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Ian P. Griffin : « Ødegaard ferait un astronome de classe mondiale »

Propos recueillis par Gad Messika
7 minutes
Ian P. Griffin : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Ødegaard ferait un astronome de classe mondiale<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Des découvertes astronomiques vertigineuses et Arsenal au top du classement de Premier League. Deux choses qui datent d’un autre temps. Ian P. Griffin, lui, s’y connaît dans les deux disciplines. Interview lunaire.

Comment êtes-vous devenu fan d’Arsenal ? J’avais cinq ans, et Arsenal remportait la FA Cup 1971. À l’époque, c’était l’un des rares matchs diffusés en direct à la télé. Je me souviens de Charlie George marquer et m’être dit : « Ouah ! »

Vous souvenez-vous de votre première fois à Highbury ?Mon père, qui n’aimait pas le football, m’y a emmené pour mes onze ans. C’était en 1977, et Arsenal a battu Norwich 1-0. De mémoire, le temps était dégueulasse, et mon père voulait se barrer avant la fin du match. En y réfléchissant, le livre Fever Pitch (autobiographie de Nick Hornby sortie en 1992, NDLR) reflète beaucoup mes propres expériences en tant que fan.

Quelles sont vos plus beaux souvenirs au stade ?C’est surtout la sensation de se tenir dans une ÉNORME foule et aussi l’humour des supporters. Si certains chants peuvent être grossiers ou offensants, il arrive que d’autres soient vraiment drôles. Je me souviens d’un Arsenal-Chelsea, peu après qu’une baleine a été vue dans la Tamise. Les supporters d’Arsenal se sont mis à chanter : « J’ai vu Frank Lampard remonter la Tamise. »

À quoi ressemblait l’Angleterre durant votre enfance (il est né en 1966, NDLR) ?
J’ai grandi dans une cité HLM du sud de Londres, mon père conduisait des bus, et ma mère travaillait dans un supermarché. Même si nous n’étions pas riches, nous savions comment nous amuser. Le Londres des 70-80s n’était pas celui des 60s. C’était l’époque de la crise pétrolière, de la semaine de trois jours, des grèves et de Margaret Thatcher. Lorsque j’ai étudié l’astronomie, j’ai pu m’éloigner de ma banlieue sud et vivre dans le centre de Londres. Je pouvais aller dans des musées et à des tas de concerts. Je me souviens encore d’avoir vu Blondie, the Clash, U2 et d’autres groupes se produire dans des petits clubs lors de nuits folles !

Comment est née cette passion pour l’astronomie ?Au début des années 1970, je regardais les derniers alunissages. Après une visite au planétarium de Londres, je suis devenu obsédé par le ciel nocturne et les planètes. Pendant mes études, j’ai pu utiliser des télescopes dans le monde entier : Hawaï, Chili, Las Palmas, Afrique du Sud et Australie… Je n’étais jamais monté dans un avion avant de commencer mon doctorat. À la fin de mes études, j’avais visité tous les continents, sauf l’Antarctique.

Pour quelqu’un qui a grandi avec des managers anglais qui n’étaient pas plus que des rustres sans éducation, c’était génial de voir un coach intellectuel comme Arsène Wenger diriger une équipe avec intelligence et style.

Vous avez nommé plusieurs astéroïdes par le nom de votre femme, de vos enfants et de Bruce Springsteen… Et en 1998, (33179) est devenu « ArseneWenger » , était-ce une évidence pour vous ?Au début des années 2000, j’ai utilisé un petit téléscope pour suivre la position d’astéroïdes qui pourraient, dans le futur, frapper la Terre. Lorsque je prenais des photos de ces astéroïdes, il arrivait qu’un nouvel objet apparaisse dans le même champ de vision et que mes images soient les premières d’un astéroïde. Cela me donnait le privilège de suggérer des noms pour ces nouveaux astéroïdes à l’Union astronomique internationale. Après en avoir nommé certains pour mes proches, j’ai décidé de donner les noms de personnes que j’admire. C’est ainsi que (23990) Springsteen et (33179) ArseneWenger ont été nommés.

