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Matty Cash, ascension express à Aston Villa d’un latéral reconverti

Par Quentin Ballue
7 minutes
Matty Cash, ascension express à Aston Villa d’un latéral reconverti

En 2019, Matty Cash évoluait encore en tant qu’ailier. Jusqu’à ce que Sabri Lamouchi le positionne comme latéral, poste où le joueur de 23 ans se révèle pour le moins brillant. Encore plus depuis qu’il a rejoint la Premier League, en septembre. Portrait d’un garçon aussi villan sur le terrain que gentil en dehors.

Un petit point. Voilà à quoi s’est joué le maintien d’Aston Villa en Premier League, la saison passée. Relégable pendant près de la moitié de la saison et dix-neuvième à deux journées de la fin, le club de Birmingham s’est extirpé in extremis de la charrette grâce à une victoire 1-0 contre Arsenal puis un nul 1-1 sur la pelouse de West Ham. Un sauvetage digne du TFC de Pascal Dupraz qui a fait l’effet d’un électrochoc, puisque Villa est l’une des bonnes surprises de la saison (troisième meilleure défense du royaume), malgré un net ralentissement comptable depuis le 1er janvier. Une équipe qui s’est payé le luxe d’humilier Liverpool, de battre deux fois Arsenal, de s’imposer à Leicester et de neutraliser Chelsea. Tout ça grâce à la qualité d’éléments tels que le capitaine Jack Grealish, ainsi que de jolis coups estivaux : l’ange gardien Emiliano Martínez et le buteur Ollie Watkins, évidemment, mais aussi le plus discret Matty Cash. Et ce n’est pas Cafu, jamais avare de compliments sur le poids des latéraux, qui dira le contraire.

Comme papa

Tout le monde essaye d’imiter papa. Matty Cash l’a fait, et même plus que ça, en arrivant jusqu’en Premier League. Mais le natif du Berkshire a dû s’écarter malgré lui de la voie paternelle à l’âge de quinze ans, quand il fut lâché par les Wycombe Wanderers où son père Stuart a joué dans les nineties. Le rejeton atterrit alors à la FAB Academy de Bisham, qui offre leur chance aux jeunes écartés par les clubs pros. Seize mois durant, il tape le ballon la semaine et bosse le week-end dans un magasin de jouets pour gagner un peu d’argent en vendant des pistolets Nerf. Jusqu’à ce que Nottingham Forest le repère, et qu’il signe avec les Reds. Comme Daddy, une vingtaine d’années plus tôt.

Entraîneur au sein de cette Academy, Nas Bashir a vu le kid mûrir : « Je me rappelle un tournoi du début, il avait été l’un de nos plus mauvais joueurs. Il forçait trop. On lui a dit : « Tu dois simplifier ton jeu, ne cherche pas ce qui est le plus dur à faire sur le terrain et regarde d’abord ce qui est le plus simple. » Il avait besoin de travailler sa prise de décision, son positionnement. Il l’a fait, et son jeu a progressé, c’est pourquoi Nottingham Forest l’a sélectionné. Nous avons organisé un match de pré-saison avec les U20 de Nottingham Forest, dont le coach Jimmy Gilligan est un ami. Matty ne devait même pas jouer, il avait 17 ans et il était trop jeune ! Il regardait la rencontre, nous avons eu des blessés… Et à trente minutes de la fin, je lui ai dit d’aller se changer. Il a joué la dernière demi-heure, et nous avons perdu, mais il avait bien performé. Après le match, Jimmy m’a demandé : « Qui était ce jeune au milieu ? Est-ce qu’on peut l’avoir pour un essai, la semaine prochaine ? » Matty y est allé, il n’est jamais revenu ! »

Le sport, une évidence

Un père latéral gauche puis coach, mais aussi un frère qui a joué au niveau amateur avant de monter sa propre Academy et une sœur golfeuse : all-in sur le sport, chez les Cash. « Je me souviens d’une famille sportive, attachante et proche de lui. Tout ça est un environnement sain, propice à l’évolution d’un jeune joueur, glisse Sabri Lamouchi, son entraîneur à Forest entre 2019 et 2020. C’est un garçon bien entouré, concentré sur son métier et heureux. C’est un cadeau d’avoir un joueur comme lui sous ses ordres. Quand vous avez quelqu’un qui a envie de travailler, de progresser, d’écouter, d’apprendre et de vous croire, les résultats arrivent vite. Ça a été le cas avec lui. »

Prêté du côté de Dagenham & Redbridge (League Two) en 2016, Matty Cash se fracture le tibia peu après son retour à Nottingham. Un manque de bol qui, cependant, ne le fait pas disparaître des radars. Le propriétaire de Forest monte même au créneau, à l’automne, pour répondre aux rumeurs d’un intérêt de Chelsea. Quelques semaines plus tard, malgré la toute petite dizaine de matchs de Championship au compteur du joueur, le Guardian rapporte une offre de sept millions d’euros en provenance du RB Leipzig. Aston Villa raflera finalement la mise en septembre 2020, pour un chèque deux fois plus élevé. Papa a de quoi être fier.

