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« Zlatan, c’est le John Carpenter du football »

Propos recueillis par Matthieu Rostac
6 minutes
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D'un côté, Benjamin Rocher, co-réalisateur avec Yannick Dahan de La Horde, film de zombies balieusard cradingue. De l'autre, Thierry Poiraud, auteur avec son frère Didier de l'OVNI bis-pop Atomik Circus, le retour de James Bataille. Au milieu, Raphaël Rocher, frère de et producteur de Capture [The Flag] Films. Cette année, les trois compères ont tourné Goal of the Dead, qui réunit de façon improbable les univers du foot et des zombies. Même si la sortie du film est prevue pour début 2014, ces derniers confient certains secrets de tournage, entre deux avis bien tranchés sur le ballon rond.

Pourquoi avoir choisi le foot comme postulat du film ?Raphaël : Parce que même si c’est en train de changer cette année, ça reste un univers très peu exploité au cinema. Quand on a commencé à développer, c’était en plein dans les emmerdes du PSG avant-Qatari et on trouvait que c’était un univers de comédie assez bon. On aimait bien cette idée que des mecs connus, pas équipés pour survivre se retrouvent face à des zombies. Pour te dire le fond de l’histoire, on avait vu Dead Set. C’est Loft Story, sauf que les derniers mecs au courant que c’est la fin du monde sont ceux qui sont enfermés. On s’est dit « et si on mettait du foot à la place ? » .

Le pitch de votre film ressemble à s’y méprendre à À Mort l’arbitre, sauf qu’ici les joueurs sont à la place de l’arbitre et les supporters vraiment enragés. C’est une volonté ?Thierry : Je ne sais pas si c’est une volonté. Mais le rapport qu’avait Mocky avec la bourgeoisie des villages, on retrouve ça dans le film. Les gens du village avec des idées arrêtés, les joueurs de Paris aussi. Tu ne sais pas qui est le bon, qui a raison. Il y a autant cette filiation sur le foot que sur cette thématique.Benjamin : Certains films de foot nous ont quand même marqué ! À Mort l’arbitre, oui, Coup de tête aussi, qui sont des sortes de westerns contemporains dans un cadre du football super bien exploité. Le foot qui est finalement une sorte de névrose collective où les gens sur-réagissent aux résultats. Ça paraît tout indiqué pour être une fin du monde. Je ne suis pas du tout calé en foot mais justement, le fait d’avoir le recul nécessaire sur cette frénésie, cette folie autour du football, ça m’intéresse en tant que ressort comique mais aussi dramatique.

Donc les footballeurs sont les cowboys des temps modernes, c’est ça ?Benjamin : Pas des cowboys, plus des anti-héros. C’est des gens très visibles dans les médias, on voit leurs gueules partout, ce sont des beaux gosses, ils sont super bien payés, ils ont les meilleures meufs, les meilleures voitures… Et ce qui est marrant, c’est que ce sont des gens inadaptés à la « vraie vie » . Déjà, le flic ou le mec du GIGN est moyennement armé pour lutter contre une invasion zombiesque. En plus, si on a des footballeurs qui sont plus habitués à se faire photographier en slip… Quand tu fais un film fantastique, surtout sur le ton de la comédie, tu te dis « qui est la pire personne pour faire face à ça? » . C’est peut-être un footballeur.

Les supporters se transforment en enragés, vous considérez les footballeurs comme assistés. Vous êtes pas tendres avec le foot, quand meme…Thierry : Non non, ils ne sont pas tous comme ça! Tu verras, dans le film, on a des ultras qui s’avèrent plus cools qu’on ne le pense, des familles qui deviennent des enragés. Benjamin : Ce qui est intéressant, c’est de partir avec un personage en se disant qu’il est le roi des cons et que finalement, il se rachète. Faut qu’il y ait un parcours humain dans le film.Thierry : C’est toujours très dur d’ancrer le genre du film fantastique en France, de s’écarter du côté américain et pour moi, le football fait tellement partie de l’entité française, je trouvais ça super intelligent de remettre le fantastique dans un cadre très français. Pas dans une forêt, je ne sais pas où, pas dans un truc qui ressemblerait aux États-Unis. Et ce, sans cynisme.