Quelle est la chose la plus mémorable de la saison 2003-2004 des « Invincibles » d’Arsenal ?C’était la joie pure de savoir que cela n’avait jamais été fait auparavant en Premier League. Le fait que cela n’ait pas été fait depuis, malgré tout l’argent dépensé par certaines équipes, montre à quel point c’était difficile à réaliser. C’est un véritable exploit. Pour quelqu’un qui a grandi avec des managers anglais qui n’étaient pas plus que des rustres sans éducation, c’était génial de voir un coach intellectuel diriger une équipe avec intelligence et style.

Cette année, les Gunners brillent en Premier League, à quoi est dû ce changement ?
Je pense qu’Arteta a mûri en tant que coach et que l’équipe aussi. Elle a manifestement tiré des leçons de la saison dernière. Nous avons aussi recruté d’excellents joueurs pour compléter les joueurs locaux comme Saka et Smith-Rowe. Mon préféré dans l’équipe actuelle est Aaron Ramsdale, qui a un très bon caractère. J’ai bon espoir pour cette saison. En tout cas, avant qu’Arsenal n’aille à Tottenham et qu’on joue Manchester City encore deux fois. Avoir cinq points d’avance est quelque chose qui m’aurait fait bondir en début de saison, mais les fans d’Arsenal ont connu plus de vingt ans de déception, lorsqu’il s’agit de course au titre. Je crois qu’il y a une expression qui est beaucoup utilisée dans la série télévisée Ted Lasso : « C’est l’espoir qui vous tue » et c’est tellement vrai.

Qu’est-ce qu’il a manqué au club durant tout ce temps ?On a toujours eu des joueurs de grande classe, mais nous n’avons pas eu une équipe capable d’enchaîner les résultats. Cette année, jusqu’à présent, nous avons démontré que nous pouvions revenir après avoir été menés, ce qui n’était pas toujours le cas. Nous avons une bonne équipe, mais elle semble encore un peu mince. J’espère que nous aurons quelques recrues. Ce serait bien d’avoir quelques remplaçants sur le banc qui peuvent entrer et changer un match.

J’échangerais mon télescope contre un titre de champion des Gunners en Premier League.

Que pensez-vous de Martin Ødegaard et de son rôle de numéro 10 ?Ødegaard est une merveilleuse recrue pour cette équipe. Après avoir observé ses talents de passeur, je parierais qu’il a une superbe compréhension de la physique et de la gravité. S’il abandonne un jour le football, il ferait probablement un astronome de classe mondiale. Malheureusement, les salaires ne sont pas les mêmes, alors il devrait accepter une réduction de salaire !

Vous êtes né en 1966, une belle année pour l’Angleterre. Comment expliquez-vous le fait que vous n’avez rien gagné depuis ? C’est ridicule qu’en dépit de tous les grands joueurs qui ont représenté l’Angleterre au fil des ans, la dernière fois que ma nation a gagné la Coupe du monde, c’était quand j’avais six mois. J’ai maintenant 57 ans ! Il y a quelques années, je suis devenu citoyen néo-zélandais et j’ai donc deux chances qu’une équipe nationale que je soutiens gagne la Coupe du monde !

Préférez-vous découvrir une planète incroyable ou qu’Arsenal gagne la Ligue des champions ? Sans même parler de la Ligue des champions, j’échangerais mon télescope contre un titre de champions des Gunners en Premier League !

Est-ce qu’on peut apercevoir le melon de Cristiano Ronaldo depuis l’espace ?Il n’est pas nécessaire d’être dans l’espace pour voir l’ego de Ronaldo. J’ai entendu une rumeur selon laquelle, lorsqu’il est invité à un événement, son ego entre dans la pièce au moins une heure avant lui ! (Rires.)

Comment expliqueriez-vous le télescope James Webb, qui révolutionne l’astronomie depuis juillet 2022 ?Le télescope Webb est une machine extraordinaire conçue pour étudier l’univers, des confins du cosmos aux planètes de notre propre système solaire. Avec un miroir dont le diamètre est presque trois fois supérieur à celui du télescope Hubble et une durée de vie prévue de plus d’une décennie.

Saviez-vous que d’autres astéroïdes portaient des noms de footballeurs comme Cruyff, Ballack, Puskás ?C’est formidable que les astronomes du monde entier honorent leurs héros de cette manière. Pourquoi devrions-nous avoir seulement des artistes et des scientifiques reconnus dans les cieux ? Certains des footballeurs cités ont donné une joie immense à des millions de personnes qui admirent le beau jeu. Compte tenu de son récent décès, il est peut-être temps de donner le nom de Pelé à un astéroïde.

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