territoires où il n’y a pas de grands clubs de football, donc toute la population va s’inviter en tant que supporter du Paris Saint-Germain, l’équipe qui gagne. Le Paris Saint-Germain, c’est l’équipe pour ceux qui n’ont pas de clubs. C’est un peu l’équivalent de l’équipe de France.

Je suis assez impressionné par des joueurs comme Kvaratskhelia. Il a un style, les chaussettes près des chaussures, pas de protège-tibias… Il me rappelle un peu Rocheteau.

François Hollande

Au-delà du fonds de jeu, je suis assez impressionné par des joueurs comme Kvaratskhelia. Il a un style, les chaussettes près des chaussures, pas de protège-tibias… Il me rappelle un peu Rocheteau. J’aime aussi beaucoup Vitinha, qui offre de la stabilité à cette équipe, ou encore Achraf Hakimi. J’ai eu quelques réserves sur Donnarumma en revanche, qui a depuis été exceptionnel dans les matchs précédents. Le fait nouveau, c’est qu’il n’y ait pas de faiblesses particulières dans l’équipe. C’est pourquoi ils vont gagner samedi. »

  Mickaël, ultra de la Populaire Sud :

« On a battu l’équipe type du PSG il y a quelques semaines. Si Paris remporte la Ligue des champions, on aura battu le champion d’Europe. On serait donc un peu champion d’Europe nous aussi ! »

  Loïs, rédacteur en chef de Soundbather (webzine musical) :

« Je suis fan de l’OL, j’ai grandi avec cette passion de Lyon et seul Lyon compte en France. Je m’en fous de “la fierté française”, surtout que Paris est un club que je conchie depuis que je suis le foot, bien avant que le Qatar rachète le club. Ce qui n’a pas aidé à ce que je les aime davantage. Je ne vois pas pourquoi on devrait retourner notre veste sous prétexte que c’est un club français en finale. Paris est un club détestable, pas aidé par une couverture médiatique écœurante, qui apporte encore plus d’eau dans mon moulin de la détestation. J’ai pas spécialement d’attache pour l’Inter, je peux même dire que je m’en fous, mais clairement, si le PSG peut perdre, alors soyons interiste pour un soir. »

  Jérôme Pineau, ancien coureur cycliste et chroniqueur pour Les Grandes Gueules du sport :

« Je suis supporter de Nantes, qui ne risque pas d’être en finale de Ligue des champions avant un bon bout de temps. Tout comme je suis amoureux de l’Olympique de Marseille : j’avais 13 ans en 1993, j’ai dû porter ce maillot Panasonic pendant une bonne semaine. Mais j’aime le foot avant tout, et ce PSG n’est pas une accumulation de stars comme c’était le cas par le passé. Si c’était le Paris de Neymar ou Zlatan, ça ne m’aurait pas intéressé du tout.

Cette équipe est venue me chercher au niveau des émotions. J’ai vibré avec cette équipe, ce qui n’avait jamais été le cas auparavant avec une équipe parisienne.

Jérôme Pineau

Je suis devenu fan du trio d’attaque, ainsi que d’Achraf Hakimi. J’ai passé une demi-heure avec lui et mon fils après un match contre Saint-Étienne, et à partir de cela a découlé une sympathie et un soutien dans les moments difficiles. Sans parler de Luis Enrique, qui est un vrai amateur de courses cyclistes. Cette équipe est venue me chercher au niveau des émotions. J’ai vibré avec cette équipe, ce qui n’avait jamais été le cas auparavant avec une équipe parisienne. Je serai à 200% derrière le Paris Saint-Germain, même si je ne suis pas autant excité que devant une finale avec Nantes ou Marseille. »

  Thomas, technicien biomédical et fan du RC Lens :

