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Que retiendront les Saoudiens du mandat d’Hervé Renard ?

Par Julien Duez, à Riyad

Dix jours seulement, c’est le temps qu’il aura fallu à Hervé Renard pour passer du banc des Faucons verts à celui des Bleues. Une expérience de plus de trois ans et 41 matchs qui resteront dans les mémoires, malgré un goût d'inachevé.

Que retiendront les Saoudiens du mandat d’Hervé Renard ?

Mercredi soir à Riyad, un œil sur Karim Benzema en train de maltraiter le Barça, l’autre sur son iPhone, Abdulaziz n’est pas vraiment d’humeur à parler du désormais ex-sélectionneur de son pays. « Renard ? Mouais, je ne le regretterai pas. C’était un meneur d’hommes, certes, mais pas un vrai technicien, ça ne suffit pas pour être performant. C’est un scandale d’avoir perdu contre le Mexique et la Pologne au Qatar, on aurait dû jouer beaucoup mieux que ça », balaye-t-il d’un revers de la main tout en sirotant un thé à la terrasse d’un café. « Et puis, entre nous, je suis vraiment surpris de la raison de son départ. L’équipe de France des femmes quoi ! Sans leur manquer de respect, c’est quand même un pas un arrière. Et puis, surtout, il va gagner beaucoup moins d’argent ! » Son pote Abdulrahman, lui, se montre un peu moins catégorique : « J’étais au Qatar lors du match contre l’Argentine. C’était… probablement le plus grand moment auquel j’ai assisté avec l’équipe nationale. Rien que pour ça, respect à lui et bonne chance pour la suite ! »

Le renard est dans la fauconnerie

Pas besoin de s’attarder sur les derniers matchs amicaux disputés par le Français sur le banc des Faucons verts au stade du Prince Abdullah Al-Faisal de Djeddah, au bord de la mer Rouge. Ces deux défaites (1-2) consécutives face au Venezuela et à la Bolivie resteront anecdotiques. Et pour cause, dans les milieux autorisés, on savait déjà qu’Hervé Renard était sur le départ, et ce, malgré une récente prolongation de contrat jusqu’en 2027. « Je suis là pour rester », avait alors déclaré le coach en mai dernier. Il faut croire que l’appel du bercail a été plus fort : dix jours seulement après sa dernière pige saoudienne, le voilà qui dirigeait vendredi son premier match avec Wendie et compagnie. Un baptême du feu couronné de succès, c’est effectivement la première fois que les Françaises s’imposaient après avoir été menées de deux buts, et de bon augure avant de se présenter face au Canada, ce mardi soir au Mans. « Je suppose qu’il avait envie d’être enfin sous les feux des projecteurs dans son pays », analyse Mahmoud Wehbe, journaliste au quotidien sportif Arriyadiyah et qui, lui aussi, se déclare « surpris » de le voir quitter le luxueux cadre de travail offert par la pétromonarchie au profit du banc des Bleues. « Il ne faut pas oublier que c’est son choix, pas celui de la fédération », souligne quant à lui Mohammad, un supporter basé à Djeddah. Une réflexion qui a son importance car, si la SAFF a bien précisé que les deux parties avaient « trouvé un accord » pour entériner le départ de Renard, celui-ci s’est bien fait « à sa demande ». Le board saoudien, lui, ne semblait pas avoir l’intention de s’en séparer, et ce, malgré une nouvelle élimination en phase de poules de la Coupe du monde.

