S.Pocognoli : «Trop longtemps qu’on attend !!!»

AZ Alkmaar en tête du championnat néerlandais, qui devance les trois mastodontes du pays (PSV, Feyenoord et PSV) c’est une surprise ou c’est parfaitement normal ? Si on suit l’Eredivisie (le championnat batave Ndlr) de loin, on pourrait trouver ça surprenant mais quand on regarde le jeu pratiqué, quand on détaille notre effectif et notamment nos recrues de l’été, quand on voit la qualité des entraînements concoctés par Mr van Gaal, il n’y a pas matière à s’étonner.

Vous aviez pourtant commencé le championnat de la pire des façons avec deux défaites dont l’une, lourde, à domicile contre Den Haag (0/3)… Je crois surtout qu’on a eu du mal à digérer la préparation d’avant-saison. Contrairement à la saison passée qu’on a terminée onzième, le staff a voulu durcir la dimension physique. Le stage a été terrible. Finalement, le déclic est venu contre le PSV, lors du troisième match, qu’on a gagné à l’arraché (1/0), presque contre le cours du jeu. Depuis cette rencontre, notre jeu s’est assemblé peu à peu comme un meccano, on ne touche plus terre (sic) : sur 15 matchs, on en a gagné treize et concédé deux nuls. Rien n’est gagné néanmoins car l’Ajax s’accroche (à trois points Ndlr) et Twente (à 7 points Ndlr) n’est pas encore complètement décroché.

Qu’est-ce qui a changé avec l’an dernier ? J’y vois deux raisons essentielles. La première concerne la méthode de Louis van Gaal qui demande du temps pour être efficace. Pour que tous les rouages du club soient imprégnés de la philosophie du coach, il fallait au moins deux ou trois ans et comme il est arrivé en 2005… Désormais, toutes les équipes de jeunes évoluent comme l’équipe fanion. Tous les éducateurs sont immergés dans la méthode van Gaal et les résultats suivent.

L’autre motif majeur concerne les recrues : celles de cette année bien sûr comme Moussa Dembélé, « un ouvre-boîte » , comme le surnomme van Gaal, mais un buteur décisif aussi quand il le faut. Des scouts de toute l’Europe viennent à Alkmaar toutes les semaines. D’autres joueurs arrivés l’an dernier comme Mounir El Hamdaoui (meilleur buteur de la Ligue avec 15 buts Ndlr), Ari, le Brésilien ou Sergio Romero, notre goal argentin, champion olympique cet été, voire carrément plus tôt comme Demy de Zeeuw, au club depuis trois ans et qui a pris une dimension incroyable cette année.

Qu’est-ce qui pourrait vous empêcher d’être champion ? Ben, l’Ajax peut-être pour commencer (sourires). Ce n’est pas rien. Malgré le départ d’Huntelaar, ils ont une bonne génération. Si Feyenoord est dans la panade et le PSV un cran en dessous cette saison, il y aura également Twente pour nous chercher des poux dans la tête (sic). Pendant que j’y suis, sachez que Marseille est loin d’être en huitième de finale de la Coupe de l’UEFA : demandez donc leur avis à Rennes. Pour en revenir à la question, on ne risque pas de s’endormir car Mr van Gaal veille et toute son exigence est tournée vers ce titre de champion. Il a fini sa carrière de joueur à Alkmaar, il a débuté sa trajectoire de coach à Alkmaar et il aimerait vraiment donner un deuxième titre de champion au club. Tout le monde ici attend ça depuis 28 ans, c’est vous dire si on ne risque pas de somnoler en route. Maintenant, cela ne garantit pas le sacre à la fin de la route (sic).

Vous êtes quatre Belges à Aklmaar, vous fonctionnez en bande ? Pas vraiment. Tu sais il y a aussi dix Hollandais, deux Finlandais, une petite dizaine de nationalités (un joueur de chaque Ndlr) et nous quatre. Tout le monde se mélange et c’est ce qui fait notre force. On parle en néerlandais et en anglais et on progresse tous… Désormais quand on se retrouve en sélections, chez les A comme chez les U21 (les Espoirs Ndlr), la plupart des Belges jouent à l’étranger. On apprend donc à se mélanger et ces diverses expériences nous sont profitables comme aux Diables rouges.

Depuis la génération Gerets-Vercauteren-Ceulemans, la Belgique n’a jamais eu une génération aussi forte. C’est donc le renouveau tant attendu ? Nous l’espérons tous. Contrairement à la plupart des équipes précédentes, nous avons appris à gagner dans les sélections de jeunes, ce qui n’est pas rien même si ce n’est pas une garantie pour le futur. Dans le même ordre d’idées, de plus en plus de jeunes joueurs s’exilent très tôt (Vanden Borre, Dembélé, Kompany, Fellaini Ndlr). Le parcours européen du Standard avec une équipe très jeune démontre aussi que le foot belge peut de nouveau être compétitif. On a appris très tôt à ne pas faire de complexes, c’est notre plus belle victoire. Le vrai test, cependant, sera la qualification éventuelle à la Coupe du Monde 2010 en Af’Sud. Comme la première place semble promise aux Espagnols, il faudra batailler contre les autres équipes (Turquie, Bosnie, Arménie, Ndlr) et sortir un “client ” en barrages mais on n’aura peur de rien…cela fait trop longtemps qu’on attend !!!

Rik de Vlaeminck

(1) : Longtemps en tête du championnat portugais, Leixoes occupe aujourd’hui la quatrième place derrière les trois gros à quatre points de Porto, le leader.