- C1
- Man Utd/OM (2-1)
On était à Old Trafford
Ticket de métro à 3 livres, accent provençal, billets au black, chants à la gloire de Chicharito, Ryan Giggs et Alain Boghossian en vrai. C'est ça le Théâtre des Rêves.
17h heure locale, Manchester, gare de Picadilly. Jour de match : les rames de métros qui mènent au Théâtre des Rêves se remplissent progressivement. La routine. Next stop, un groupe d’une demi-douzaine de personnes entre dans le wagon. Dix secondes suffisent à entendre le mot “enculé” dans une chanson. Les supporters marseillais ont trouvé l’adresse. Côté phocéen, ce match, c’est surtout la cerise sur le gâteau d’une journée passée à écumer les comptoirs. Le quartier d’Old Trafford, à dix minutes environ du centre ville, s’agite déjà à deux heures du coup d’envoi: des adolescents vendent des fanzine à la criée le long de l’allée Matt Busby pendant que lesfish and chips servent leurs premiers clients. Il est à peine 18 heures, mais il se fait faim pour les supporters locaux. Des lads ne se gênent pas pour proposer des tickets au noir à tout ce qui ressemble de près ou de loin à du touriste un peu paumé, le tout, sous les yeux de policiers à cheval. L’occasion d’avoir une première idée du prix à débourser si vient l’envie de se faire un kiff. On n’est pas au Maroc, mais marchander son pass pour le vieux Trafford semble assez simple. Regards, prise de décision puis direction la cash machine siglée MU Finance. On aurait pu avoir la place à meilleur prix, mais fallait se coller les supporters marseillais. No way, plutôt claquer le prix d’un jeu de PS3 pour un siège au milieu des rosbifs. Problème, le sésame porte la mention « réservé au moins de seize ans » … « T’inquiète pas, ça passera nickel, si tu veux, je t’accompagne même au premier barrage » , explique le vendeur à la sauvette. Le tourniquet obéit, le steward explique qu’il est pour City, fond d’écran de portable à l’appui, « Have a good game » . Tout va bien, on peut rentrer dans l’arène. WAOUH .
Les deux équipes s’échauffent, et les fans de l’OM, situés à l’étage du dessus, donnent de la voix et semblent avoir fait du rectum d’Evra leur cible privilégiée. Notre voisin demande qu’on lui traduise les paroles. « C’est bien ce que je pensais » . Le speaker annonce les compos, et on se rend compte que Vidic est out : une aubaine pour Gignac, un stress supplémentaire pour les fans locaux. Limite plus impressionnant que l’ambiance, le silence qui règne dans Old Trafford en hommage aux victimes du Tsunami, troublé seulement par une poignée de supporter visiteurs qui veulent faire les malins. En tribune populaire, halte aux clichés, le supporter local n’est pas forcément Chinois, Paki ou businessman. Et il chante. Dans le East Stand Tier, on croise des roux, des gros, des édentés, des types avec des maillots floqués Smalling et même Alain Boghossian, qui a donc dû se payer sa place derrière les buts, comme tout le monde. Deux types se pointent avec des sombreros : « On est venus de Liverpool, surtout pour voir jouer Chicharito » . Bien vu, le Mexicain est aligné en lieu et place de Berbatov et sera le héros de la soirée en marquant deux fois le même but. Logique, dans un match avec deux paires de jumeaux : les Da Silva vs. les Ayew.
Et sur le terrain, Marseille ne sera pas loin du 2-2. Un dernier quart d’heure difficile, 4 minutes d’arrêt de jeu, des frissons. 21h38, Old Trafford peut respirer, les Red Devils seront une nouvelle fois dans le grand huit. Pour Marseille, en revanche, la fête est finie. Quoi que : « Je me suis fait virer à la mi-temps parce que je fumais près des buvettes » , lâche Sébastien, écharpe de l’OM autour du coup, qui a vu la fin du match depuis un pub. « On a perdu, mais c’était cool. De toute façon, j’étais venu pour le délire entre potes. Heureusement que c’est pas moi qui conduit ce soir. D’ailleurs je peux vous ramener, on est en car ? » . Non merci, le retour se fera à pieds, puis en métro, au milieu des fans mancuniens calmes et silencieux comme un soir de défaite. Manchester est en quarts de la Champions League ? La routine, tout simplement.
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Simon Capelli-Welter et Marc Hervez
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