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Top 10 : Les bons mots de Ken Bates

Par Victor Le Grand, à Londres
Top 10 : Les bons mots de Ken Bates

Cet après-midi, Leeds United AFC accueille Tottenham Hotspur au quatrième tour de la Coupe d’Angleterre. En loge, le président des Whites, l’incorrigible Kenneth Bates, pointera sans doute le bout de son nez. Peut être sa dernière grosse affiche dans un costume de dirigeant, qu’il déboutonnera en fin de saison pour une retraite bien méritée. Irrévérencieux, exaspérant pour certains, controversé mais toujours aussi divertissant : dernier hommage à l’un des plus beaux « punchliners » de la perfide Albion. Verbatim.

1/ « Si j’avais le temps de tout recommencer, je serais aujourd’hui général ou évêque. »

Ealing. Siège des studios cinématographiques britanniques d’avant-guerre, c’est dans ce quartier résidentiel de Londres que Kenneth Williams Bates est né le 4 décembre 1931. Abandonné par son père. Orphelin suite au décès de sa maman quelques semaines après sa naissance. « J’ai un destin à la Oliver Twist, mais en plus déglingué » , relève-t-il le jour de ses 30 ans, âge auquel il est devenu millionnaire. Tour à tour promoteur immobilier, éleveur de bétail puis baron de l’agriculture laitière du pays, Banes n’en demeure pas moins un cœur tout tendre : trois mariages et cinq enfants ornent son album familial. « Un jour, nous sommes allés visiter la maison d’Hemingway à Key West, aux États-Unis, se souvient Suzannah, sa dernière épouse. Tout le monde le regardait. Il était beau, plus jeune, c’était le sosie d’Hemingway. » Pas assez pour flatter l’ego de son mari. « Ce gratte-papier n’a jamais réussi à écrire aussi bien que moi. »

2/ « Je ne suis pas en admiration devant mes joueurs. Comment pourrais-je l’être ? Je suis la plus grande star ici. »

« On me surnommait « Killer Bates », raconte Ken, mordu de football depuis son enfance. J’avais du ballon mais malheureusement, je suis né avec un pied bot. » En 1982, sa carrière décolle néanmoins en coulisse lorsqu’il rachète un club Chelsea endetté jusqu’aux fesses, pour une livre symbolique. « Chaque club est composé de trois types de personnes – des supporters, des parasites et des personnes qui se branlent les couilles, même les demoiselles. » Au final : en 21 ans de présidence, « Killer Bates » a offert un peu de panache aux quartiers blues de l’ouest londonien. Une Coupe de l’UEFA, deux Coupes d’Angleterre, son lot de magouilles, de paiements illégaux et de plaisanteries ; la modernisation des installations, une santé financière indéniable et une certaine conception de la sécurité : installer des clôtures électriques aux abords des tribunes de Stamford Bridge pour calmer les hooligans ¬¬– identiques à celles qui contrôlent son bétail. Hélas, ou non, le Greater London Council lui interdira de s’en servir. « Un peu comme de parquer des supporters dans un camp de concentration nazi… mais en leur octroyant un droit d’entrée. »

3/ « Claude Makelele, c’est qui ? Il joue pour qui ? J’ai seulement entendu parler de son frère : Ukulélé. »

« Regardez les joueurs de merde que l’on a ! Mais nous les soutiendrons jusqu’à la fin de la saison » . Joueurs, épouses de joueurs, managers, staff médical, ramasseurs de balles ou supporters : le personnel de Chelsea vit au gré des fantaisies de son président. Premiers fusibles, comme toujours, les entraîneurs. Or, pas moins de neufs instructeurs en chef viendront à Londres se faire tailler un costard sur mesure. Un travail d’orfèvre, en somme : « John Hollins était une erreur, relève-t-il de son premier entraîneur. Mais il a une femme très forte, très bien, un peu grosse. Celle que j’aurais dû mettre sur le banc. » « Nous aimons beaucoup Bates, confesse toutefois Graeme Le Saux. Il aura toujours un sourire et une plaisanterie pour vous. À vos frais, évidemment ! »

4/ « Je me lève toujours quand les supporters de Chelsea chantent : « Levez-vous si vous détestez Manchester United. » »

Août 2000. Coup de sifflet final. Manchester United remporte le Charity Shield aux dépens de Chelsea, sur le score de deux buts à zéro. En tribune, place désormais à la remise des médailles. Mais Ken Bates a soudain une meilleure idée, plus amusante, et propose une seconde décoration à Sir Alex Ferguson. « J’ai tenté de lui offrir ma médaille, explique Bates. Mais il a arraché le ruban bleu, il était très en colère. » « Je ne sais pas ce qu’il voulait pour être honnête, ajoute Ferguson. Est-ce qu’un président depuis Mao a davantage eu foi en ses propres opinons que Ken Bates. Si le fait « d’imposer sa loi » était un sport olympique, il croulerait sous les médailles d’or. » Pour info, sur cette médaille « en chocolat » , confectionnée par Bates lui-même, était inscrit : « Cher Fergie, la meilleure chose depuis le pain tranché. »

5/ « Gianluca Vialli a perdu ma confiance, mais nous nous sommes séparés en bons termes avec les formalités d’usage italiennes : une étreinte et un baiser. »

