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Le jour où il y avait penalty sur Nilmar

Par Maxime Feuillet
Le jour où il y avait penalty sur Nilmar

Le 13 avril 2005, l’OL se déplaçait au Philips Stadion d’Eindhoven pour y affronter le PSV en quart de finale retour de la C1. Un match marqué par une grossière erreur d’arbitrage du Danois, Kim Milton Nielsen, qui a probablement privé l’OL d’une des plus belles pages européennes de son histoire.

Douze ans plus tard, le souvenir reste toujours aussi douloureux pour les amoureux de l’Olympique lyonnais. Ainsi, lorsque Memphis Depay débarque au club en janvier dernier, l’une des premières questions posées par Héloise Basson, journaliste à OLTV, au joueur formé au PSV Eindhoven, concerne cet accrochage entre Heurelho Gomes et Nilmar pendant la prolongation du quart de finale retour de la Ligue des champions cuvée 2004-2005 entre l’OL et le PSV. « C’était il y a longtemps, je ne me souviens pas, répond alors l’ailier néerlandais, avant de se montrer bien plus loquace une fois les images revisionnées. Bien évidemment il y a penalty. » Si les Lyonnais reprochent souvent à leurs voisins stéphanois leur manie de vivre dans le passé, ce « penalty sur Nilmar » ressemble pourtant trait pour trait « aux poteaux carrés » des Ligériens à Glasgow en mai 1976. Deux faits de jeu qui auraient pu considérablement modifier le destin européen des deux clubs rhônalpins. Deux faits de jeu aujourd’hui entrés dans l’histoire et la mythologie de ces deux écuries, et dont la légende se perpétue avec les supporters et les anciens joueurs des deux bords. Ainsi, au moment d’annoncer l’arrêt de sa carrière en 2015, l’ancien Lyonnais, Jérémy Berthod, terminait sa lettre de la sorte : « Mais au moment de faire le bilan de ma carrière, je n’ai aucun regret. Ah si ! Un seul ! Il y avait penalty sur Nilmar ! »

Aulas : « Le match le plus important de l’histoire du club »

Premier de leur poule devant le Manchester United de Van Nistelrooy et Cristiano Ronaldo, les hommes de Paul Le Guen terrassent ensuite le Werder Brême en huitièmes de finale avec un cinglant 7-2 au retour, à Gerland. De quoi effrayer Johann Vogel, milieu suisse du PSV (1999-2005), après l’annonce du tirage au sort : « Ils étaient déjà trois ou quatre fois champions de France. C’était une équipe soudée qui se connaissait bien et puis ils avaient des individualités incroyables. Je pense à Cris qui tenait la baraque derrière, et puis à Juninho qui pouvait faire la différence à n’importe quel moment. » Mais les joueurs de Guus Hiddink ne s’avouent pas vaincus d’avance pour autant : « Lors de nos six dernières participations en Ligue des champions, on n’arrivait jamais à passer le premier tour. Là, on avait réussi et on avait même éliminé Monaco en huitièmes, qui était le finaliste de l’édition précédente, donc on se disait qu’on avait une chance. » Et malgré la domination lyonnaise lors du match aller et la rapide ouverture du score signée Florent Malouda – du droit – dès la douzième minute de jeu, les joueurs du PSV font le dos rond et égalisent à dix minutes du terme grâce à Phillip Cocu. Score final 1-1 et ballottage favorable pour les Néerlandais avant le retour au Philips Stadion huit jours plus tard.

Ce 13 avril 2005 à Eindhoven, les Gones sont donc dans l’obligation d’inscrire au moins un but s’ils veulent poursuivre leur aventure européenne et se qualifier pour la première fois de leur histoire en demi-finale de la Ligue des champions. Un an après le rendez-vous manqué face au FC Porto de José Mourinho au même stade de la compétition, Jean-Michel Aulas fait monter la sauce dans la presse en parlant du « match le plus important de l’histoire du club » . Et l’histoire semble être en marche lorsque Sylvain Wiltord fait trembler les filets sur la première occasion lyonnaise à la dixième minute de jeu, profitant d’une relance hasardeuse de l’international néerlandais Wilfred Bouma dans l’axe. « À ce moment-là, on se dit qu’on a fait le plus dur, témoigne Nicolas Puydebois, qui assiste à la rencontre depuis le banc de touche en tant que doublure de Greg Coupet. On a juste à rester dans le match et à jouer comme on sait le faire pour se qualifier. »

