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Superligue ou réforme de la Ligue des champions : c’est l’Europe qui éclate

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes
Superligue ou réforme de la Ligue des champions : c’est l’Europe qui éclate

Devant la menace grandissante et de plus en plus concrète de la Superligue de l’ECA, l’UEFA s’apprête à adopter une nouvelle formule de sa C1. Ces deux projets concurrents altèrent profondément l’idée d'une compétition européenne et donc sa valeur sportive, en tout cas celle qui ne se calcule pas uniquement en droits télé. Certes, notre nostalgie se retrouve vite concassée sous le poids des enjeux économiques et la pression des patrons de la Juventus, de Manchester United et consorts. Pourtant, il n’est pas inutile en ces jours sombres pour le ballon rond de se souvenir de ce qu’a pu et devrait représenter une Coupe d’Europe des clubs champions.

Il fut un temps pas si lointain, en 1986, ou le PSG se faisait éliminer au premier tour de la C1 par Vítkovice, porte-étendard de la Tchécoslovaquie socialiste. La Coupe d’Europe des clubs champions incarnait clairement un décalque des coupes nationales (avec juste la nuance du match aller-retour). Elle semblait surtout constituer à juste titre l’étage supérieur des championnats nationaux, eux-mêmes aboutissement d’une pyramide reposant sur la base foot amateur. Une place se méritait, et la qualification possédait une saveur unique. Pour le pays, pour la culture foot de ce dernier et pour les supporters évidemment. En outre, elle proposait une certaine interprétation de la construction européenne, plus en adéquation avec une représentation du Vieux Continent que n’aurait pas reniée Stefan Zweig, qui passait par-dessus le rideau de fer et tendait même les bras à la Turquie.

L’attaque des Titans

Voilà pour les larmes élégiaques sur ces décennies durant lesquelles Bucarest ou le Celtic pouvaient prétendre soulever le trophée en toute légitimité. Depuis l’instauration de la Ligue des champions en 1992 et du système des poules, le concept rappelait désormais davantage celui de la Coupe du monde. L’ouverture des places qualificatives au second, troisième, voire quatrième de certains championnats avait affadi la beauté du nom, comme une publicité mensongère. Il demeurait cependant un fonctionnement toujours dans la filiation assumée du patrimoine football du début du XXe siècle. Or depuis plus de vingt ans, l’idée d’une ligue fermée de l’élite « autoproclamée » (c’est-à-dire découplée de la logique sportive au plan national) se précise, s’affine, se discute, se brandit. Cette attaque des Titans du capitalisme sportif obsédés par le modèle « sécurisé » à l’américaine – sans oublier les transformations induites par l’arrêt Bosman, à la médiatisation du ballon rond, voire sa numérisation actuelle ou le rôle des paris sportifs – ont donc finalement eu raison d’un certain héritage.

Face à la menace de la Superligue, qui s’est matérialisée ce dimanche, la réponse de l’UEFA s’avère aussi insidieuse, en maquillant l’infamie. En accroissant le nombre de participants de 32 à 36 et avec son système de chapeaux, l’instance européenne peut se vanter d’avoir préservé une part d’incertitude du sport (le principal reproche adressé aux zélotes de la Superligue), d’avoir laissé une chance infinitésimale aux petits poucets. Toutefois l’adoption d’un grand brassage de toutes les équipes, plus un système complexe de play-offs, rend non seulement illisible la compétition, mais quasiment blasphématoire la C1 version 2024, du moins autant qu’une Superligue essentiellement construite pour faire cracher les diffuseurs. On demande aux amoureux du foot de se transformer en des copier-coller de leurs alter ego du base-ball ou de la NBA. Cette option déconnecte encore plus le niveau européen du foot des nations et surtout du foot dans chaque nation. Un gap tant sur le fond que sur la forme qui risque d’aboutir à une rupture bien plus dommageable qu’une scission de quelques grandes enseignes à crampons, un schisme populaire au sein même de la culture football.

Des sous, déçus ?

Les raisons financières sont évidentes, d’autant plus impératives si se préfigure enfin une sortie de crise sanitaire. La volonté de couper l’herbe sous le pied de l’ECA d’Agnelli, pour à la fois satisfaire les potentiels déserteurs et l’ensemble du foot européen qui vote en assemblée générale, a apparemment justifié et précipité cette course à l’abomination. Chacun sait pertinemment que les dirigeants de l’UEFA ne se soucient guère de la valeur culturelle ou de la signification sociale, du passé comme de l’imaginaire collectif, qui peuvent s’agréger autour de ces compétions. Cependant, l’usine à gaz qu’ils s’apprêtent à sortir possède l’improbable mérite de ne satisfaire sûrement personne. Y compris les potentiels félons, et les manœuvres, à suivre d’heure en heure, sont en cours pour savoir qui rejoindra ou non la Superligue (pour l’instant, le PSG n’en serait pas). Il n’en reste pas moins que cette alternative entre le diable d’une nouvelle C1 et celui d’une ligue fermée balance un coup de massue terrible et supplémentaire sur les fondations du football que nous aimions, et que nous aimions parfois détester aussi. Pas de soucis, les vrais croyants, les tenants du canal historique, les romantiques révolutionnaires trouveront toujours où se nicher. Ce sera juste dans une autre église, un autre parti, à la marge.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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