« Étant supporter du plus grand club de France, le Racing Club de Lens, le mot “supporter” un autre club français en Coupe d’Europe est un peu fort de café. Quand on supporte un club français, c’est impossible de soutenir un autre club que le nôtre. Sachant qu’en plus les supporters s’insultent à tout-va tout le reste de l’année. Malgré tout, il faut admettre que le PSG a une très belle équipe, enfin onze joueurs qui se donnent sur le terrain depuis le départ des stars individualistes. Je serai seulement content pour des amis supporters de Paris de très longue date et non pour des soi-disant suiveurs qui soutiennent depuis 2011 avec l’arrivée des stars. Pour finir, si le PSG remporte la Ligue des champions, la fête aura lieu seulement dans la ville de Paris et non à Lille, Lens, Rennes, Strasbourg… Un seul maillot finit par rassembler tous les supporters, c’est celui de l’équipe de France. »

Leurs chants “Paysans, paysans”, c’est du mépris pour les clubs de province. Moi, ça m’a vacciné, j’en suis venu à détester ce club.

Baptiste, paysan auxerrois

Baptiste, étudiant en médecine et fan de l’AJA :

« Sportivement, il n’y a rien à dire : le PSG, c’est la meilleure équipe d’Europe actuellement. Leur jeu, leurs stars, leur niveau… c’est impressionnant. J’aimerais pouvoir les soutenir, mais c’est impossible. À cause de leurs supporters. À chaque déplacement au Parc, on se fait humilier avec leurs chants “Paysans, paysans, paysans”. Ce n’est même pas la tribune ultra d’Auteuil qui chante ça ! Non, c’est Boulogne, la tribune supposée plus calme. C’est du mépris pour les clubs de province. Moi, ça m’a vacciné. J’en suis venu à détester ce club. J’en veux même plus de leur victoire en finale. Qu’ils perdent, et de la pire des manières si possible. Peut-être que ça les fera redescendre un peu sur terre. »

Sacha Houlié, député de la 2e circonscription de Vienne :

« Écoutez, vous connaissez la phrase que l’on prête à Cantona selon laquelle on peut changer de religion, de femme, de parti politique, mais qu’on ne peut pas changer de club de foot ? Je me sens dans cette situation. C’est impossible pour moi de supporter le PSG, je n’ai jamais aimé cette équipe et je ne l’aimerai jamais, qu’ils gagnent ou qu’ils perdent. Pour l’anecdote, ma belle-sœur m’a ramené l’été dernier un body de l’Inter pour mon enfant, je prends cela pour un acte prémonitoire et je le lui mettrai samedi ! »

  Monika, chargée des opérations merchandising des Paris Musketeers et Uniqlo :

« Oui, je vais supporter le PSG en finale. Ils ont vraiment assuré tout au long de cette campagne européenne. Ce que j’ai particulièrement apprécié, c’est la façon dont ils ont su rebondir après un début de Ligue des champions compliqué. La première phase n’a pas été facile, le temps que Luis Enrique prenne pleinement les rênes de son groupe. Il y a même eu quelques tensions, mais ils ont su redresser la barre.

C’est typiquement français de se tirer dans les pattes. Même Zidane a dit qu’il soutiendrait Paris !

Monika

La victoire contre Manchester City a été un vrai tournant. En tant que Lyonnaise, je dois avouer que ça m’a un peu piqué, car c’est un exploit qu’on avait réalisé nous aussi, et le voir fait par une autre équipe française, ça m’a fait un drôle d’effet. Et puis, en tant que supportrice de Liverpool, mon autre club de cœur, l’élimination face au PSG a été un petit pincement au cœur. Pas parce qu’on a mal joué, mais simplement parce qu’ils ont été meilleurs. Et ça, il faut le reconnaître.

Alors oui, allez Paris, allez la France ! Ce serait une belle récompense pour le football français et pour notre coefficient UEFA. En 2020, la finale s’était jouée à huis clos. Cette fois, c’est tout un pays, toute une ville qui vibrera ensemble. Il y aura des retransmissions sur écran géant, ce sera une vraie fête. Quant aux Lyonnais qui espèrent une défaite du PSG, je trouve ça vraiment ridicule. C’est typiquement français de se tirer dans les pattes. Même Zidane a dit qu’il soutiendrait Paris ! »

  Paolo Del Vecchio, artiste contemporain et supporter de Metz :

« J’ai reçu ma culture footballistique par ma famille italienne, de mon grand-père qui était interiste et mon père qui était juventino. En tant qu’amoureux de l’Italie, je supporterai l’équipe qui a le plus de joueurs de la Nazionale, à savoir l’Inter. Et si Paris gagne, on sera heureux pour Gigio.

