Passation de pouvoir
A la question « Messi a-t-il d'ores et déjà dépassé Maradona ? » , l'opinion reste divisée, mais semble plus que jamais disposée à donner ses faveurs au Rosarino. Sa modestie séduit une population rompue aux crises de mégalomanie de Maradona, « un génie avec le ballon, qui se croit bon en tout... » , note une mère de famille. Si ce dernier s'accroche, « l'âge de Messi joue en sa faveur » considère un vieux fleuriste de la rue Florida, dans le centre-ville porteño. Combien de tentatives lui reste-t-il pour remporter le Mondial et tenter de clore définitivement le débat ? Une, deux ? Car la rengaine est souvent la même pour les partisans d'El Pibe de Oro : « Il a gagné la Coupe du monde » , presque tout seul, s'entend. Un des passants prétend détenir la recette idéale : « Pour faire un Maradona, tu prends le meilleur de Messi, le meilleur de Riquelme et le meilleur de Tévez. Enfin, même avec tout ça, je ne sais pas si tu fais un Maradona... » . « Plus complet » , « le meilleur de tous les temps » , un joueur qui « a tout gagné seul, aux côtés de morts... » , sont quelques-uns des commentaires qui reviennent dans la bouche des inconditionnels de Pelusa. Et sur la toile ? Le site Internet de La Nacion révèle que plus de 60% des lecteurs du principal quotidien argentin estiment que Messi est meilleur que son aîné.
Deux chances pour une Coupe du monde
Guillermo Tofoni, agent argentin de la Fifa, fait aussi partie de ceux-là, lui qui déclare que « Messi sera plus grand que Maradona et Pelé réunis » . Même son de cloche du côté de la Fédération, depuis laquelle Julio Grondona assure que « Messi est plus grand que Pelé, Maradona, Di Stefano et Cruyff » . Bien sûr, il y a toujours les fidèles maradoniens qui insistent sur les performances d'un joueur hors-norme qui s'en alla conquérir deux Scudetti et une Coupe de l'UEFA dans une équipe taillée pour le milieu de tableau, face à la Juve de Platini et au Milan conduit par Arrigo Sacchi. Ces mêmes résistants qui rappellent que si les règles du Ballon d'Or avaient été changées avant 1995, Maradona n'aurait fait qu'une bouchée d'Igor Belanov en 1986, qu'il aurait fait trembler Platoche, qui trusta le trophée de 1983 à 1985, et les Milano-Hollandais (Gullit et Van Basten), qui s'adjugèrent confortablement le titre dans les années qui suivirent. Ceux qui soulignent que Burruchaga, Valdano et compagnie n'auraient jamais pu imaginer toucher du doigt la Coupe du monde sans le talent de leur leader technique et mental. Au-delà de l'interminable débat, le Ballon d'Or si polémique de Messi, a provoqué en Argentine une levée de bouclier. “Leur” Messi mérite amplement cette nouvelle distinction. Après tout, qu'importe si l'élève a dépassé le maître ? Car quelles que soient les préférences, les Argentins sont désormais persuadés d'une chose : le meilleur joueur de l'histoire est bien des leurs.
Alejandro Carbone, à Buenos Aires
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