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Surdose de clásicos

Par Georges Quirino-Chaves à Buenos Aires
Surdose de clásicos

Renouant avec une vieille tradition, le championnat argentin organise depuis vendredi une journée consacrée à ses plus grandes rivalités. Le superclásico disputé ce dimanche soir à l’Estadio Monumental a bouclé un week-end à « pura pasión » au pays de feu Diego. Des centaines de tonnes de papelitos balancés, des milliers de kilos de choripán avalés et des litres de Fernet-Coca ingurgités dans tout le pays, retour sur une fin de semaine d’excès en Argentine. Explosion de RTT à prévoir ce lundi.

Le coup d’envoi du Superclásico est prévu dans plus de quatre heures, mais les rues du quartier de Belgrano au nord de Buenos Aires sont déjà envahies par les maillots blancs à bande rouge de River Plate. Pour beaucoup, c’est un rituel. Avant d’aller assister au duel tant attendu face au rival historique Boca Juniors, ils viennent passer une bonne partie de leur journée aux abords de l’Estadio Monumental. Pour ne pas stresser tout seul chez soi en attendant le match à ne surtout pas perdre. Pour surtout kiffer avec les potes la previa, l’avant-match, en chantant et en s’envoyant des litres de Quilmes ou de Fernet-Coca servis dans des bouteilles en plastique coupées en deux.

Pour éviter de trop se bourrer la gueule le ventre vide avant la rencontre, les hinchas ont pris d’assaut la plupart des pizzerias et parillas du coin. À moins de deux kilomètres du plus grand stade d’Argentine, attirés par l’odeur des grillades, des dizaines d’entre eux enquillent bifes de chorizo et choripáns chez Lo de Lalo. Tous ont les yeux rivés sur l’écran. Le téléviseur diffuse le bouillant clásico rosarino entre Central et Newell’s Old Boys. « Ceux-là, ils sont plus fous que nous ! » assure Juan, supporter millonario de 47 ans, en regardant les images impressionnantes de l’entrée des joueurs sur le terrain. Un drapeau jaune et bleu géant recouvre trois tribunes d’un Gigante de Arroyito en fusion. Un peu trop. Quatre bombes agricoles balancées sur la pelouse retardent le coup d’envoi de la rivalité la plus passionnée du pays. « Tu vois ? Je t’avais dit qu’ils étaient plus tarés que nous ! » se marre Juan, un bout de barbac dans la bouche. J’adore ce week-end de foot. C’est le carnaval ! À part un match vendredi, je crois que je les ai tous vus ! »

Si cet hincha de River a décidé de se faire un binge-watching de football pendant cette fin de semaine ensoleillée à Buenos Aires, ce n’était pas pour voir Real Madrid-Barcelone, Roma-Lazio, Nottingham Forest-Liverpool ou Marseille-Nice. Non. Juan s’est laissé ambiancer par son championnat. La fédération argentine a décidé cette année de remettre au goût du jour une vieille tradition : foutre le feu à tous les stades du pays en programmant tous les clásicos de l’élite le même week-end. Explosion de RTT à prévoir ce lundi.

« Génial ou complètement fou ? »

Ce n’est pas la première fois que l’AFA organise cette dinguerie. Tout a commencé en 1934 pour fêter la création de l’association. L’évènement s’est ensuite répété, sans jamais s’installer, près d’une dizaine de fois au fil des décennies, jusqu’en 2017, saison de la dernière édition. Pourquoi cette année ? Parce que le tournoi actuel avec le nombre invraisemblable de 28 équipes de première division réparties en deux zones de 14 où les clubs rivaux sont séparés ne passionne pas des masses. Organiser cette journée est au moins l’occasion de faire se rencontrer ces adversaires de toujours lors d’un week-end évènement. « Les diffuseurs nous ont toujours demandé d’organiser cette journée des clásicos pour attirer le public, expliquait cette semaine Mariano Elizondo, ancien président de la Superliga argentine. Personnellement, je ne trouve pas ça terrible. Si tu joues River-Boca en mars, San Lorenzo-Huracán en avril et Racing-Independiente en mai, tu as de nouveaux abonnés pendant trois mois. J’imagine que ça s’est fait en raison du format particulier du tournoi cette année. C’est la télé qui dirige. »

En Amérique du Sud, le Brésil avait déjà expérimenté l’idée en 2011 et 2012 pour la dernière journée du championnat. La Colombie l’a instaurée depuis plusieurs années. D’autres, comme le tournoi uruguayen par exemple, ne disposent pas de suffisamment clásicos pour mettre en place une journée dédiée. « Génial ou complètement fou ? » se demandait le quotidien sportif Olé avant les premiers matchs ce vendredi. Interrogés par le journal, 53% des supporters sondés se disaient contre cette idée de jouer les plus grandes rivalités le même week-end.

