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Patrick Berg : « Il n’y a pas de meilleur endroit sur Terre que Bodø »

Propos recueillis par Ulysse Llamas, à Bodø
8 minutes

Comme son père, son grand-père et deux de ses oncles, Patrick Berg joue à Bodø/Glimt. Lui est parti tester la Ligue 1, à Lens, mais est revenu à la maison pour emmener son club en Ligue des champions, compétition dans laquelle il croisera ce mardi l’AS Monaco. Entretien.

Patrick Berg : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Il n’y a pas de meilleur endroit sur Terre que Bodø<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Tu es né ici, as grandi ici, ton papa a joué ici, ton grand-père a joué ici, tes oncles ont joué ici. Quels sont tes premiers souvenirs de foot ?

Le foot fait partie de ma vie, je n’ai pas d’autres souvenirs. Avant de marcher, je jouais déjà avec un ballon. J’ai grandi avec les histoires de mes parents, de mon grand-père et de ma famille. Toute mon enfance était tournée vers le foot. J’allais voir jouer mon père à chaque match à domicile. Dès la maternelle, je jouais en club. Je jouais aussi à la maison, partout. Le foot, c’est vraiment toute ma vie. Il n’y avait pas d’autre option.

À partir de quand as-tu pensé que tu pouvais devenir un joueur professionnel ?

Ça a toujours été mon rêve. Quand ton papa est déjà professionnel, tu peux plus facilement te dire que c’est possible. C’est différent chez les gens qui grandissent avec des parents qui font des boulots normaux. Ils voient ça comme un rêve, puis comme un espoir, mais pas forcément comme quelque chose de possible. Aujourd’hui, je poursuis l’héritage.

Tu voyageais avec ton père ?

Non, pas vraiment. J’allais à tous les matchs à domicile. Il a beaucoup joué à Rosenborg. Donc de mes 1 à mes 9 ans, je n’ai pas vécu ici, mais à Trondheim, la ville où joue Rosenborg. C’est plus au sud.

Il est rentré à Bodø à la fin de sa carrière ?

On est rentrés ici après sa retraite de joueur. Mes deux parents sont originaires de Bodø. À cette époque, Bodø/Glimt n’était pas le meilleur club de Norvège, ils jouaient même en deuxième division. Mon père aspirait à jouer la Ligue des champions tous les ans. On ne pouvait pas comparer Bodø/Glimt et Rosenborg, les deux étaient à des années-lumière ! Grandir à Bodø il y a 20 ans était très différent d’aujourd’hui. Maintenant, les enfants ne supportent plus Rosenborg. Partout dans le pays, les enfants du sud de la Norvège nous adorent, nous associent aux matchs contre Tottenham et José Mourinho.

On est un peu comme le PSG en France.

Patrick Berg, étoile de Bodø.

Est-ce que tu t’es habitué à être dans la position du vainqueur ?

C’est très stimulant et enrichissant, à condition d’en être conscients. On est un peu comme le PSG en France : tout le monde veut nous battre et ça nous motive encore plus. Tous les clubs du monde ont du mal à rester au sommet après plusieurs années. On sait ce que c’est. En 2022, on a eu une petite chute, on a terminé deuxièmes du championnat. C’est la seule année où on ne gagne pas le championnat, depuis 2020. Ce n’était pas un désastre, mais si on ne s’était pas remis en question, ça aurait été plus difficile. J’estime que, maintenant, ça y est, on a de l’expérience.

 

C’est-à-dire ? Notre petite chute date de l’année où je vais à Lens. J’y reste huit mois, et quand je rentre, je sens que la mentalité a changé. On commençait à se plaindre des autres équipes, de la manière dont elles jouaient. On se lamentait en disant qu’elles étaient regroupées en défense. On se concentrait trop sur les autres, et plus sur nous. Or je pense qu’il faut d’abord nous regarder nous, voir ce qu’on peut faire, comment on peut s’améliorer. Si nos adversaires veulent nous mettre en difficulté, c’est chouette. Ce serait ennuyant s’ils ne tentent rien. On doit prendre ça comme un challenge marrant, ou en tout cas essayer de le rendre marrant. Le truc pénible, c’est d’arriver au stade en se disant « oh non, merde, ils vont mettre 11 mecs en défense, ça va être difficile de marquer. » C’est en affrontant la difficulté qu’on progresse.

C’est ma responsabilité de faire apprendre tout ça aux joueurs, de leur affirmer qu’on est safe ici. On n’est pas dans une culture macho, où on doit être durs tout le temps. Ici, on s’écoute.

Patrick Berg

Tu en parles à votre entraîneur Kjetil Knutsen ?

Oui, bien sûr. On a aussi un coach mental. On a des groupes de capitaines où on discute, des réunions individuelles. On parle de tout : de notre vie privée, de nos états d’âme, des difficultés qu’on rencontre. En tant que capitaine, c’est aussi ma responsabilité de faire apprendre tout ça aux joueurs, de leur affirmer qu’on est safe ici. On n’est pas dans une culture macho, où on doit être durs tout le temps. Ici, on s’écoute.

