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Maradona – Che amigo !

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Maradona – Che amigo !

Je voulais t'écrire pour te parler de la crise, des filles, des vacances à Mar del Plata, de la vie quoi. Oui mais voilà, Dieu est ressuscité. Un Dieu villero, flambeur de bordels, aspirateur de coke, mais Dieu quand même.

Au départ, j’avoue, j’étais plutôt, comme la majorité des Argentins, pour que l’on refile enfin le bâton de pèlerin à Bianchi, le magicien, le meilleur entraîneur d’Argentine, le coach du plus beau Boca de tous les temps. Jusqu’à ce que tout le monde se mette à dégainer sur Diego. Ce gros véreux de Pelé, comme toujours. Les Anglais, qui n’ont jamais digéré la petite mimine. Et les Français aussi, qui oublient trop souvent qu’avant de se sniffer la moitié de la cordillère des Andes, Maradona fut le plus grand joueur de tous les temps. Ne me parle pas de Zidane, tu sais bien que l’on en a déjà discuté. Oser toucher à Diego ! C’est l’honneur national, Dieu et la Patrie tout à la fois auxquels on s’attaque mon vieux.

Imagines-tu seulement ce que peuvent devenir les rassemblements de la sélection avec Maradona à sa tête ? It’s gonna be LEGEN..wait for it… DARY! Les conférences de presse, les échauffements, les déplacements au fin fond de l’Amérique du Sud. Mais surtout l’orgie, la panique qu’il va semer si par miracle on gagne en Afrique du Sud. Je t’accorderai qu’en France, vous avez une certaine expérience des sélectionneurs un peu déréglés. Mais avec Maradona, ce sera tout de même d’un autre calibre qu’une vulgaire demande en mariage. Trop classique, trop propre. Diego, lui, nous parlera de la poitrine de Madame Demichelis, de ses pulsions sexuelles pour Julia Roberts, du côté BCBG sexy de Kristina Kirchner.

Tout cela pour te dire de foncer acheter ta place au Vélodrome pour y voir le Pibe de Oro arracher son maillot, le faire tournoyer au-dessus de sa tête, le bidon gras et velu à l’air, en chantant avec sa gouaille villera « Soy argentinoooo, es un sentimiento… » .

Et puis attends qu’il revienne à Naples pour aller superviser le petit Lavezzi. La vie va s’arrêter, la ville en ébullition, la camorra à ses pieds. Tu sais quand j’étais petit, on n’avait que deux chaînes de télé chez nous. La démocratie marchait encore à quatre pattes. Le dimanche matin, on se tapait la messe ou une émission toute pourrie. Mais quand Maradona a débarqué en Italie, exit les curés, c’était le match de Napoli sur les deux canaux. Un drame pour l’Eglise catholique mon pote. Plus moyen pour ma mère de traîner mon vieux à la messe. A la fin, elle aussi a fini par rester à la maison pour admirer le 10 plutôt que d’aller chanter ses cantiques.

Et pour pimenter le tout, Grondona, qui ne peut pas encadrer Maradona, lui a collé Carlos Bilardo comme “manager”. Je ne sais pas si tu te réalises qui est Bilardo. Le seul mec peut-être plus givré que Diego. En 1986, alors que tout le monde fête notre seconde coupe du monde, Carlos fulmine car son équipe a pris deux buts sur corner. Alors il boude, refuse de prendre la photo officielle et rentre direct au vestiaire. Quatre ans plus tard, après la revanche perdue face à la RFA, il courait après Beckenbauer pour le supplier de lui prêter le trophée une seconde, histoire de se prendre en photo avec.

Il faut aussi le voir gesticuler comme un déséquilibré mental sur le bord de la touche, car quand Bilardo sent l’odeur du gazon, il devient complètement hystérique. En 2004, alors qu’il dirigeait Estudiantes, son psy lui avait conseillé de prendre du repos s’il voulait éviter de caner d’une crise cardiaque sur son banc. Le dimanche suivant, le type débarque avec sa bouteille de champagne, sa chaise longue et se plante sur la pelouse du Monumental, répondant aux journalistes qu’il suit simplement les recommandations de ses médecins. Cinglé, je te dis.

Et ils nous mettent ces deux animaux, qui s’étaient mis dessus sérieux quand ils étaient ensemble à Séville, à la tête de la sélection nationale. Aïe, aïe, aïe papito, quel beau pays nous avons ! Le bordel, le n’importe quoi. L’instabilité permanente, la locura. Argentina papa !

Maradona sélectionneur, c’est Coluche président. Un petit gros rigolo, toujours avec le peuple. Quand on s’est tous fait berner comme des bleus par Menem en voyant en lui un sauveur néo-péroniste, Maradona était avec nous, en première ligne même. La tête baissée qu’il y est allé le bougre, toujours aux côtés de ce vieux salaud. Et aujourd’hui « siempre con el pueblo » , Diego parade avec Chavez et Fidel, du moins ce qu’il en reste. Aucune contradiction là-dedans che, on a tous fait la même chose. Car Diego c’est le Pibe, le mec, ton voisin, ton pote d’enfance, le type avec qui tu jouais au foot en bas de l’immeuble. Diego, c’est l’Argentine.

Et ne viens pas me dire que tu t’inquiètes pour la compétitivité de l’Albiceleste. Déjà, pour la tactique et la rigueur, on a Bilardo, pas de problème là-dessus. S’il est mentalement un peu dérangé, le “docteur” reste un crack. C’est Rainman sur le banc.

Et puis, amigo, imagine-toi ce que ça va être pour les Messi, Tevez, Riquelme de jouer sous les yeux de Diego. Tu te rappelles de ces matchs du dimanche matin, quand tu te mettais à courir plus vite et à frapper plus fort à l’instant où tu voyais ton père ou ton grand frère arriver au bord du terrain pour voir la fin de ton match ? Eh bien, pour eux, ce sera la même chose mec mais avec Dieu assis sur la barrière une bière à la main. Tevez l’idolâtre, entre villeros on se comprend. Messi veut être lui. Et Roman pleurait toutes les larmes de son corps quand Maradona a enfilé son maillot pour la deuxième mi-temps de son jubilé à la Bombonera.

Alors oui, Maradona va être scandaleux. Des conférences de presse incohérentes, des choix tactiques discutables, des mises au vert un peu spéciales. Mais peu importe. Qu’il redonne de la gloire à la camiseta et montre au monde entier comment on joue au football en Argentine. Qu’il nous rapporte la coupe du monde et on clamera encore son nom dans deux mille ans.

C’est vrai, Maradona sélectionneur, c’est un peu inconscient, complètement imprévisible. Cela aurait été tellement plus facile pour lui de rester cloîtré, de la fermer et de préserver son aura. Mais c’est pas le genre de la maison. Diego ne pourra jamais s’empêcher de vivre dans la lumière, de descendre dans la rue, d’aller à la Bombonera. Mais surtout de nous faire rêver. Et puis après tout, c’est pas un type de chez vous qui chantait « Si yo fuera Maradona, viviria como el… » ?

Par Pierre Boisson

Un derby, deux grands corps malades

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