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Deschamps transforme son tir au Hub'

Par Clément Gavard, au siège de la FFF

Didier Deschamps a sorti les crocs à l'occasion de sa première conférence de presse cette année. Entre deux réponses classiques, le sélectionneur a fait passer un message à Hubert Fournier et à la DTN, qui souhaitent la mise en place d'une stratégie pour progresser sur les tirs au but. Le patron des Bleus, ça reste DD.

Deschamps transforme son tir au Hub'

Rien ne ressemble plus à une conférence de presse de Didier Deschamps qu’une autre conférence de presse de Didier Deschamps. Ce jeudi, pour sa première de l’année, le sélectionneur s’est présenté avec quelques secondes de retard sur l’estrade de l’auditorium du siège de la FFF. Il a égrené les 23 noms qui seront du rassemblement de mars à Clairefontaine, comme d’habitude. Il a coupé les questions des journalistes avec des commentaires ou des petites vannes, comme d’habitude. Il a répété le discours qu’on lui connaît sur les absents, les présents, Kylian Mbappé, les JO – rappelant que Thierry Henry était le décideur, mais aussi que l’Euro serait la priorité –, comme d’habitude.

Puis, il a changé de ton quand il a fallu répondre à l’annonce de la mise en place d’une stratégie globale sur les tirs au but au sein de toutes les sélections par la DTN, après les échecs répétitifs dans cet exercice des sélections masculine, féminine et des équipes de jeunes. On ne sait pas si le technicien s’attendait à cette question, mais il avait sans doute préparé sa réponse. Celle-ci a duré un peu plus de six minutes, au cours desquelles il a taclé Hubert Fournier en glissant qu’il ne viendrait pas parler de son projet à Clairefontaine ce mois-ci (« ce n’est pas prévu au programme ») et rappelé son approche et son point de vue sur la préparation des séances couperets. Deschamps avait rarement été aussi offensif et bavard, ce qui devrait faire du bruit à la FFF et ce qui rappelle une chose : il reste le patron absolu des Bleus.

Mauvaises intentions et tensions

Il est nécessaire de poser le contexte pour comprendre cette sortie inattendue. Depuis la défaite de l’équipe de France en finale de la Coupe du monde U17 contre l’Allemagne (2-2, 4 TAB 3), Hubert Fournier, intronisé directeur technique national en 2017, prépare le terrain d’une révolution philosophique autour de cet exercice honni des sélections tricolores au XXIe siècle. Début février, il présentait ainsi à RMC le processus mis en place par la DTN pour améliorer les performances françaises dans ce domaine, et cela fait après tout partie de son travail. L’ancien coach de Reims et de l’OL avait mis les sélectionneurs et les entraîneurs au centre de la réflexion, assurant qu’ils étaient « les responsables, et tout part d’eux ». Avant de donner ce qui pourrait s’apparenter à des consignes à un technicien confronté à une séance : « Il devra leur proposer un scénario en essayant au maximum de contextualiser la séance de tirs au but. Et puis il devra leur proposer des exercices variés qui leur permettront de créer de la confiance personnelle chez les tireurs. Et puis il faudra aussi préparer, au même titre que celle pour le match, une vraie stratégie en lien avec cette spécificité qu’est le tir au but. »

Ce qui me gêne et ce que je trouve déplacé, c’est la sortie médiatique du DTN. Je dirais même qu’elle est irrespectueuse.

Didier Deschamps, en colère

Il faut croire que Deschamps n’a pas du tout goûté cette planification et que les deux hommes n’avaient pas échangé à ce sujet. Le linge sale aurait pu se laver en privé, le sélectionneur a choisi de le faire en public, et ce n’est jamais une décision prise au hasard. « Qu’il y ait des études faites là-dessus, aucun problème. En revanche, ce qui me gêne et ce que je trouve déplacé, c’est la sortie médiatique du DTN, a grogné DD. Je dirais même qu’elle est irrespectueuse, pas par rapport à moi, mais à tous les entraîneurs nationaux, les gardiens de but, les analystes vidéo. Ce sont des mecs compétents, qui font du boulot, qui préparent les séances. »

Relancé une fois après son monologue, il a encore chicoté les mollets de Fournier et de la DTN en se demandant ouvertement pourquoi la France avait du mal à avoir des latéraux : «  Qui peut y répondre ? Je ne sais pas. Le DTN ? Peut-être. » Encore ? Oui, encore, puisque Deschamps était en colère et qu’il a poursuivi en lâchant quelques sous-entendus. « Je m’appuie énormément sur la DTN, j’ai tous les observateurs qui viennent de la DTN, pas de problème. Après, qu’il y ait peut-être de mauvaises intentions, et je ne vise pas spécialement le DTN, de certaines personnes… C’est de notoriété publique, mais ce n’est pas gênant, a-t-il souri. Je suis ouvert aux nouvelles expériences, mais il faut un vécu aussi. Être sur le banc, gérer, c’est important. »

Loterie et rapport de force

Après quasiment douze ans passés dans le costume du sélectionneur des Bleus, Deschamps le sait mieux que personne, même s’il n’aime pas le dire : la fonction est aussi politique, parfois, et l’ancien milieu de terrain sait comment s’y prendre quand il s’agit de mettre les points sur les i. La mise en retrait l’an dernier de Noël Le Graët, dont il était très proche, n’a rien changé à son pouvoir ni à son influence. Au moment d’aborder un septième tournoi majeur cet été avec l’Euro en Allemagne, il reste le grand patron de l’équipe de France et s’impose toujours comme une figure majeure du football français aujourd’hui. Il se dit ouvert à tout, mais on ne transforme pas non plus les idées d’un homme de 55 ans, ultra-expérimenté et multititré.

Il est impossible de récréer une situation, sur un plan psychologique, entre l’entraînement et un match avec une prolongation.

Didier Deschamps

Les deux dernières aventures tricolores, à l’Euro 2021 et à la Coupe du monde 2022, avaient pris fin sur des séances de tirs au but perdues contre la Suisse et l’Argentine. Le sélectionneur avait employé le fameux terme «  loterie », ce qui l’a fait souffler cette fois quand on le lui a rappelé. Il y a un certain paradoxe à être un pragmatique et à ne pas considérer que l’on peut avoir ne serait-ce qu’un petit impact sur ces détails, même dans un exercice aussi aléatoire. « C’est toujours la même, c’est un rapport de force entre le tireur et le gardien, a-t-il répété. Ce n’est pas que je considère que ça ne se travaille pas, mais je suis convaincu, et mon passé de joueur me donne des informations, qu’il est impossible de récréer une situation, sur un plan psychologique, entre l’entraînement et un match avec une prolongation qui nous amène jusqu’à 120 voire 143 minutes pour nous au Mondial. […] On peut prévoir, mais il y a des choses qu’on ne peut pas maîtriser. » Ne pas maîtriser, voilà peut-être le cauchemar de Deschamps, adepte du contrôle en toutes circonstances et qui espérera voir ses Bleus se frayer un chemin jusqu’au trophée cet été sans avoir à passer par une séance de tirs au but.

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Par Clément Gavard, au siège de la FFF

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