Comment cela se matérialise-t-il ? Quand des nouveaux joueurs arrivent, tu les accompagnes visiter les montagnes ? 

Oui, on peut faire ce genre de choses. Le plus important est de travailler ensemble. Je pense que tout le monde ressent qu’on est un groupe qui vit bien, chaleureux et où les gens s’adaptent vite parce qu’ils s’y sentent comme à la maison. C’est même une bonne stratégie pour le club, parce qu’à terme, les joueurs progressent plus vite et peuvent être bien vendus à des plus grands clubs. On est tous embarqués dans le même bateau. Il ne suffit pas d’avoir un coach mental qui essaye de faire un truc, un entraîneur un autre, un coach sportif une autre. Non, tout le monde travaille dans la même direction.

Kjetil Knutsen change-t-il avec la Ligue des champions ? 

Il s’adapte beaucoup. On a bien sûr des principes : on préfère jouer offensif, pas forcément du tiki-taka, mais redoubler les passes, chercher la faille. De plus en plus de nos adversaires jouent très bas sur le terrain, donc on doit trouver des manières de les contourner. On progresse d’année en année, même si nos meilleurs joueurs partent, par exemple Victor (Boniface) ou Albert (Grønbæk). Je pense que la clef principale est de parler de performance, de progression. Pas de victoire. Dire qu’on peut gagner, c’est très simple. C’est trop simple même : absolument tout le monde veut gagner. Notre but, c’est de voir comment on peut gagner. Kjetil est concentré là-dessus. Le résultat, si on gagne 5-0, est difficile à améliorer. Mais le contenu, même à 5-0, peut être amélioré. On peut toujours progresser, au niveau individuel comme collectif.

 

Que représente le fait de jouer la Ligue des champions à Bodø ?

De la fierté bien sûr. Voir les gens dans la ville, voir à quel point ils sont fiers de nous, c’est quelque chose d’inspirant. Quand j’étais petit, ce n’était pas le cas. Les gens avaient presque honte d’être de Bodø. Ils parlaient de nous comme d’une équipe de merde, qui ne performait pas. Aujourd’hui, c’est tout le contraire. Quand les habitants de Bodø voyagent, ils se sentent fiers d’être d’ici. Je pense qu’on fait beaucoup pour la ville et les gens.

Comme à Lens ?

J’ai adoré l’expérience. Lens est un grand club, mais aussi très familial. J’ai adoré aussi le coach Franck Haise. Mais je n’ai pas réussi à jouer autant que j’aurais voulu. Je parlais beaucoup avec le coach de l’équipe nationale norvégienne à l’époque, qui me disait que je ne pouvais pas rester dans une équipe où je ne jouais pas. J’allais perdre ma place, et je ne voulais pas. L’équipe nationale est quelque chose de très important pour moi, donc c’est pour ça que j’ai décidé de quitter Lens. Pour moi, c’était une bonne chose de partir, de quitter mon pays, de me développer et d’apprendre de moi-même.

Peut-être que le système lensois ne me convenait pas parfaitement.

Patrick Berg

La Ligue 1, c’était comment ? C’était dur, physique ?

Oui, la Ligue 1 est très physique. Il y a beaucoup de joueurs à la fois très costauds et très rapides. Pour moi, ça va si le système de jeu développé permet de contrer ça, mais peut-être que le système lensois ne me convenait pas parfaitement. Je savais qu’en allant là-bas, j’allais sortir de ma zone de confort. J’ai beaucoup appris. À la fin, peut-être que le staff ne m’a pas assez fait confiance pour me titulariser. Et quand vous ressentez ça, c’est difficile. Donc j’ai décidé de rentrer à la maison.

 

Tu parles d’adaptabilité dans ton jeu ici, mais tu n’es pas parvenu à t’adapter à Lens. Tu lis Darwin ?

Non, je ne lis pas beaucoup. J’ai deux enfants. Le dernier est né cet été. La grande va avoir trois ans, donc j’ai une vie de famille très prenante. Sinon, j’adore aller pêcher. En Norvège, et surtout ici, c’est normal. On grandit à côté de l’eau, dans les montagnes, on peut aller faire de l’escalade. Il m’est impossible de vous dire qu’il existe un meilleur endroit sur Terre, tout est magnifique.

Pourquoi la pêche ?

Parce que c’est à la fois calme et qu’on a des poussées d’adrénaline quand le poisson arrive. C’est relaxant, il y a la paix et la nature. C’est parfait pour déconnecter du foot et de la vie. Et puis toute ma famille pêche. Quand on allait en vacances avec mes parents, on partait avec les cannes. Ça fait partie de ma vie.

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Propos recueillis par Ulysse Llamas, à Bodø

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