Le show Mark van Bommel

À la pause, le score est toujours à l’avantage des Lyonnais. « L’atmosphère dans le vestiaire à la mi-temps était très sereine, explique aujourd’hui Puydebois. On était conscients qu’il restait encore une mi-temps, qu’il fallait tenir et que ça allait être compliqué puisqu’on jouait un quart de C1 mais personne ne s’affolait. On avait l’habitude de gérer ce genre de situations, ce genre de matchs. On avait un groupe d’expérience avec beaucoup de leaders comme Juninho, Diarra ou Greg qui avaient pris la parole à ce moment-là. » Pas d’affolement non plus dans le camp d’en face selon les dires de Johann Vogel : « Guus Hiddink était assez tranquille. Des joueurs comme Cocu ou Van Bommel aussi. Il nous suffisait de mettre un seul but pour revenir dans le match et on était sûrs de pouvoir marquer. Avec l’apport du public, on savait qu’on pouvait le faire. »

Les joueurs du PSV voient juste. Après seulement cinq petites minutes de jeu en seconde période, Alex, à la réception d’un coup franc de Van Bommel mal renvoyé par la défense lyonnaise, remet les deux équipes à égalité par un superbe enchaînement contrôle poitrine – volée croisée. Les Néerlandais sont de retour et comptent bien jouer un mauvais tour aux Lyonnais. À commencer par Mark van Bommel, capitaine du club batave, qui démarre alors son numéro auprès de l’arbitre de la rencontre, le Danois Kim Milton Nielsen, à coups de grands sourires, contestations incessantes et petites tapes amicales sur l’épaule. « Sur le moment c’est agaçant parce qu’on sait ce qu’il est en train de faire, mais on n’a pas de maîtrise là-dessus, on ne peut rien faire. On savait que c’était un paramètre à prendre en compte, van Bommel on l’avait identifié depuis le match aller, avance Nicolas Puydebois. On savait qu’il était là pour pourrir le match avec son jeu, son comportement, qu’il était capable d’aller voir l’arbitre et d’influencer quelques décisions arbitrales. Ce n’était pas dans notre tactique de faire dégénérer un match ou d’influencer l’arbitre. Pour nous, la victoire devait passer par le jeu. »

Pas penalty pour Lyon

Si la tension se fait ressentir sur le terrain, la fin de match est plutôt cadenassée. Les deux équipes se neutralisent en attendant la prolongation. Score final 1-1, le public du Philips Stadion aura droit à 30 minutes de frissons supplémentaires. Paul Le Guen remobilise alors ses troupes sur le bord du terrain et décide d’injecter du sang neuf sur le plan offensif en remplaçant Wiltord par le jeune attaquant brésilien Nilmar. Et le futur buteur de la Seleção ne tarde pas à se mettre en évidence. À la 100e minute de jeu, il profite d’un ballon dévié par Govou pour prendre de vitesse les défenseurs adverses, Alex et Lee Young-Pyo, et s’en va disputer le cuir au portier du PSV Heurelho Gomes dans un duel à la limite de la surface de réparation. Devancé sur sa sortie, le gardien brésilien fauche son compatriote qui s’effondre instantanément. Thierry Gilardi et Jean-Michel Larqué s’emportent depuis le poste commentateur : « Oh penalty !!! Accroché ! Oh penaltyyy ! Qu’est-ce qu’il dit M.Nielsen ? Il dit sortie de but ??? Monsieur Nielsen, qui était à 30 mètres de l’action ! Ohlalala… Alors on va revoir ça. Mais oui, il y a penalty ! Il n’y a pas de doute, Monsieur Nielsen… » Malgré les revendications de Juninho et Ben Arfa, Kim Milton Nielsen n’accordera jamais ce penalty aux Lyonnais. Une décision qui fera longtemps cauchemarder Grégory Coupet, aujourd’hui quand on l’interroge sur cette rencontre, il répond : « Désolé, je n’ai pas suffisamment de mémoire pour évoquer ce match. Seul ce penalty non sifflé me reste en tête à jamais, tout en étant conscient qu’il n’était pas marqué d’avance. »