Parce que toutes les belles histoires ont une fin. En 2003, Ken Bates revend Chelsea au milliardaire russe Roman Abramovitch pour la somme de 70 millions d’euros. Belle plus-value, quand on sait qu’il s’est offert le club pour un pound symbolique. Le temps pour lui de remercier ceux, qui, encore aujourd’hui, lui rendent un vibrant hommage : Marcel Desailly, Claudio Ranieri ou Roberto Di Mateo – « Je l’appelle Robbie, il m’appelle Papa. » Mais bizarrement, aucune présence de John Terry. « Avec ses histoires de fesses, Terry me rappelle les camps de vacances pour les 18-30 ans de mon enfance, s’amuse Bates. Pénètre, fonce et frappe : ça serait la recette d’une vie sexuelle épanouie, mais ça ne gagnera jamais la Coupe du monde. »

6/ « Abramovitch sera toujours le bienvenu à Leeds… mais seulement s’il porte une chemise et une cravate. »

Absurde, comme toujours. Après avoir tenté de racheter Sheffield Wednesday – « quand Bates saute dans l’eau, les requins volent » , expliquera le président du club après l’échec des négociations, Ken se lance un dernier défi. En 2005, il s’offre le très vintage Leeds United, alors embourbé en deuxième division anglaise. Nouvel environnement. Nouvelles ambitions. Mais toujours la même grâce. Surtout, les nouveaux dirigeants de Chelsea accusent Bates « d’antisémitisme » pour les avoir traités quelques mois après la vente du club « d’escrocs de Sibérie » . « Moi antisémite ? Je n’ai jamais autant ri depuis que ma mère s’est coincé les seins dans l’essoreuse. »

7/ « La reconstruction de Leeds, c’est un peu comme le sexe : à une époque où la petite gâterie est reine, ce club a besoin d’une longue et interminable séance de préliminaires. »

Changement fréquent de managers, affaires judiciaires, manque de fonds de jeu, relation exécrable avec les supporters, endettement : du côté de Leeds, Ken Bates semble lâcher prise. Sa gouaille ne charmerait plus personne. Ses choix de gestions sont contestés. Sa personnalité exaspère. Malgré tout, cet incroyable homme d’affaires à la répartie cinglante a réussi son pari : s’offrir via le football son plus bel espace de liberté d’expression. « D’abord, c’était Jules César, puis Jésus Christ, maintenant il semble être devenu le Mahatma Gandhi » , résume Kate Hoey, ancienne ministre des Sports anglaise qui s’est longtemps brouillée avec Bates sur le projet de rénovation du stade de Wembley. En effet, membre actif de la Football Association, Ken voulait en faire un « mini-Las Vegas » , mais à une seule condition : « Le meilleur moyen de faire avancer Wembley est d’abattre Kate Hoey. » Chassez le naturel…

8/ « 99% des lettres et des courriels de fans que je reçois me soutiennent. C’est mieux que Saddam Hussein – et lui pourtant magouillait les chiffres. »

Du temps de Chelsea, Ken Bates aimait prendre la plume et rédiger lui-même l’éditorial des « programmes de match » . Ces petits bulletins officiels de poche, si populaires en Angleterre, vendus pour quelques pounds à la sauvette. Faits divers, société, immigration, politique, sport et insultes personnelles : longtemps son auteur a trouvé ici un stand de tir incroyable. Dans ce climat, aucune raison que Leeds soit épargné. Depuis lors, sa principale cible reste les supporters, auxquels il n’a que très rarement accordé de tarifs préférentiels à Elland Road. « La pauvreté des supporters est quelque chose d’exagéré. Surtout quand on voit ce qu’ils dépensent dans les téléviseurs. »

9/ « Maintenant, messieurs les journaleux, si vous pouviez me faire parvenir vos noms et ceux de vos journaux. Juste pour que je sache qui censurer dès aujourd’hui. »

Juillet 2005. Prononcée lors de sa première conférence de presse à la tête de Leeds United, Bates résume en une sentence l’histoire d’amour qui le lie depuis trente ans aux journalistes britanniques. Un amour vache, tout du moins, « Je retourne dans ma ferme de 300 hectares. Vous pouvez foutre le camp dans vos taudis de logements sociaux » , leur glissait-il déjà à l’oreille lors de la relégation de Chelsea, en 1988. Le divorce intervient finalement en 2010, lorsque Bates interdit tout bêtement aux reporters locaux l’accès définitif à Elland Road. « Je n’accorde jamais d’interviews aux journaux. Je les prends d’assaut et je les abats ! »

10/ « La plupart des investisseurs étrangers ne savent pas ce qu’il font. »

Depuis plusieurs années, Ken Bates vit à Monte-Carlo pour la souplesse de son système fiscal. « Quand on reçoit le calendrier chaque été, on s’assoit et on planifie notre période de 90 jours durant laquelle nous sommes autorisés à entrer en Angleterre. Ce qui fait que je suis dans l’impossibilité de me rendre à Leeds régulièrement. Pas très grave, cette ville, c’est une vraie chiotte. » Pas grave, en effet. Le 26 décembre dernier, Ken Bates revendait le club à un nouveau trio d’investisseurs venus du Moyen-Orient. Il gardera son fauteuil de président jusqu’à la fin de la saison, avant de devenir président d’honneur, sans aucun pouvoir décisionnaire. Mais ce titre, c’est pour la vie. « J’ai réalisé beaucoup de choses, j’ai me suis fait beaucoup d’ennemis mais j’ai fait marrer beaucoup de mes amis : cela sera mon épitaphe. » RIP.

Par Victor Le Grand, à Londres

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