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Surveillance : le FC Metz perd la face

Par Maxime Renaudet
Surveillance : le FC Metz perd la face

Ce jeudi, le club messin a confirmé qu'il avait eu recours à des tests de reconnaissance faciale. Si certains supporters s'en sont offusqués, dénonçant au passage une pratique illégale, le club a révélé que cette expérimentation avait été réalisée à vide. Une justification loin d'être suffisante, et qui en dit long sur la politique sécuritaire des clubs et des instances.

Terminé les fouilles au corps. Dans un futur proche, les supporters seront plus que jamais épiés à distance. Visages et émotions seront analysés, puis en fonction du profil des suspects, ils seront confrontés à une base de données qui permettra de refouler tout contrevenant. Alain Damasio aurait pu en faire un roman, mais le FC Metz l’a devancé en testant à plusieurs reprises la reconnaissance faciale, car celle-ci permettrait de pallier un contrôle humain aléatoire et difficile à mettre en place. Mais après ces révélations étonnantes, de nombreux supporters ont vivement exprimé leur mécontentement sur les réseaux sociaux. Ce qui a poussé le club à se justifier de manière aussi maladroite que brinquebalante, prouvant au passage que l’expérimentation de cette technologie pose de nombreux problèmes.

Poker face

En révélant l’information dans une interview accordée ce mardi à Street Press, Olivier Tesquet – récemment auteur d’À la trace : enquête sur les nouveaux territoires de la surveillance – n’avait pas anticipé la vive réaction des supporters messins à l’égard de leur club : « Je ne pensais pas non plus que le club allait prendre la parole comme il l’a fait. Mais en même temps, ce n’est pas extrêmement surprenant, ça montre à quel point le sujet est sensible. » Tellement sensible qu’après avoir réagi à chaud sur Twitter, le club messin a tenu à éclaircir tout ça. Interrogée par le Républicain Lorrain ce jeudi, la directrice générale du club, Hélène Schrub, a apporté quelques précisions : « On a rencontré la société messine Two-I voici plusieurs mois, et elle nous a présenté une solution technologique pour une éventuelle mise en place ultérieure. On a testé ce logiciel sur des personnes volontaires de la start-up avec leurs photos et leur consentement. »

Pas suffisant pour convaincre les supporters, régulièrement privés de liberté ces derniers mois et qui ne veulent plus jouer les rats de laboratoire d’une société toujours plus contrôlée. Car si les tests à vide sont possibles sans l’aval de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), ce sont leurs motivations qui interpellent. En effet, le club mosellan a avoué tester la reconnaissance faciale pour deux cas de figure bien précis : détecter « des armes ou des colis abandonnés » , et « faire respecter les interdictions contractuelles de stade que les clubs peuvent prononcer grâce à la loi Larrivé* » . Dans le premier cas, une fouille approfondie semble tout à fait suffisante pour y contrevenir. Et dans le second, il est intéressant de noter qu’il ne s’agit pas des interdits administratifs ou judiciaires de stades qui doivent pointer au commissariat les jours de match, mais ceux qui ont l’interdiction contractuelle d’acheter des billets. Soit comme souvent, une petite poignée de supporters.

Mort sur la CNIL

Si nombreux se sont offusqués, le FC Metz n’est en réalité pas un précurseur en matière de reconnaissance faciale. Ni dans le football, où Brøndby, Swansea et des clubs chinois y ont déjà eu recours, ni dans la société civile où plusieurs villes l’ont également testée. À Nice et Marseille, deux lycées avaient expérimenté des portiques virtuels de contrôle d’accès par reconnaissance faciale, technologie également fournie par la start-up messine Two-I, créée en 2017. Mais en octobre 2019, la CNIL a mis un stop à cette expérimentation. Une situation tout à fait comparable à celle d’un stade d’après Olivier Tesquet : « Il n’y a aucun doute sur la raison pour laquelle le club veut se doter de ce type de technologie, les finalités sécuritaires sont tout à fait assumées. Mais dès qu’ils vont vouloir le déployer dans des conditions réelles, la CNIL va devoir répondre à la même question : est-ce proportionné par rapport aux finalités recherchées ? J’aimerais bien avoir la réponse à cette question, car je n’en suis pas convaincu. »

Par la voix de Jean-François Girard, responsable de la sécurité du club, le FC Metz a montré qu’il était convaincu que cette expérimentation a bien lieu d’être. « C’est hyper important d’avoir un outil pour optimiser notre sécurité. Un stadier ne peut pas tout voir.[…]On a aussi la responsabilité de tout ce qui se passe dans le stade, mais on n’a pas tous les moyens aujourd’hui de mettre en place l’obligation de résultat » , déclarait-il au Républicain Lorrain dans une interview lunaire. Car si le club messin semble convaincu du bien-fondé de ces tests techniques, qui étaient restés secrets, il n’était pas du tout préparé à se justifier sur le sujet. Mais qu’importe, puisque d’après Hélène Schrub, la LFP et la DNLH (Division nationale de lutte contre le hooliganisme) encouragent la démarche du club.

Une manière pas tout à fait habile de se dédouaner, mais qui tend à montrer que clubs et instances veulent continuer à traquer les supporters. « Finalement, ce type de technologie pourrait être un moyen pour les clubs de montrer leur bonne volonté face aux instances et leur dire : « Vous nous avez collé 50 000 euros d’amende pour usage de fumigènes, mais regardez, on a investi je ne sais pas combien dans le déploiement d’une technologie de reconnaissance faciale, c’est bien la preuve qu’on veut vous aider. Après exploitation des images, on a identifié que c’était cette personne, visez-la d’une mesure disciplinaire, transmettez aux autorités compétentes, mais ne nous collez pas d’amende » » , anticipe Olivier Tesquet. Un scénario qui tient tout à fait la route et qui corrobore ce que disait Jean-François Girard au Républicain Lorrain : « L’humain est très malin parfois. » Même quand il perd la face ?

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Mikautadze fait ses adieux au FC Metz
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Par Maxime Renaudet

* Adoptée en mai 2016, la loi Larrivé a doté les clubs d'un arsenal renforcé pour prévenir la violence dans les stades. Le texte donne notamment la possibilité aux clubs de refuser la vente de tickets à certains supporters qui ne sont pas des interdits de stade, mais qu'ils pourront ficher de manière informatique. Avant cette loi, les clubs ne pouvaient refuser de vendre des tickets qu'aux seules personnes interdites de stade.

Propos de OT recueillis par MR

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