De quoi donner encore plus de crédit au bilan du sélectionneur. Dans un pays où ses semblables valsent sans préavis au premier faux pas, lui affiche un mandat de très précisément 3 ans, 7 mois et 27 jours, soit le plus long depuis… 1984 et le départ du Brésilien Mario Zagallo (3 ans, 5 mois et 29 jours). Le signe que les choses changent, même dans la manière de travailler, au sein d’un pays qui ne cache pas ses ambitions de développement depuis la nomination du prince héritier Mohammed ben Salmane en 2017 ? C’est en tout cas l’avis de Nasser Larguet, qui a débarqué en Arabie saoudite il y a presque un an en qualité de DTN. « En Arabie saoudite, Hervé a reçu des moyens à la hauteur des ambitions de la fédération. Quand il est arrivé, il a directement mis les mains dans le cambouis et travaillé dur. Dans ce pays, il y a beaucoup d’individualités intéressantes, et Hervé a réussi à les faire jouer en équipe, avec un état d’esprit commun qui rappelle le sens du sacrifice qui le caractérise, explique le formateur. C’est vraiment sa marque de fabrique, j’ai déjà pu l’observer quand on travaillait ensemble au Maroc, qu’il a qualifié pour sa première Coupe du monde depuis 20 ans (en 2018, NDLR). » En trois ans et demi, Renard a effectivement fait passer les Faucons verts de la 68e à la 54e place du classement FIFA, terminé en tête de son groupe de qualification au Mondial qatari et marqué le tournoi en faisant de l’Arabie saoudite la seule nation capable de battre le vainqueur final, en sortant, comme le soulignaient alors plusieurs observateurs, « avec une confiance retrouvée ». Autant dire que, lorsqu’au mois de février, le pays se voit attribuer le Championnat d’Asie des nations 2027 pour la première fois de son histoire, il apparaît comme l’homme capable d’emmener les Saoudiens décrocher leur quatrième couronne continentale, la dernière remontant à 1996. Il n’en sera finalement rien. Renard semblait avoir atteint son maximum après le Mondial et avait logiquement été approché par d’autres sélections, notamment la Pologne, dont il aurait étudié l’offre pendant trois semaines. Autant d’éléments qui l’ont poussé à informer en toute franchise son staff et sa direction de ses envies de départ.

Si un club comme Al-Hilal est capable de remporter la Ligue des champions asiatique et terminer en finale du Mondial des clubs, alors l’équipe nationale devrait obtenir des performances équivalentes.

Mahmoud Wehbe, journaliste au quotidien Arriyadiyah

« Les dirigeants ont été surpris de la décision d’Hervé, mais ils l’ont respectée, souligne Nasser Larguet. Et je pense qu’ils gardent un souvenir de l’homme à sa juste valeur, parce que les performances qu’il a réalisées sont vraiment exceptionnelles. » De son côté, le journaliste Mahmoud Wehbe estime que le potentiel de la sélection n’a pas été exploité au maximum de ses capacités : « Pour être honnête, si un club comme Al-Hilal est capable de remporter la Ligue des champions asiatique et terminer en finale du Mondial des clubs, alors l’équipe nationale devrait obtenir des performances équivalentes. La victoire contre l’Argentine était, certes, incroyable, mais ce qu’on retient avant tout, c’est que l’Arabie saoudite n’a pas réussi à se qualifier pour la phase finale. »

Choukrane Mister Renard

Fidèle à ses valeurs, Renard n’est pas parti comme un voleur. Le calendrier international de la sélection passait en effet en mode pause juste après cet amical contre la Bolivie, l’occasion était donc toute trouvée pour plier bagage, non sans délivrer un émouvant message d’adieu sur fond de mélodie triste au piano et de phrases telles que « Cette expérience était incroyable », « Je vous souhaite le meilleur » et « Si j’en ai l’occasion, je serai en tribune pour supporter l’équipe saoudienne lors du Championnat d’Asie 2024 au Qatar, car vous serez toujours dans mon cœur ».

De leur côté, ses anciens poulains ont tenu à remercier, tantôt « un coach et un professeur », tantôt « un boss », qui a su « offrir l’opportunité de réaliser un rêve d’enfant en disputant une Coupe du monde ». Comme pour dire que ses 41 matchs à la tête de la sélection ont suffi pour écrire l’histoire à sa manière. La fin du dernier rassemblement a été, quant à elle, remplie d’émotion et de larmes de part et d’autre, en premier lieu pour ses adjoints dont l’aventure s’arrêtait là, bien que le coach leur ait toujours dit de se préparer à cette éventualité.

En attendant de voir s’il parviendra à (enfin) apporter un titre à la France, Renard n’a toujours officiellement pas de successeur. Mais le président de la fédération, Yasser Al-Misehal, a immédiatement déclaré que rien ne pressait, les matchs officiels ne reprenant qu’au mois de septembre. « Nous ne choisirons pas son successeur avant juin. L’équipe nationale saoudienne est une grande équipe ambitieuse et elle sera certainement convoitée par de nombreux entraîneurs de renom. » Reste à savoir qui. « Qui est disponible sur le marché actuellement ? , s’interroge Abdulrahman sur la terrasse, juste après le coup de sifflet final du Clasico. Conte ? Zizou ? Nagelsmann ? Tu penses vraiment qu’ils viendront ici ? » Effectivement, n’est pas Hervé Renard qui veut. Cependant, le chemin qu’il a contribué à tracer devrait rendre le poste on ne peut plus attractif pour ceux qui, comme lui, sont des hommes de défis.

Dans cet article :
Hervé Renard rêve de la Coupe du monde 2026
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