On ne verra jamais un Interiste supporter l’AC Milan, là où les supporters rossoneri ont fait une pétition pour pardonner à Donnarumma s’il arrive à battre l’Inter en finale !

Paolo Del Vecchio

Je suis assez d’accord sur le fait que les clubs rivaux n’aient pas à supporter le PSG. Je n’en vois pas d’autres que Marseille, mais cela ne me choque pas que les Marseillais soient à fond derrière l’Inter. Cela se retrouve dans tous les pays : on ne verra jamais un Interiste supporter l’AC Milan, là où les supporters rossoneri ont fait une pétition pour pardonner à Donnarumma s’il arrive à battre l’Inter en finale !

Il y a aussi un point politique, celui qu’on adhère ou non aux valeurs des propriétaires du club. Le PSG représente une communauté, leurs dirigeants en représentent une autre. C’est une vaste question où l’on peut faire abstraction de ça car c’est un club français, ou alors se dire que non, on ne peut accepter la direction du club, donc on ne souhaite pas que le club arrive à ses fins. Il faut donc garder une certaine nuance, et différents points de vue peuvent se justifier. »

→ La (vraie) expertise de Nicolas Hourcade, sociologue spécialiste des supporters de football

« Cette question ne se pose pas en Italie pour l’Inter. On ne demande pas aux autres supporters, car tout le monde sait que non. Pourquoi cette question se pose spécialement en France ? Dans d’autres pays de football, la rivalité passe avant l’enjeu sportif, ce qui paraît comme une évidence. Les clubs allemands, anglais ou italiens arrivent souvent en finale, au contraire des Français. Cela soulève une question d’intérêt national.

Un autre phénomène unique, c’est que des villes moyennes comme Sainté ou Reims soient devenues les porte-étendards du football français. À partir des années 1980, les rivalités ont pris une place beaucoup plus forte, ça change la donne. L’OM des années 1990 demeure un club charnière, aimé dans tout le pays, mais aussi détesté dans certaines villes (Paris, Bordeaux). Marseille se trouve dans cette phase intermédiaire qui a beaucoup de rivaux sur le plan national, mais où l’on se dit « c’est le club qui représente la France », et c’est un peu la situation du PSG aujourd’hui. Les fans assidus de clubs rivaux ne vont pas devenir subitement des fans du Paris Saint-Germain.

Les clubs allemands, anglais ou italiens arrivent souvent en finale, au contraire des Français. Cela soulève une question d’intérêt national.

Nicolas Hourcade

Alors, quels sont les clubs les plus enclins à susciter de la sympathie ? Quand Auxerre ou Brest font de bons parcours européens, il y a un consensus à pouvoir les suivre car ils n’ont pas de « grosses rivalités ». En Italie, c’est moins le cas : beaucoup de clubs suscitent passions et inimitiés. Par exemple, l’Atalanta provoque moins de passions que la Juventus, mais le football italien est marqué par le campanilisme : la rivalité entre cités. Chose que l’on retrouve moins en France. Bergame suscite moins d’hostilité que la Juventus car ils ont moins de rivaux, mais Brest suscite plus de sympathie en France que Bergame en Italie.

Ce qui peut aussi entrer en compte, c’est ce que représente le club, et qu’est-ce que ça vaut en qualité de jeu ? Certains ne peuvent pas aimer ce PSG version Qatar, qui accapare tous les championnats de France, mais le PSG de Luis Enrique, sans grandes stars, avec des matchs européens excitants, a pu faire naître un gros capital sympathie. On a l’impression que des amateurs de football peuvent plus facilement se reconnaître dans ce PSG que dans celui de Neymar ou Mbappé. Sans parler de l’image négative que le club se coltinait par le passé. »

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Par Evan Glomot et Mathieu Plasse

Tous propos recueillis par EG et MP

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