En tant que réalisateurs et producteur, comment vous expliquer que la majorité des films de foot soient pas terribles?Benjamin : Attends, Damned United, ur l’entraîneur de Leeds (Brian Clough), c’est vachement bien, par exemple.. Shaolin Soccer, c’est super aussi!

Ouais, mais c’est très loin du football.Benjamin : C’est pareil pour tous les sports. Le football américain, t’as combien de films de merde pour avoir un film bien d’Oliver Stone (L’Enfer du dimanche) ?Thierry : Dans les films de boxe, il ya un côté très photogénique donc tu peux raconter une histoire. Le foot, malgré tout, on n’a pas trouvé le système. C’est des bonshommes qui s’arrêtent tout le temps, les actions sont belles mais elles sont longues. Donc en termes de dramaturgie, dans une écriture de cinéma, ce n’est pas le sport le plus pratique. Même les docus, comme celui sur Zidane (Zidane, un portrait du XXIe siècle) qui est génial, parfois c’est un peu long. C’est bien sur des tensions, des personnages, des gros plans. Après, les actions en elles-même…Benjamin : Damned United, ce qui est intéressant, c’est que tu suis l’entraîneur. Les matchs, tu les vois très peu. Tu t’intéresses à ce qui se passe derrière, les relations avec ses joueurs donc t’as un angle et le foot, ça reste un cadre.

Puisque l’Olympique de Paris, l’équipe que l’on suit dans le film, est celle d’avant les Qataris et qu’elle se déplace dans le Nord, est-ce qu’on verra dans les travées une banderole « pédophiles, chômeurs, consanguins… Zombies » ?
Raphaël : Il y a l’équivalent. Il y a des petites références à ça !

Techniquement, quand on est un joueur de foot et qu’il y a un envahissement de terrain par des zombies, comment on s’en sort ?Thierry : Ça dépend. Si tu as de très grandes jambes, que tu cours très vite, c’est mieux. Mais ils ont pas forcément développé la logique de survie en équipe.Benjamin : En fait, ils vont réapprendre à vivre ensemble dans cette fin du monde. Il est jamais trop tard pour apprendre…

Les zombies, comme les supporters, ont un certain instinct grégaire : est-ce que vous allez faire chanter les zombies ?Raphaël : On va très vite se rendre compte que nos enragés ne sont pas insensibles au ballon.

Un peu comme dans Le Jour des morts-vivants quand le zombie apprend ?Benjamin : Il y a même un petit côté Land of the Dead. L’idée, c’est qu’on ait des hyper supporters, comme si c’était une maladie. Comme si les zombies, au lieu de vouloir bouffer de la cervelle, voulaient bouffer du ballon. Toute la menace fantastique est très footo-centré.

Votre film est en réalité deux films, articulés en deux mi-temps. Qu’est-ce qu’on aura à la mi-temps ? Des bandes-annonces grindhouse ? Des résumés des autres équipes qui se sont faites bouffer ?Thierry : Quand t’es spectateur de foot, à la mi-temps, tu vas faire quoi ?

On va boire une bière.Thierry : Ben pareil.Raphaël : À mon avis, au cinéma, il faut que ce soit une expérience de stade donc on ira boire de la bière et à la télé, ce sera une expérience de télé, donc on aura des bandes-annonces. Il faut aller au bout de ça.

Quel est le joueur qui représenterait le mieux le film de zombie dans le foot actuel ?Thierry : Zlatan. Il est drôle à regarder. En termes de spectacle, il est bien. Je le trouve improbable physiquement. Il est très impressionnant en matière de photogénie de film.Benjamin : Et puis c’est un sacré personnage ! Dans sa posture, sa façon de se mettre en valeur, c’est un personnage de comédie, on pourrait faire un film rien que sur lui.Thierry : Mais plutôt dans l’esprit série B, justement. C’est le John Carpenter du football.

Ou un mec de la Shaw Brothers, vu qu’il fait des arts martiaux.Benjamin : En plus, la queue de cheval, ça donne un petit côté Steven Seagal.

Plus sérieusement, plutôt que Goal of the Dead, vous n’auriez pas pu appeler votre film Mort subite ?Benjamin : On a Marque ou crève, aussi.

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Propos recueillis par Matthieu Rostac

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