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L’Italie reprend la main
On le dit malade, pas compétitif, presque en état de mort clinique. Délaissé par les meilleurs joueurs et les garants financiers. Et pourtant, une semaine européénne parfaite plus tard, le championnat d'Italie s'est refait la cerise. Qui a osé parler de déclin ?
Et soudain, le roi italien déchu reprit les armes et reforma son armée. Une armée qui n’en menait pas franchement large d’ailleurs avec un zèbre, une louve, un âne, un serpent, un taureau et une fleur de lys pour seules ouailles sur les fronts européens. D’accord, on est loin de l’arche de Noé pour traverser le déluge. Et pourtant, la première bataille a été remportée sans même une perte à déplorer. Au terme d’une soirée folle, de Bilbao à Rotterdam, en n’oubliant pas de s’assurer sa suprématie sur ses terres de Naples à Milan en passant par Florence, la majesté italienne s’est relevée. Qui aurait misé sur les six victoires cumulées cette semaine par la Juventus, la Roma, le Napoli, l’Inter, le Torino et la Fiorentina ? Sans doute personne. Qui croyait vraiment à la qualification en huitièmes de finale de Ligue Europa des cinq clubs italiens en première ligne des seizièmes ? Pas grand monde de plus. Mais malgré le scepticisme général, et une actualité rongée par les polémiques alimentées par l’ancien général Sacchi ou par la disparition annoncée de l’ancien vaillant soldat parmesan, la Botte a fait le premier pas pour retrouver sa splendeur. La vérité du terrain a parlé.
Le sens de la débrouille
Bien sûr, se satisfaire de qualifications en huitièmes de finale de Ligue Europa, de clubs autrefois capables de remporter la compétition 8 fois en 11 éditions (de 89 à 99) peut surprendre. Mais l’essentiel n’est pas là. À force de ne voir que les mauvais côtés du Calcio, on en a oublié ses forces. On dit qu’il faut se méfier de l’eau qui dort. L’Italie l’a confirmé. Ces victoires européennes servent aussi de réponses à ceux qui tirent constamment sur l’ambulance. Oui, les clubs italiens n’ont plus d’argent, mais ils n’ont en revanche pas perdu leurs idées. Quoi qu’on en dise, l’Italie reste et restera toujours une formidable terre de football, un bastion même de la culture du ballon rond. Même pas besoin de transferts aux sommes mirobolantes pour faire la différence. Demandez au Torino et à Maxi López, recruté pour 400 000 euros cet hiver, trois fois buteur lors des deux confrontations contre Bilbao. Ou à Mohamed Salah, quasiment contraint de rejoindre la Fiorentina pour que le deal amenant Cuadrado à Chelsea soit conclu. Des idées, les entraîneurs de Serie A n’en manquent pas non plus. Les meilleurs tacticiens sont toujours présents. Que ce soit Massimiliano Allegri qui gère parfaitement la succession d’Antonio Conte, Vicenzo Montella qui s’éclate depuis deux saisons et demie avec la Fiorentina ou Roberto Mancini, revenu donner ses lettres de noblesse à l’Inter. Signe d’un football qui attire encore, où même les entraîneurs étrangers sont venus trouver fortune, comme Rudi Garcia ou Rafael Benítez. Un football qui n’avait finalement besoin que de remettre les mains dans le cambouis et de retrouver l’humilité que symbolise si bien le Granata Giampiero Ventura.
Une histoire de perception
Tout n’est finalement qu’affaire de points de vue et d’opinions personnelles. Le monde n’arrive déjà pas à se mettre d’accord sur la couleur d’une robe, pourquoi le ferait-il au sujet de la Serie A ? Quand bien même Cristina Cordula donnerait son avis sur la question, ce serait très insuffisant pour clore les débats et établir un classement incontestable des championnats. C’est simplement impossible comme le confirment les actuels déboires européens des clubs de Premier League, pourtant considéré à bien des égards comme la meilleure compétition du monde. Les vendeurs de rêve pourront toujours jouer leur rôle, le pré vert reste, lui, bien insensible à ces couleuvres. À chacun sa sensibilité, aussi bien aux longueurs d’ondes de la lumière qu’aux beautés footballistiques propres à chaque pays. Personne ne voit ainsi un tableau identique, même si les coefficients UEFA sont là pour rappeler à tous l’indéniable réalité mathématique. Une réalité où l’Italie est aujourd’hui bloquée à la quatrième position mondiale derrière un trio de tête (Espagne-Angleterre-Allemagne) trop en avance pour espérer l’inquiéter et devant une foule de poursuivants pas franchement menaçante. Photographie de l’instant en revanche, l’Italie est la nation à avoir enregistré le plus de points cette saison derrière l’Espagne. De quoi envisager un avenir meilleur et un vrai retour sur le devant de la scène. Les prochains rendez-vous serviront d’ailleurs de premiers éléments de réponses et si la difficulté promet d’être autrement plus relevée, la Botte est prête pour la traversée des marécages. L’Italie le sait bien, elle a gagné une bataille, mais pas encore la guerre.
Par Eric Marinelli