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Mandanda, le baisser de rideau du Fenomeno
Comme trois autres champions du monde 2018 avant lui, Steve Mandanda a décidé de mettre un point final à sa carrière. Le temps file, celui des légendes et d'un gardien marquant du premier quart de siècle. La Ligue 1, l'OM et les Bleus s'en souviendront.

En octobre prochain, à moins d’un pépin, Mike Maignan deviendra le sixième gardien à avoir disputé le plus de matchs avec les Bleus. Il égalera son aîné, Steve Mandanda, 35 sélections en plus de quatorze ans de service en équipe de France. Pas plus. Après un été passé à voir revenir ses potes, le champion du monde 2018 tire sa révérence et rejoint Blaise Matuidi, Raphaël Varane et Adil Rami au soleil. « Au cours de la saison dernière, je savais que j’allais arrêter », raconte-t-il à L’Équipe. Serein.
Steve, Job well done
Avant d’arrêter à 40 balais, 555 matchs de Ligue 1 et une dernière en mai dans son stade, le Vélodrome, avec Rennes, Steve Mandanda a été le premier rempart du premier quart de siècle de celle qui n’était pas encore une Ligue de fermiers, qu’il a remportée une fois, en 2010. Ce grand gaillard a longtemps accompagné nos week-ends, les multiplex du samedi puis du dimanche. Il a terminé cinq fois meilleur gardien de Ligue 1 et trois fois vainqueur de (feu) la coupe de la Ligue.
Steve est aussi un vieux parce qu’il a joué avec le père et le fils Thuram en Bleus. Il avait commencé en équipe de France U19 avec René Girard, a même joué en équipe de France A’. C’était en 2008, contre la RDC, où il est né, en face de son frère Parfait, comme le rappelle l’excellent Chroniques Bleues. Mandanda a ainsi constitué un point de repère du foot français, de l’OM à Rennes, où il était devenu une doublure élégante et pédagogue et où il réside toujours aujourd’hui, son fils Sacha jouant surtout avec ses pieds au sein de l’Académie. On s’était habitué à côtoyer son léger embonpoint, dans un poste où il est arrivé parce qu’il n’avait « pas besoin de courir autant que les autres ». Il a hérité d’un surnom, Il Fenomeno, qui le rapproche un peu d’un Brésilien trapu.
Steve a annoncé sa retraite dans un journal, autour d’un café, sans artifice ni contrat à Dubaï, comme si sa vie d’après ressemblait à celle de maintenant : celle d’un mec discret, mais respecté et admiré. Il part avec l’image d’un joueur fidèle. Fidèle à quatre clubs, Le Havre, Marseille et Rennes en France, en plus de Crystal Palace en Angleterre, parenthèse bien démarrée mais vite interrompue par une sale blessure. Après son retour en Ligue 1 en 2017, Mandanda aura incarné la longévité, la loyauté et la constance à Marseille. Sa carrière dans le Sud s’est conclue avec le brassard, logique, et le statut de joueur le plus capé du club, avec 613 matchs, soit 161 de plus que Roger Scotti son second. C’est dire.
Les frères gardiens
Mandanda a été appelé 159 fois sur une feuille de match des Bleus, pour s’asseoir 118 fois sur le banc. Toujours derrière Hugo Lloris, sans sourciller ni qu’on sache si ça constitue le malheur ou le bonheur de sa carrière. « Notre admiration mutuelle a grandi au fil de notre parcours en bleu », dit-il joliment dans L’Équipe. Il a vu passer des Sébastien Frey, qu’il remplaça un soir de mai 2008 pour une première face à l’Équateur. Mais aussi des Cédric Carrasso, qu’il avait rejoint à Marseille comme doublure en 2007, des Benoît Costil, des Stéphane Ruffier, des Alphonse Areola et plein d’autres. Quatre Euros et trois Coupes du monde plus tard, il peut s’en aller tranquille.
Dans un pays où les deuxièmes sont appréciés, Steve est l’un d’eux. Second de Hugo Lloris – le Danemark et la Tunisie des Mondiaux s’en souviennent, mais choix de Didier Deschamps, qui l’a eu sous ses ordres plus d’une décennie entre Marseille et la France. Second, c’est aussi le destin de l’OM finaliste de la Ligue Europa en 2018, « le seul petit regret » de sa grande carrière. Depuis qu’il est parti, l’OM n’a d’ailleurs toujours pas battu le PSG en Ligue 1, lui l’a fait deux fois avec Rennes, pour l’ironie.
Tout ça peut rendre fière sa fratrie, qui a imité un oncle gardien de but et qui sera liée à jamais par un nombre infini de crachats dans des gants en mousses. Riffi, Parfait et Over, des gamins-gardiens d’Evreux, Nevers, et Kinshasa, tous prêts à plonger partout, même à Bordeaux, Caen ou au Poiré-sur-Vie. Les trois autres ne font pas la même taille, mais ils cumulent plus de 20 clubs différents, six pays et des années à toucher le chômage, signe que faire rimer carrière et galère a du sens. Reste cette question : qui tirait les penaltys quand ils étaient petits ?
« Un vrai leader » : Deschamps réagit à la retraite de MandandaPar Ulysse Llamas