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Il y a 20 ans, les Bleues découvraient la Coupe du monde

Par Jérémie Baron

Il y a 20 ans, l'équipe de France féminine se qualifiait pour son premier Mondial. Et le paysage du foot féminin en France était alors bien différent.

Equipe FRANCE during a qualifying world cup 2003 match between France and England at Stade Geoffroy Guichard, Saint Etienne, France. Novembre 16th 2002. (Photo by Alain Gadoffre / Onze / Icon Sport)
Equipe FRANCE during a qualifying world cup 2003 match between France and England at Stade Geoffroy Guichard, Saint Etienne, France. Novembre 16th 2002. (Photo by Alain Gadoffre / Onze / Icon Sport)

Dans le biopic de la légende Marinette Pichon projeté dans les salles obscures au mois de juin (Marinette, de Virginie Verrier), on voit l’attaquante se battre tout au long du film pour plus de considération envers l’équipe de France féminine, avant que le long métrage ne se termine par la découverte du très – très – haut niveau, pour Pichon et ses partenaires de sélection, à l’occasion de la Coupe du monde disputée aux États-Unis, en 2003. Un bon aperçu d’où en étaient le foot féminin français et les Bleues, à ce moment-là : à leurs balbutiements. Il y a vingt ans, donc, les Tricolores – qui avaient déjà pris part à deux championnats d’Europe en 1997 et 2001 – n’avaient encore jamais participé à la grande fête mondiale (avec les trois premières éditions manquées, depuis 1991), lorsqu’elles traversèrent l’Atlantique pour rallier le pays de l’Oncle Sam.

Las Ketchup et chaussettes qui puent

Avant ça, il y avait eu une qualification mémorable décrochée en barrages face à l’Angleterre, avec un match retour à Geoffroy-Guichard devant 25 000 personnes, les caméras de Canal+, et avec l’honneur d’être commenté par Monsieur Thierry Gilardi. « C’est un souvenir inoubliable, raconte Sonia Bompastor par téléphone. C’était très rare pour nous de disputer des matchs dans des enceintes masculines. Geoffroy-Guichard, c’est historique, c’est le Chaudron ! Et c’était un match face à notre rival. Tous les éléments étaient réunis pour que ce soit un match mémorable. Énormément de monde s’était déplacé, c’était énorme à l’époque. C’était la première fois, pour moi et une bonne partie des joueuses, qu’on jouait devant autant de public. C’était une vraie réussite. » « Quand on est arrivées au stade, il y avait tellement de bruit que l’on s’est demandé ce qu’il se passait, se souvient de son côté Hoda Lattaf. C’était simplement le public. On n’était pas habituées à ça. »

C’est la plus belle émotion collective de ma carrière internationale.

Marinette Pichon

Grâce à un but de Corinne Diacre (victoire 1-0, comme à l’aller), les Bleues obtiennent donc leur ticket et basculent dans une autre dimension. « C’est la plus belle émotion collective de ma carrière internationale », avouera Pichon. Autre pionnière, Lattaf en gardera également un sacré souvenir : « À la fin du match, on avait fêté la qualif avec eux (les supporters). J’avais pris le micro, on avait chanté et dansé sur l’air des Espagnoles à la mode…“Asereje” de Las Ketchup. On avait fait la chorégraphie ! » Puis viendra l’after, raconté par Bompastor : « On avait bien fêté ça. On était rentrées à l’hôtel, on avait quasiment fait nuit blanche, on avait bien arrosé ça. Il y avait beaucoup d’euphorie. » La performance ressemble presque à un exploit, à une époque où les joueuses de l’équipe de France sont presque livrées à elles-mêmes et où leurs rassemblements ressemblent à des camps scouts : « Si on avait un stage d’une semaine, on s’entraînait du lundi au vendredi avec les mêmes équipements, resitue Bompastor. On avait la même paire de chaussettes, le même short, le même tee-shirt, et c’était nous qui lavions nos affaires dans la chambre si on voulait sentir un peu moins mauvais. Après nos matchs, on nous laissait nos maillots, ce qui était déjà super. On était encore à une époque où lorsque tu étais une femme et que tu voulais faire du football, il fallait trouver un club féminin pour t’accueillir, trouver les infrastructures pour accueillir les clubs féminins, et ça n’était pas simple. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de moyens, pour accompagner les joueuses, mais aussi sur le plan financier. Cette évolution, il fallait qu’elle existe. »

Ingrid Boyeldieu, Ophélie Meilleroux, Ludivine Diguelman, Sonia Bompastor et Hoda Lattaf (Photo by Eric Renard / Onze / Icon Sport)
Ingrid Boyeldieu, Ophélie Meilleroux, Ludivine Diguelman, Sonia Bompastor et Hoda Lattaf (Photo by Eric Renard / Onze / Icon Sport)

