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Et si le Borussia Dortmund arrêtait de faire sa victime ?

Par Sophie Serbini
Et si le Borussia Dortmund arrêtait de faire sa victime ?

À chaque intersaison, c'est la même histoire : que le Borussia perde des joueurs ou non, l'heure est à la victimisation du côté de Dortmund. Si on en croit les propos du boss Hans-Joachim Watzke, le 11e club le plus riche du monde serait en fait pauvre et incapable de rivaliser avec les plus riches. Une rengaine qui devient de plus en plus indigeste et contre-productive.

Pour la première fois depuis quatre ans, le Borussia Dortmund semble en passe de conserver tous ses joueurs phares. Une nouveauté bien agréable, mais qui n’a aucunement empêché Hans-Joachim Watzke de se livrer à son jeu préféré : faire pleurer dans les chaumières. Pas plus tard qu’il y a quinze jours, le boss du BvB n’a pu s’empêcher, pour la énième fois, d’évoquer la richesse de certains de ses concurrents directs. « Lorsque nous avons défilé après notre doublé Coupe/Championnat en 2012, nous étions à bord d’un bus. À Wolfsburg, ils ont paradé en Lamborghini. C’est comme ça » , a-t-il déclaré à la suite d’une question posée par la presse allemande sur la richesse du club de Volkswagen. Watzke n’a pas non plus hésité à dire que « seul le VfL Wolfsburg pourrait concurrencer le Bayern Munich dans le futur puisqu’ils possèdent les ressources financières suffisantes pour être un grand club. » Entendez par là que le Borussia ne peut concurrencer le Bayern, car eux n’ont pas les moyens. Dire que Wolfsburg a plus de moyens que le BvB, c’est gros. Trop gros. Si, traditionnellement, les clubs allemands n’aiment pas publiquement parler de leurs budgets, le site internet de l’émission culte Sportschau a fait ses recherches et avancé que lors de la saison 13/14, Dortmund possédait le deuxième plus gros budget de Bundesliga avec 228 millions dans ses poches, loin devant Wolfsburg et son budget compris entre 160 et 190 millions d’euros (4e budget quand même). Et pas sûr que l’année suivante (celle qui vient de s’achever, donc), Wolfsburg ait bénéficié de largesses de la part de la maison-mère. Car oui, le VfL (sous l’impulsion de VW) pourrait en théorie dépenser des sommes élevées sur le marché des transferts, mais le Borussia aussi, non ?

Porte-parole des pauvres, sérieusement ?

La saison dernière, le BvB a dépensé un peu plus de 90 millions d’euros sur le marché des transferts, alors que Wolfsburg a déboursé un peu moins de 40 millions. Et à la différence des Loups, les Borussen n’ont pas besoin d’un investisseur unique et généreux pour assurer leur pérennité économique. Après avoir frôlé la faillite en 2005, le club de la Ruhr s’est relevé doucement, mais sûrement en diversifiant ses investisseurs, mais aussi ses activités. Aujourd’hui, la dette ne représente plus que 6% du capital du club, une rareté dans le paysage actuel. De plus, le Borussia possède la plus grosse affluence d’Europe et la billetterie représente plus de 35% de ses recettes. Wolfsburg et son public clairsemé ne peuvent en dire autant. En confondant la richesse de Volkswagen avec celle de son club, Watzke fait une erreur classique pour les quidams, mais indigne de son rang. Si on part du principe que seul l’actionnaire majoritaire compte et qu’il est en mesure de mettre l’argent sur la table pour ramener des titres, alors Leverkusen ou encore Hoffenheim posséderaient des palmarès monstrueux. En ayant ce discours critique envers les clubs à mécène, le Borussia participe à ce sermon populiste très apprécié des supporters allemands qui réclament un football plus humain et moins basé sur la puissance économique. Or, le Borussia est un étrange porte-parole pour cette noble cause, alors qu’il n’est plus vraiment cette entreprise au bord de la faillite qui lutte pour sa survie.

Le dogme de l’ « Echte Liebe »

Cette volonté de passer pour un club modeste est bien évidemment liée à une stratégie de communication de la part du BvB. Le but : continuer d’opposer une Ruhr travailleuse et honnête au reste de l’Allemagne – plus particulièrement la Bavière – riche et prétentieuse. Cette tactique n’est évidemment pas nouvelle et n’est pas exclusivement liée au sport, puisque dans à peu près toutes les composantes de la société allemande, la Ruhr et la Bavière s’opposent, mais elle est de plus en plus utilisée par les Schwarzgelben. Et les dirigeants du BvB poussent même la dichotomie un peu plus loin. Car au-delà de l’habituelle lutte des classes, le Borussia joue sur une autre corde : celle de l’amour véritable par le biais de son slogan « Echte Liebe » . L’idée étant qu’à Dortmund, on aime le football du plus profond de son âme et surtout, qu’on aime mieux que les autres. Si l’on en croit les dirigeants, Dortmund aurait le monopole du cœur et des valeurs. Le Bayern et les autres n’auraient pas de vrais supporters ni de joueurs attachés à leurs racines. Philipp L., Thomas M. et consorts apprécieront. Lorsque Marco Reus a prolongé au printemps dernier, la communication tournait exclusivement autour de son appartenance à l’identité Schwarz und Gelb. Bien évidemment, l’amour que porte l’international allemand à sa ville et à son club est réel. Mais opposer son choix de rester à celui de Götze ou de Lewandowski de partir relèverait presque de la manipulation. À compter de cette saison, Marco Reus sera payé plus de 8 millions d’euros par an (hors bonus). À cela, il faut ajouter une revalorisation de son contrat avec son sponsor Puma qui se trouve être également celui du BvB. Marco Reus a fait le choix du cœur, mais aussi celui de l’argent. Et si les dirigeants avaient proposé la même chose à Lewandowski, nul doute qu’il aurait lui aussi fait le choix du cœur. L’amour véritable a tout de même un prix. Râler quand les autres clubs allemands – mais aussi européens – donnent des salaires importants est déjà assez limite. Faire la même chose, mais continuer à essayer de jouer les misérables, c’est être tout bonnement hypocrite.

Donner de la voix

À un moment, le Borussia Dortmund va devoir se libérer de cette image de victime pour avancer. Faire sa pleureuse et attaquer les autres, ce n’est pas vraiment très attrayant. Pire : ça nuit à l’image sympathique que le club possède un peu partout dans le monde. Car nombreux sont les supporters du BvB qui commencent à s’agacer de cette communication qui fait passer le Borussia pour un club de losers, alors qu’il est un des clubs moteurs de la Bundesliga depuis deux décennies. Les « on ne peut pas matcher les salaires » et « on ne peut pas retenir les joueurs » ne convainquent plus grand monde. Le Borussia doit s’imposer et arrêter de s’excuser de vivre. Et même si les exemples de clubs sympathiques et victorieux ne sont pas légion en ce moment, pourquoi le Borussia ne pourrait-il pas réussir à allier les deux ? Lorsqu’on possède le plus beau stade d’Europe, un des publics les plus chauds, des investisseurs sérieux, une histoire magnifique et une identité si forte, on doit voir les choses en grand. Ne serait-ce que pour remercier tous ces gens qui supportent le club sans retenue et qui parcourent chaque semaine des centaines, voire des milliers de kilomètres. Donner le meilleur de soi-même, et ne pas chercher à se rabaisser : et si c’était ça, avoir des valeurs ?

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