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Le saut de l’Ange-Yoan Bonny
En moins d’un an, Ange-Yoan Bonny est devenu l’un des attaquants en vogue de la Serie A. Pourtant, le chemin choisi par le nouveau coéquipier de Thuram était sinueux. Après avoir découvert l’élite italienne du côté de Parme, le Français de 22 ans a rejoint l’Inter cet été où il continue sur sa lancée. Avant de toquer à la porte des Bleus ?
On dit souvent que l’herbe est plus verte ailleurs. Pour Ange-Yoan Bonny, c’est sur les pelouses italiennes qu’il a trouvé son paradis. Arrivé en Italie à l’été 2021 dans un relatif anonymat, l’attaquant français s’est depuis imposé comme une référence à son poste en Serie A. Après trois saisons du côté de Parme, l’ancien de Châteauroux a réalisé « son rêve de gosse », comme lui-même le disait, en signant à l’Inter cet été. Chez les derniers finalistes malheureux de la Ligue des champions, Bonny se fait peu à peu sa place, titillant le duo d’attaque Lautaro Martínez-Thuram. « C’est un garçon vraiment pur, qui cherche continuellement à s’améliorer et malgré la concurrence, il ne rechigne pas, travaille et progresse. Il ne voit pas la concurrence comme un problème, mais comme une opportunité de progresser », déclarait en août dernier Cristian Chivu, qui l’a coaché quelques mois à Parme avant de le retrouver à l’Inter.
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Alors que beaucoup doutaient de ce choix de rallier l’Inter après seulement une saison dans l’élite italienne, Antonio Gagliardi est admiratif de la capacité du Français à passer les étapes, sans trembler. « Je pensais qu’il aurait eu besoin de plus de temps, que les débuts allaient être difficiles. Mais il a réussi à parfaitement s’adapter à ce qui est sûrement le plus grand club d’Italie aujourd’hui », souligne son ancien entraîneur adjoint au Parma Calcio. Pourtant, le bonhomme aperçu au stade Gaston-Petit de Châteauroux et celui qui brille à San Siro sont toujours le même, ou presque.
La Berri et Bonny, rendez-vous manqué
31 octobre 2020. Dans un stade Marcel-Picot qui sonne vide (en raison de la pandémie mondiale), Nancy reçoit Châteauroux. Le match ne restera pas dans les annales, on vous l’accorde, entre le 15e et le 16e de Ligue 2. Alors que les Nancéiens viennent de prendre l’avantage par l’intermédiaire de Séga Coulibaly, Nicolas Usaï est la recherche de solution et décide alors de lancer le jeune Ange-Yoan Bonny. Formé à la Berrichonne, celui-ci a alors tout juste 17 ans et connaît ses premières minutes professionnelles. Bien qu’il ne changera pas la physionomie de la rencontre, Bonny franchit une étape clé dans sa carrière, celle de son premier match professionnel. « Quand je suis arrivé à Châteauroux, la direction me disait de suivre avec attention certains jeunes du club, et Ange-Yoan en faisait partie, témoigne Usaï, actuel entraîneur du Pau FC. C’était un talent, mais qui avait ce petit truc en plus que les autres. »
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Par ce petit truc en plus, comprenez : « Au-delà de son talent qui était indéniable, il avait déjà le logiciel du monde professionnel intégré. Il était plus mature que ceux de son âge, c’est-à-dire qu’il assimilait plus facilement ce qu’on lui demandait et surtout, il avait cette intelligence et cette compréhension du jeu. » Le technicien marseillais compte sur Ange-Yoan et décide de lui redonner une demi-heure de jeu lors du match suivant, contre Pau. « Je n’ai qu’un seul regret, c’est ne pas avoir pu l’entraîner plus longtemps », concède-t-il. En effet, à peine ses débuts professionnels passés que Bonny va être mis au placard. La raison ? Un désaccord avec la direction sur les termes d’une possible prolongation. En parallèle, Nicolas Usaï ne passera pas l’hiver, et ses successeurs ne lui accorderont pas une grande confiance. S’il ajoute trois nouveaux matchs et un (joli) premier but en pro contre Rodez, le natif d’Aubervilliers prend une décision radicale : quitter l’Indre pour rejoindre l’Italie. Une destination risquée pour un jeune joueur français de 17 piges.
🔙⏱ 77' | #𝗟𝗕𝗖RAF | 1️⃣-1️⃣ Quand tout va mal, retour aux fondamentaux avec le #CentreDeFormation. L'espoir ne pouvait venir que du "petit" ange 𝗬𝗼𝗮𝗻 𝗕𝗼𝗻𝗻𝘆 ! ⚡ Encore bravo pour ton premier but en @Ligue2BKT Yo' ! 𝙄𝙘𝙚... 🥶 « 𝐌𝐚𝐦𝐚𝐧 ! 𝐌𝐚𝐦𝐚𝐧 ! » ❤ pic.twitter.com/qzntMGnJyY
— La Berrichonne de Châteauroux (@LaBerrichonne) April 21, 2021
Parme, le temps de faire ses armes
À l’été 2021, Ange-Yoan Bonny débarque donc à Parme avec ses maigres 133 minutes disputées en Ligue 2. Un pari risqué aussi bien pour le Francese que pour les Gialloblù. Ce pari risqué, il est l’œuvre d’un certain Massimiliano Notari, alors responsable du scouting de l’écurie d’Émilie-Romagne et qui a un œil avisé sur la France, lui qui a occupé les mêmes fonctions à l’AS Monaco. Explications de celui-ci : « Quand j’ai vu qu’un joueur comme lui évoluait en deuxième division française et qu’il était possible pour Parma de tenter le coup, je n’ai pas réfléchi. J’avais analysé ses quelques matchs pros, mais aussi en jeune. Il avait les qualités et un style de jeu qui pouvaient parfaitement correspondre à l’Italie. » Bien que ce choix s’avère surprenant à première vue, Nicolas Usaï comprend la prise de risque de son ancien poulain : « La logique aurait été qu’il reste en France, c’est sûr, et l’Italie est toujours risquée pour un jeune Français. Mais il a cette intelligence de jeu qui fait que je savais qu’il pourrait réussir et s’adapter. »
C’est un numéro 10 dans le corps d’un numéro 9. C’est important de comprendre ça pour pouvoir analyser Bonny.