Même s’il divise, le concept a évidemment fait vibrer tous les fans de foot devant leur poste ou dans les stades argentins. Que retenir du week-end ? Avant tout, et comme souvent, des images – surtout des tribunes tirant des papelitos à en faire disparaître une forêt en deux jours – plutôt que du jeu : les publics passionnés de San Lorenzo et Colón malgré les nuls (0-0) face à Huracán et Unión, la joie de Darío Cvitanich après la victoire de son Banfield sur la pelouse de Lanús (0-1), l’égalisation à la dernière minute de Gimnasia grâce au gardien aux mains moites d’Estudiantes (1-1), la victoire de Tigre, seule équipe à avoir gagné son Clásico à domicile, face à Platense (4-0) dans un duel de « la zone nord » de Buenos Aires qui ne se jouait plus dans l’élite depuis 1980, la colère des hinchas de Central qui demandent et obtiennent la tête de leur idole et désormais ex-entraîneur Kily González après la défaite face à Newell’s (0-1) et ceux d’Independiente qui réclament le départ de leur président en le poursuivant jusqu’à sa caisse après la déroute à domicile face à Racing (1-2), peut-être le plus beau match du week-end. Sans oublier de mentionner ces matchs qui n’avaient rien à voir avec des clásicos, genre Barracas Central-Sarmiento (2-1) pour faire le nombre. Pas invités à la fête.

« Le superclásico écrase tout »

« Le problème de cette journée spéciale, c’est que le superclásico écrase tout, regrette Juliano, 41 ans, supporter racinguista qui aurait aimé que les médias évoquent davantage le succès de son club au lieu de rapidement basculer sur les débats d’avant-match entre River et Boca. On parle d’eux toute l’année. Les autres clásicos méritent d’avoir une journée où ils ont toute l’attention. » Il est vrai que les deux clubs soutenus par près de trois Argentins sur quatre cannibalisent tout. Et avec ce qu’il s’est passé à l’Estadio Monumental ce dimanche soir, nul doute que 80% du temps d’antenne sera consacré ce lundi à la victoire de Boca Juniors (0-1), la première sur la pelouse de River Plate depuis la saison 2017-2018. Après avoir un peu trop célébré leur succès dans le rond central, les Xeneizes – qui jouaient en jaune pour la première fois lors d’un superclásico sur conseil d’un chaman d’après le quotidien sportif Olé – ont dû être protégés par la police au retour au vestiaire afin d’éviter les projectiles lancés par des hinchas millonarios en colère.

« Le football est une passion. Nous sommes rivaux, mais pas ennemis », disaient pourtant des photos représentants des fans des deux équipes affichées aux alentours du stade, où étaient postés près de 1200 policiers ce dimanche. « Avant de penser à refaire une journée des clásicos, je souhaiterais surtout que tout soit pensé pour que les supporters adverses puissent revenir dans les stades. C’est quand même plus sympa quand tu chantes contre « l’hinchada » adverse en tribunes. Ces clásicos ne sont plus pareils sans eux », regrette Christian, 31 ans, un supporter de River Plate croisé avant le match. À cause de la violence, les déplacements de visiteurs sont interdits depuis près de 9 ans en Argentine. Les autorités répètent chaque année qu’elles vont se pencher sur l’éventualité d’un retour. Sans vraiment bouger. L’AFA semble pour le moment davantage préoccupée par un autre problème. Non pas l’organisation d’une nouvelle journée spéciale – pas dans les plans pour le moment -, mais l’installation à partir des prochaines semaines de la VAR dans le championnat argentin. Sans aucun doute, la future star des prochains clásicos.

Par Georges Quirino-Chaves à Buenos Aires

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