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Pourquoi la musique du Multiplex nous titille-t-elle tant ?

Par Paul Piquard et Morgan Henry
Pourquoi la musique du Multiplex nous titille-t-elle tant ?

Certains la craignent comme le loup blanc, d'autres l'attendent avec impatience et espèrent l'entendre retentir, mais tous s'accordent à dire que la musique du Multiplex de Canal + fait rêver. Véritable raison d'être des soirées Ligue 1, cette petite sonnerie a fait son bout de chemin année après année jusqu'à devenir littéralement culte. Ça valait bien la peine qu'on s'y attarde.

Chaque saison, c’est la même rengaine. L’été approche, la saison se termine, et le couperet doit invariablement tomber. Si la Ligue 1 était une classe de lycée, la fameuse 38e journée en serait son conseil de classe. Comme d’habitude, les chefs de file et les élèves convenables ont déjà réservé leurs vacances, plié leurs serviettes de plage et glissé le tube de crème solaire au fond de la valise, bien calé dans un sac plastique. Cette année, le conseil hésite entre trois têtes pour attribuer les félicitations du jury. Mais surtout, cette dernière journée de championnat, c’est celle des cancres, des clubs du fond de la classe et des têtes en l’air qui transpirent jusqu’au bout en attendant de savoir de quoi leur futur sera fait. La boule au ventre, les mains moites et les jambes tremblantes dans l’attente de la sonnerie de la cloche. Ici, pas de cloche, mais une petite musique reconnaissable entre mille par tous les fans de Ligue 1. Une sonnerie de deux secondes, qui ressemble à Pomme de reinette et pomme d’api en accéléré, suivie d’un suspense interminable avant l’annonce du terrain où a été marqué un but salvateur, ou fatal, pour son club.

« Cela fait partie des madeleines de Proust »

« C’est moi qui ai choisi cette musique. Nos ingénieurs du son à Canal avaient fait des propositions car on voulait une musique qui soit un son d’alerte sans être angoissant. Nos ingés son à l’époque, vers 1992, avaient fait une sélection de petites musiques qu’ils avaient pris un peu partout, et moi, j’ai choisi celle-là. » La légende ne tient parfois à rien. Dans le cas de la fameuse petite musique du Multiplex, il s’agit d’une décision rapidement prise par Jérôme Revon, le réalisateur de Canal +, deux jours avant la diffusion du premier Multifoot, à la fin de la saison 1992-1993. Le début d’une longue histoire d’amour avec le public français qui a rapidement accroché au désormais célèbre jingle rythmant les scénarios de la dernière journée, comme le raconte le présentateur phare Éric Besnard : « C’est une virgule qui a une identité forte et qu’on retient immédiatement. Quand on entend cette petite musique, on sait que c’est le Multifoot. La petite musique, ça fait quand même près de 30 ans qu’elle retentit dans vos oreilles, c’est pas rien, c’est l’ADN du Multifoot. »

Nos ingés son à l’époque, vers 1992, avaient fait une sélection de petites musiques qu’ils avaient pris un peu partout, et moi, j’ai choisi celle-là.

Qu’elle déclenche les pleurs ou l’euphorie, l’éternelle « petite musique » a surtout marqué les esprits par son caractère intangible, propice au développement de souvenirs marquants, et émotionnellement chargés, d’après Philippe Doucet, père de la non moins fameuse palette technique : « Cette musique est une madeleine de Proust, ça fait partie des repères indispensables. Quand on suit les matchs de foot à la télé, on a besoin de ça, de chercher des repères. Donc il y a le présentateur, mais aussi un certain nombre de choses qui nous marquent de façon indélébile. »

Vous feriez un Multifoot sur la 15e ou 16e journée, ça n’aurait pas la même charge émotionnelle, mais là c’est ce qui va décider de l’avenir de votre club.

Un suspense insoutenable

À l’instar du Mondial ou de la Ligue des champions, la petite musique possède la puissance des grands rendez-vous et des enjeux qu’ils abritent. Des enjeux énormes, puisqu’elle est l’élément annonciateur du futur de votre club, comme le décrit Besnard : « Les deux dernières journées sont les journées qui vous marquent parce que ce sont les journées où tout se décide. Donc la madeleine, elle est là, elle est encore plus forte. Vous feriez un Multifoot sur la 15e ou 16e journée, ça n’aurait pas la même charge émotionnelle, mais là c’est ce qui va décider de l’avenir de votre club. » Mais au-delà de la musique, c’est surtout la seconde entre l’arrivée de la musique et le fameux « But à … » qui raidit les nuques et noue les estomacs. Un suspense insoutenable qui touche même le présentateur et les chroniqueurs en plateau : « On est tous supporters, on sait ce que c’est(…). Quand je l’entends retentir, parfois je la découvre en même temps que vous car je ne peux pas avoir un œil sur les dix terrains. J’ai qu’une envie, c’est de savoir où l’on est, qui a marqué, ce que ça change au classement. Toute la charge émotionnelle de la soirée tient à ça. Si votre équipe est menée, vous n’attendez qu’une chose, c’est qu’elle retentisse. »

Je crois qu’à Canal, personne ne veut y toucher. Donc non, il n’a pas été question de la modifier et encore moins de la supprimer.

Un suspense qui s’est malgré tout atténué avec le temps, et la présence de caméras sur tous les terrains de France. Philippe Doucet : « À l’époque, on n’allait jamais en direct sur le stade. C’est-à-dire qu’on disait : « But à Marseille ! » et à ce moment-là, on revenait sur un magnéto qu’on déclenchait, ce qui fait qu’on voyait une équipe qui avait la balle et on pouvait penser que c’était elle qui avait marqué. Éventuellement, elle perdait la balle et tout à coup c’était l’autre qui avait marqué. Effectivement, on jouait complètement avec le suspense. » Pour autant, le jingle a encore de belles années devant lui. Si Olivier Rouyer « n’imagine même pas le Multiplex sans cette musique », Jérôme Revon l’assure : « Je crois qu’à Canal, personne ne veut y toucher. Donc non, il n’a pas été question de la modifier et encore moins de la supprimer. » Quand c’est culte, c’est culte.

Par Paul Piquard et Morgan Henry

Tous propos recueillis par PP et MH

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