Les débuts sont compliqués, son temps de jeu est famélique, si bien qu’Usaï tentera de le faire venir à l’été 2022 à Nîmes, en vain. Au lieu de ça, l’attaquant français accepte sa situation et mange son pain noir. « Je découvrais un nouveau pays et surtout un nouveau football, j’avais besoin de ce temps d’adaptation, confiait-il à La Tribuna. Mais je n’ai jamais douté, ça fait partie du process, cette période d’adaptation était nécessaire. »
Puis l’arrivée sur le banc parmesan d’un certain Fabio Pecchia va tout changer. Sous les ordres de l’ancien adjoint de Rafael Benítez, le Français explose, enchaîne buts et passes décisives, mais surtout s’impose comme un pion essentiel du collectif. Et c’est justement ça, la qualité première de Bonny. « C’est un numéro 10 dans le corps d’un numéro 9. C’est important de comprendre ça pour pouvoir analyser Bonny », insiste Gagliardi. L’ancien analyste vidéo de la Nazionale pendant plus de dix ans et adjoint de Cristian Chivu à Parme ajoute : « C’est un attaquant élégant qui a cette aisance balle au pied, lui permettant de prendre par moments le contrôle du jeu, de dicter les actions par ses dribbles ou ses passes. Il aime décrocher, participer au jeu, mais surtout, il sait le faire. »

Les matchs s’enchaînent, Bonny devient l’une des attractions de la Serie B, puis de la Serie A, à la suite de la promotion du Parma Calcio au printemps 2024. Et cette transition Serie B-Serie A, le Parmigiano la passe sans trembler. « C’est une fierté d’avoir pu entraîner un joueur comme Bonny, c’est indéniable. Pour l’avoir connu, même un petit peu, je ne suis pas surpris de son ascension. Il était programmé pour le haut niveau, il lui fallait peut-être plus de temps que les autres, mais ça prouve son caractère », félicite Nicolas Usaï.
Les Bleus dans le viseur ?
Pour sa première saison dans l’élite, Bonny met tout le monde d’accord. Saison qui se termine par une victoire de prestige lors de la dernière journée sur la pelouse de l’Atalanta (3-2), synonyme de maintien pour les Crociati. Durant ce match, Bonny va sortir le grand jeu. Gagliardi raconte : « Avant chaque match, je lui disais : “Aujourd’hui, tu marques !” Mais il y a eu une période où il ne marquait plus, et il m’a dit : “Arrête de me mettre la pression !” Lors de ce match, on était menés 2-0, on risquait la relégation. Bonny a été super et a offert la passe décisive sur le but du 2-2, celui du maintien. Cristian hésitait à le sortir parce qu’il commençait à fatiguer, mais on a décidé de le laisser, et il nous a offert cette superbe action. C’est une action qu’on avait travaillée à l’entraînement : une passe pour Pellegrino, Bonny décroche comme une deuxième pointe, récupère la remise et donne de l’extérieur à Ondrejka, qui marque. Pour comprendre Bonny, il suffit de regarder ce but. »
37 matchs, 6 buts et 4 passes décisives ont suffi aux dirigeants nerazzurri pour miser sur lui. En rejoignant l’Inter, l’ancien Castelroussin retrouve un certain Cristian Chivu. Mais outre le prestige, ce choix est avant tout cohérent avec ses qualités, comme le souligne Gagliardi : « Il a montré ses qualités quand il joue seul en pointe, mais Bonny est un joueur hybride, encore plus à l’aise lorsqu’il a un autre attaquant à côté de lui. Pourquoi ? Parce qu’il est plus libre, presque comme un numéro 10. À Parme, on jouait avec Pellegrino en pointe fixe et lui dans un rôle plus libre, ce qui lui permettait de décrocher et d’être encore plus influent dans le jeu. C’est pour cela que rejoindre l’Inter, qui joue en 3-5-2, est un choix judicieux de sa part et du club. C’est un mariage parfait. »
Avec les Nerazzurri, l’attaquant prend de l’épaisseur, s’affirme comme une option solide dans la rotation, goûte à quelques titularisations, et s’illustre par ses buts (3), ses passes décisives (5) ou ses matchs énergiques. Alors que l’équipe de France A paraissait encore inatteignable il y a quelques mois (il compte 19 sélections chez les jeunes), Bonny est plus que jamais un prétendant sérieux, avec ou à la place de son coéquipier Marcus Thuram. Et si c’était lui, l’invité surprise du prochain Mondial ? Pour Nicolas Usaï, « ce serait une immense fierté », et il ajoute : « Il a les qualités, et au-delà de ça, j’ai une très grande affection pour la Berrichonne de Châteauroux, donc voir Bonny et Mateta serait fantastique pour ce club. » C’est donc ça, la part de l’Ange ?
Osimhen voit triple avec Galatasaray, l’Inter gagne sans convaincre contre AlmatyPar Tristan Pubert
Propos de Nicolas Usaï, Antonio Gagliardi et Massimiliano Notari recueillis par TP.






















