- Italie
- Serie A
- 7e journée
- Sampdoria/Inter
Zenga/Inter et Mancini/Samp, amours interdites
Ils sont tous les deux amoureux de la compagne de l'autre. Mais c'est bien en tant qu'entraîneur respectif de la Sampdoria et de l'Inter que Walter Zenga et Roberto Mancini se retrouveront ce dimanche après-midi. Avec sans doute un étrange sentiment au plus profond de leur cœur.
L’un est une légende de la Sampdoria, son joueur le plus capé (566 matchs) et même son meilleur buteur (173 buts). L’autre est un mythique gardien de l’Inter, et également son portier le plus capé (473 matchs). Pourtant, Roberto Mancini et Walter Zenga ne seront pas à la tête de leur grand amour ce dimanche. Un amour même inscrit jusque dans la chair. Avec un biscione (la sorte de serpent symbole de l’Inter) tatoué sur la jambe droite pour Zenga, et le symbole des Ultras Tito Cucchiaroni tatoué sur le mollet droit pour Mancini. Non, les deux techniciens italiens et ex-coéquipiers en Nazionale et à la Samp de 94 à 96 prendront place sur le banc d’en face. Celui de l’adversaire. Comme un rectangle amoureux bien tortueux où deux amis afficheraient allégrement leur attirance pour la compagne de l’autre. Zenga et Mancini ayant maintes fois affiché leur volonté d’entraîner un jour l’Inter et la Samp. Mais les connexions amoureuses autrefois rompues n’ont jamais trouvé les bons ingrédients pour être rétablies. Résultat, Roberto et Walter se contentent de voir leur amour dans les bras de l’autre, et vice-versa. En attendant l’échange ? Pas sûr.
Bobby Gol
À la Sampdoria, le statut de légende de Roberto Mancini ne souffre aucune contestation. Débarqué en 1982 de Bologne contre 4 milliards de lire (un peu plus de 2 millions d’euros, mais une somme énorme à cette époque), le natif de Jesi dans les Marches a fait l’histoire avec la Samp. Cette Sampd’oro comme on la surnomme aujourd’hui. C’est simple, mis à part le championnat de Serie B 1967, Mancini a été de tous les titres de l’histoire de la Sampdoria. À savoir quatre Coupes d’Italie, une Supercoupe d’Italie, une Coupe des coupes, et bien évidemment le Scudetto de 1991. Le véritable apogée du groupe de Vujadin Boškov porté par les fameux « jumeaux du but » : Mancini et son grand ami Gianluca Vialli. L’aventure ira même jusqu’en finale de Ligue des champions l’année suivante, mais la Samp sera défaite en prolongation par le Barça. Ce que Mancini a toujours considéré comme le plus grand regret de sa carrière.
L’idolâtré Bobby Gol poursuivra pourtant sa carrière avec les Blucerchiati jusqu’en 1997 portant son total à 173 pions en 15 saisons. Moment où, la mort dans l’âme, il se résout à quitter son grand amour. Nous sommes fin mai 1997, et le Mancio convoque les journalistes dans l’hôtel de Nervi, lieu habituel de la mise au vert de l’équipe. Pour annoncer, en larmes, son départ : « Je sais que je déçois beaucoup de personnes qui m’ont toujours suivi et soutenu. Au revoir Samp. Mon rêve est de revenir dans quatre ou cinq ans. D’être de nouveau ici, pas en tant que joueur évidemment, mais comme entraîneur. De cette façon, je me rachèterais peut-être auprès de toutes les personnes qui aujourd’hui souffrent de ma décision de partir. » Le rendez-vous est pris.
Mais au terme de sa carrière en 2000, c’est à la Lazio, en tant qu’entraîneur-adjoint d’Eriksson, que Mancini débute sa nouvelle vie. Puis les aventures se succèdent (Fiorentina, Lazio, Inter, City, Galatasaray, puis à nouveau Inter), sans que la porte de la Samp ne s’ouvre. En 2013, l’opportunité semble pourtant se présenter après son renvoi de Manchester City, mais Edoardo Garrone, alors président de la Samp, coupe court : « Voir Roberto Mancini entraîner la Samp fait partie du monde des rêves. Ce n’est pas interdit de rêver, mais cela restera dans tous les cas un rêve. » Les hautes exigences salariales du Mancio en étant la possible raison. Néanmoins son amour est, lui, toujours intact, comme il en faisait part au Corriere dello Sport, peu après son retour à l’Inter : « La Sampdoria est l’équipe de ma vie. J’étais à peine plus qu’un enfant quand je suis arrivé, et j’étais un homme quand je suis parti. Un homme enrichi par l’amour de tant de personnes que j’ai connues à Gênes. » Mais un homme qui vit toujours au bras d’une autre.
SuperWalter
Une situation que connaît mieux que personne Walter Zenga. Lui a été formé du côté de l’Inter Milan et y a passé la majeure partie de sa carrière de 1982 à 1994, en profitant pour empocher un Scudetto et une Supercoupe d’Italie en 1989, ainsi que deux Coupes de l’UEFA (1991 et 1994). Mais depuis son départ en 1994 pour… la Sampdoria, Zenga n’a plus réussi à revenir chez les Nerazzurri. L’ancien portier aux 58 capes avec la Nazionale est d’abord parti terminer sa carrière aux États-Unis avec les New England Revolution. Puis il s’est également reconverti en tant qu’entraîneur et a accumulé de l’expérience au fil des (nombreux) voyages. À Brera pour commencer, en Serie D italienne en 2000-2001. Puis au National et Steaua Bucarest (2003 à 2005), à l’Étoile rouge (2005-2006), à Gaziantepspor (2006-2007), à Al Ain (2007), au Dinamo Bucarest (2007), à Catania (2008-2009), à Palermo (2009) et enfin à Al-Nassr, Al-Nasr et Al-Jazira (de 2010 à 2014).
Une véritable « gavetta » comme on dit de l’autre côté des Alpes, avec un objectif assumé dès 2012 par Zenga : « J’ai une clause dans tous mes contrats. Si l’Inter devait m’appeler, je suis libre d’y aller. Ce n’est pas un secret que je rêve de boucler un jour la boucle et de retourner entraîner mon club. Pour y arriver, j’ai choisi le chemin le plus difficile, faire le tour du monde sans assistance, en apprenant à me déchirer et à m’adapter aux joueurs que je trouve. » Mais jamais l’Inter n’a appelé. En 2014, suite au licenciement de Mazzarri, Zenga est pourtant convaincu de ses chances, mais c’est Mancini qui est choisi. Un recalage auquel l’ex-portier réagit alors sur Twitter : « Ils ont choisi Mancini… J’étais là, si près de mon rêve. Dommage. Peut-être dans une autre vie… Merci à tous. »
Depuis sa nomination sur le banc de la Samp, Zenga a toutefois fait le deuil de son rêve, comme il le confiait à la Gazzetta dello Sport en début de saison : « Je ne pense plus à l’Inter. Je le dis sans amertume, aussi parce que la Samp est un point d’arrivée pour moi. Aujourd’hui, je suis heureux de ce que j’ai et de ce que je fais. Très heureux. » Sans une trace de rancœur non plus vis-à-vis de son ex-coéquipier Mancini : « Roberto est un ami. Je le soutiens. Il a ramené l’Inter – l’équipe que je supporte et où j’ai beaucoup d’amis – à un niveau de compétitivité très haut. » Aucune jalousie à attendre donc des deux hommes, qui préfèreront sans doute se retrouver autour d’une bonne partie de Mega Drive.
Par Eric Marinelli