« Il a la mémoire sélective, Greg, se marre son ancienne doublure, Nicolas Puydebois. Comment l’arbitre peut ne pas siffler penalty sur cette action-là, c’est incompréhensible. Depuis le banc de touche, c’est flagrant. Et quand on voit les images, c’est encore plus évident ! » Une décision arbitrale également surprenante aux yeux de Johann Vogel : « En étant sur le terrain, j’avais l’impression qu’il y avait penalty, mais ça se passait du côté du juge de ligne qui était très bien placé sur l’action. S’il a décidé de ne rien signaler, c’est que ce devait être la bonne décision. » Contacté pour lever le voile sur cette affaire, l’ex-arbitre international, Kim Milton Nielsen, n’a pas souhaité répondre à nos questions. Reste que ce penalty non-sifflé aurait pu radicalement changer le cours de la rencontre puisqu’en cas de but lyonnais, les Bataves auraient dû marquer à deux reprises par la suite pour voir la demi-finale de C1. « Sur le moment, c’est frustrant. On sait qu’on aurait mérité d’avoir ce penalty, c’est une réelle injustice, mais on se dit qu’il y aura d’autres opportunités avant la fin du match. » , affirme Puydebois. Il n’en sera rien, l’OL et le PSV se départageront aux tirs au but.

Les larmes de Juninho, les joueurs du PSV dans le vestiaire des arbitres

Pas vraiment en réussite dans cet exercice dans leur histoire, les Lyonnais placent donc leur survie européenne entre les gants de Grégory Coupet. « On savait qu’il pouvait nous en arrêter un, voire deux, avance Puydebois. C’était le meilleur gardien français du moment. Il est très croyant et il avait foi en lui, en son destin, en son étoile. » Impérial face à Beasley, le portier international assiste cependant aux premières loges aux échecs d’Essien puis d’Abidal avant de s’incliner sur le tir au but victorieux de Robert sous la pluie d’Eindhoven. L’OL est éliminé de la Ligue des champions et s’arrête une nouvelle fois en quarts de finale. Juninho, passablement énervé, quitte le terrain en larmes avant d’interpeller Paul Le Guen quelques minutes plus tard dans le vestiaire, lui reprochant notamment de ne pas avoir travaillé les tirs au but dans la préparation de la rencontre. Le visage marqué, l’entraîneur lyonnais explique quelques minutes plus tard en zone mixte avoir vécu sa « plus grande désillusion en tant qu’entraîneur » , précisant qu’un « arbitrage différent aurait été nécessaire » . Même son de cloche pour le président Aulas qui pointe du doigt la prestation de M. Nielsen : « Toute la responsabilité n’est pas sur les épaules de l’arbitre, mais si on n’est pas allés en demi-finales cette fois, ce n’est pas seulement la faute des joueurs. »

Un autre détail trouble particulièrement les joueurs lyonnais après la rencontre. Puydebois : « Quand on est rentré aux vestiaires, on a vu quasiment tous les joueurs du PSV sortir du vestiaire de l’arbitre sans leur maillot, alors qu’ils étaient rentrés avec. Entre ça et l’erreur d’arbitrage, forcément tu te poses des questions. » Dix ans après, cette élimination contre le PSV de Farfán, Ooijer, Park Ji-Sung ou Vennegoor of Hesselink ne semblait toujours pas digérée par Juninho qui revenait sur cette rencontre sur RMC en 2013 : « Le PSV, ça fait encore mal. J’aurais voulu gagner la Ligue des champions. On pouvait battre n’importe quelle équipe européenne. » Un constat partagé par Nicolas Puydebois : « On a peut être loupé notre rendez-vous avec l’histoire. Ça nous aurait permis d’aller en demi de C1 et peut-être même plus loin. Cette année-là et l’année d’après à Milan, on avait l’effectif pour prétendre à quelque chose de grand et peut-être marquer l’histoire du foot français. Avec le jeu qu’on pratiquait, les personnalités qu’on avait dans cette équipe, on aurait pu gagner l’amour du public français de manière plus générale. » Mais le Lyon 2005 ne sera jamais le Saint-Étienne 1976.

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Par Maxime Feuillet

Propos de Nicolas Puydebois, Johann Vogel et Grégory Coupet recueillis par MF

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