Initialement prévu en Chine, le tournoi est délocalisé au dernier moment aux States (déjà hôte en 1999), à cause d’une épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) en Asie. « La compétition a été organisée rapidement et la vente de billets, par rapport à celle qui avait eu lieu en 1999 aux États-Unis, a été très brève, regrette Sandrine Soubeyrand. Du coup, on nous promettait en Chine de nombreux spectateurs, et à la sortie, on a joué dans des stades gigantesques, mais avec très peu de monde. […] Sur l’ambiance, j’étais un petit peu déçue. » « Ça sonnait creux, dit même Bompastor. Mais on avait plutôt l’habitude, ça ne nous a pas trop changées. C’était l’occasion pour nous de disputer cette Coupe du monde dans le pays du football féminin. Là-bas, il y avait peu de barrières, c’était quelque chose d’ancré dans les mentalités. » L’équipe de France arrive gonflée à bloc, mais aussi en ayant bien conscience du défi titanesque qui l’attend, comme l’explique Élodie Woock : « Avant notre entrée en lice, on s’était réunies entre cadres pour se remobiliser. Il y avait Coco (Diacre), Soub’, (Stéphanie) Mugneret. On n’avait pas fait tout ça pour rien. La qualification avait été douloureuse. Derrière, on avait enchaîné une préparation de malade à Clairefontaine, puis Tignes. Il nous tardait que ça commence. »

On a grandi plus tardivement, notre histoire est plus récente.  C’était notre première Coupe du monde, et certains pays étaient plus avancés que nous.

Sonia Bompastor

« L’équipe de France masculine avait aussi fait sa préparation à Tignes avant le Mondial 1998, donc on avait essayé de reproduire le même modèle », sourit Bompastor. À l’occasion du premier match en Coupe du monde de l’histoire de cette sélection, cette dernière chute nettement face à la Norvège (2-0). « À cette époque, il y avait une différence de niveau, poursuit Woock. Techniquement, on pouvait rivaliser, mais physiquement, elles étaient au-dessus, c’était de vraies sportives de haut niveau. On s’est un peu effondrées mentalement. » Constat similaire chez cette même Bompastor : « Quand on compare le football féminin français à celui des autres nations, on a grandi plus tardivement, notre histoire est plus récente.  C’était notre première Coupe du monde, et certains pays étaient plus avancés que nous. Ça a été difficile de performer. » Quatre jours plus tard, les Bleues signent pourtant une belle victoire contre la Corée du Sud (1-0) grâce à une masterclass du dernier rempart Céline Marty et un but de la queen Pichon, auteure par la même occasion du premier pion tricolore dans un Mondial. « Sur un coup franc, le ballon me revient dans les pieds, je suis en rotation, je marque et à ce moment-là, la rage nous envahit, car on reste en vie, mais on sait déjà que derrière, il ne faudra pas se louper », témoigne-t-elle.

Lors du match décisif, c’est le Brésil de Marta – 17 ans à l’époque – qui se dresse face aux filles d’Élisabeth Loisel (l’ex-sélectionneuse, aujourd’hui très controversée). Un choc accouchant d’un match nul (1-1) avec une Pichon buteuse trop tardivement (90e+2) pour espérer un succès synonyme de passage au second tour. « Ce match ne me laisse pas de regrets, car la performance était très bonne. C’est l’un des plus beaux parmi ceux que j’ai dirigés », dira Loisel. Idem chez Bompastor : « On était réalistes. pour une première participation, il y avait des équipes mieux armées que nous. Le parcours était tout de même convenable, mais ça laisse un peu de frustration. Je me souviens du nul face au Brésil comme si c’était une victoire. Les Brésiliennes étaient rompues à cette compétition, elles avaient un effectif vraiment de qualité. Réussir à les accrocher, c’était une mini-victoire. Et le simple fait d’avoir joué la Corée du Sud et le Brésil, en 2003, c’était rare. »

« Le travail instauré depuis vingt ans paie »

Aujourd’hui, la coach de l’OL est ravie d’observer les progrès réalisés par le football féminin français en deux décennies, même si le boulot reste à faire : « Le foot féminin a énormément progressé, à plusieurs niveaux. Dans les infrastructures, au niveau des médias (la D1 n’était pas diffusée à la télévision en 2003, par exemple), dans l’accompagnement auprès des joueuses, sur l’aspect salarial. Parfois, on aimerait que ça aille plus vite. Il y a eu la Coupe du monde 2019 en France, qui nous a permis de montrer qu’on avait du savoir-faire, à la fois au niveau compétition, mais aussi avec beaucoup de monde dans les stades. On n’a pas su surfer sur cette vague comme on aurait pu le faire, malheureusement. Mais depuis un an, la fédération a de nouveau eu une vraie prise de conscience. On est reparti dans la bonne direction, avec l’énergie nécessaire. »

Surtout, bien que les Bleues aient raté le train menant à la World Cup 2007 et n’aient disputé que deux Jeux olympiques sur quatre en vingt ans (2012 et 2016), le coq est désormais un cador dans le foot pratiqué par les femmes. « Au-delà de se qualifier pour les compétitions régulièrement, l’équipe de France n’a pas encore réussi à gagner un titre, mais c’est une équipe qui fait peur aux adversaires, qui est respectée, ce qui n’était pas forcément le cas en 2003, pousse Bompastor. Le savoir-faire aussi en matière de formation en France fait qu’on a une équipe compétitive. Le travail instauré depuis vingt ans paie. » Ne manque plus qu’une Coupe du monde soulevée par Wendie Renard pour valider tout cela.

Par Jérémie Baron

Propos de Sonia Bompastor recueillis par JB, ceux de Sandrine Soubeyrand tirés d'interviewsport.fr et ceux de Marinette Pichon, Hoda Lattaf, Élodie Woock et Élisabeth Loisel tirés de FFF.fr

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