Piqué par Lamouchi

Victime d’une blessure à la cheville en juillet 2017, le jeune joueur doit attendre l’exercice 2018-2019 pour connaître sa première saison pleine. Une réussite puisqu’il plante huit buts, ce qui en fait le troisième meilleur réalisateur du club derrière Lewis Grabban et Joe Lolley. C’est toutefois plus bas que Sabri Lamouchi le replace, à partir de l’été 2019. « J’avais travaillé sur l’équipe en amont, il me faisait énormément penser à Serge Aurier, raconte l’ancien sélectionneur de la Côte d’Ivoire. J’estimais que vu ses qualités physiques et son potentiel pour amener le danger de derrière, ça pouvait être un atout. En rencontrant les dirigeants, je leur ai de suite parlé de cette possibilité. Ils ont été surpris, tout comme ils ont été agréablement surpris en fin de saison d’avoir autant de sollicitations et de l’avoir vendu au prix auquel ils l’ont vendu. Mais ça n’a pas été sans travail : défensivement, bien entendu, il a fallu insister un peu plus et lui expliquer ce qu’on voulait ou ce qu’on ne voulait pas. On a perdu notre premier match, mais il a été brillantissime. Il marque le premier but, sa saison était lancée. Il a été le meilleur arrière droit du championnat, cette année-là. »

Et le meilleur joueur de son club d’après les fans, qui l’ont plébiscité au détriment de Lewis Grabban (premier Red à atteindre la barre des vingt pions en championnat, depuis 2002-2003). Pas de quoi, toutefois, effacer l’énorme frustration collective de laisser les play-offs s’échapper à la différence de buts. Le douloureux prix à payer d’une incapacité à remporter le moindre de ses six derniers matchs, dont trois sans un Matty Cash blessé à l’aine. Forest n’a d’ailleurs gagné aucune des cinq rencontres que son latéral n’a pas disputées, en 2019-2020. « Pas un hasard », pour Sabri Lamouchi : « Son esprit compétiteur, son amour pour le club faisait qu’il prenait du volume et de l’importance dans notre équipe. C’est quelqu’un de très positif, très agréable. Il ne fait jamais la tête, veut toujours travailler et est toujours à 100%. C’est juste un régal, c’est pour des garçons comme ça qu’on est content de faire ce métier-là. »

Le haut du panier… pour longtemps ?

La Cash-dépendance s’est, depuis, exportée du côté d’Aston Villa : l’équipe tourne à 1,7 point par match avec lui, un rythme qui pourrait permettre de titiller l’Europe. La moyenne chute à 1 point par rencontre quand il ne joue pas. « Le nouveau Cafu », carrément, selon son ancien coéquipier Michael Dawson. L’enfant de Slough n’en est pas encore là, mais sa vision du jeu et ses qualités athlétiques font des merveilles : 2,3 interceptions et 2,7 tacles par match de Premier League, cette saison. À titre de comparaison, Aaron Wan-Bissaka affiche 1,7 interception et 2,9 tacles par rencontre, alors que João Cancelo atteint 1,5 interception et 2,3 tacles. Le haut du panier, donc.

« C’est un joueur capable de sprinter, rarement pris à défaut. Il a une puissance et un très bon jump, son volume de jeu peut lui permettre de faire des allers-retours dans son couloir ou d’apporter le danger du deuxième rideau. Ce n’est pas négligeable, on n’a pas fini d’en parler, assure Lamouchi. C’est le profil idéal du garçon qui s’adapte partout parce qu’il est heureux d’être footballeur et conscient de sa chance, il veut savourer. C’est le latéral de demain, qui comptera probablement en Premier League et en équipe nationale d’Angleterre. » Sur le flanc pendant un mois, l’intéressé a retrouvé le terrain juste avant la trêve. Tant mieux, car avec le triste bilan des dernières semaines, Villa a besoin de Cash pour équilibrer les comptes.

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Par Quentin Ballue

Tous propos recueillis par QB

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