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Bleus : la recherche de l’assaut
Au terme d'une pâle semaine pour le football français, marquée par le nul des Bleus face à l'Ukraine (1-1) et par la défaite des Bleuets contre le Danemark (0-1), l'équipe de France est attendue au Kazakhstan pour disputer un match que ses joueurs n'aiment pas jouer. Drôle de dimanche en perspective.
Depuis mercredi soir, il n’y en a de nouveau que pour lui. Lui, c’est le bloc bas, ce château fort tactique utilisé pour fermer les espaces à double tour et que l’on monte pour « stopper » un adversaire avant de chercher à potentiellement le vaincre. Difficile de faire casse-tête plus primaire : lorsqu’il est bien ficelé, le bloc bas force l’équipe prisonnière à faire et défaire des nœuds par le mouvement tout en mettant de la vitesse dans les transmissions, au risque de se battre dans le vent. Là a été tout le problème de l’équipe de France au cours de son premier match de la semaine, ce que Didier Deschamps a concédé après une étrange bataille contre l’Ukraine (1-1) : « Face à un adversaire qui nous oppose un bloc dense, il faut plus de justesse, plus de mouvements. L’Ukraine est venue pour bien défendre. On avait vu leurs vingt derniers matchs, ils n’avaient jamais joué dans cette organisation (un 5-3-2 avec des lignes très compactes et construit pour éteindre Mbappé, NDLR). Je ne critique pas, c’est un choix de Shevchenko, et il a eu raison, surtout qu’on ne peut pas dire qu’on a beaucoup sollicité leur gardien en deuxième période… C’est toujours compliqué face à un adversaire regroupé, ça réduit les espaces et les intervalles. » Ça force, surtout, à se creuser les méninges pour obtenir de l’air et des cartouches dans des contextes tactiques étouffants, au risque de se faire punir comme les Bleus en seconde période mercredi soir (1-1), alors que l’Ukraine n’a pas cadré la moindre frappe en 90 minutes.
Invité dans la journée de jeudi à évoquer la problématique du bloc bas, Adrien Rabiot, trop neutre et qui a souvent évolué trop bas la veille, a tiré dans le même sens que son sélectionneur. « On sait que toutes les équipes du groupe vont jouer comme ça, a-t-il alors détaillé. C’est à nous de trouver des solutions, même si, même quand on le sait, ce n’est jamais facile. C’est sûr que ça va être des matchs compliqués. Là, dans mon cas, redescendre, c’était pour pouvoir repartir de plus bas et attirer les attaquants adverses… Mais il y avait beaucoup de densité dans l’axe, c’était difficile de trouver des solutions dans le cœur du jeu. La solution face à ces équipes-là, c’est de jouer vers les côtés, de dédoubler. Je pense qu’on s’est parfois empêtrés à jouer un peu trop axial. Il faut savoir lire les matchs et exploiter les failles. » Sinon, on peut finir la soirée avec une drôle de note : deux points de perdus, peu de tentatives dangereuses (trois frappes cadrées seulement sur 18 tentées) et la sensation d’avoir vu les Bleus dialoguer dans le vide d’abord, puis se perdre totalement lors de la dernière demi-heure malgré un scénario défavorable sans que Deschamps ne réussisse à apporter la moindre réponse.
Le feu offensif ne devrait pas être aussi facile à éteindre
Plus embêtant, ce France-Ukraine s’inscrit dans une suite de performances plutôt molles et vient confirmer qu’à force de ne pas choisir de style, Didier Deschamps voit le plus souvent, à l’exception notable du match gagné au Portugal en novembre (0-1), ses hommes se contenter de matchs moyens, réglés grâce au talent individuel de certains joueurs. Freinés dès leur premier match qualificatif au Mondial 2022, les Bleus ont rendez-vous dimanche en terre inconnue, au Kazakhstan, où l’équipe de France n’a jamais mis les pieds et où elle doit chasser deux choses : des points et des doutes. « C’est un déplacement compliqué et ce n’est pas les matchs que l’on préfère jouer, ça, c’est clair, a soufflé Rabiot cette semaine. Le voyage va être long et il va falloir combattre, parce qu’on va être attendu. Au-delà du physique, c’est surtout dans la tête qu’il faut se préparer. Il faut mettre tout ce que l’on a. » Au cours des derniers jours, le même message a été envoyé par les différents acteurs, que ce soit Deschamps, Lloris, Rabiot ou encore Lucas Hernandez : s’inquiéter ne sert à rien, l’équipe de France va réagir et enfin faire évoluer une histoire avec ballon qui n’évolue pas depuis plusieurs années malgré une finale d’Euro et un sacre mondial.
« Là, ce que j’ai aimé en première période, c’est qu’on est allés les chercher, qu’on a pris des risques, qu’on a parfois été en un contre un derrière, a appuyé Lloris mercredi après la rencontre, comme pour pousser ses potes vers plus d’audace. Maintenant, il faut être capables de nous améliorer dans l’utilisation du ballon, d’être plus lucides, plus directs et plus agressifs après la récupération du ballon. » Il va falloir l’être dès dimanche, sans N’Golo Kanté, forfait, et avec un onze de départ qui devrait être bousculé (Martial et Dembélé sont annoncés titulaires sur les ailes). Un onze où pourrait quand même figurer Kylian Mbappé, verrouillé, mais surtout trop prévisible contre l’Ukraine. Problème : éteindre le feu offensif tricolore ne devrait pas se résumer à éteindre la mobylette de Bondy, car si trois joueurs adverses s’occupent de lui couper le contact, des espaces s’ouvrent dans d’autres zones, et les Bleus ont des armes, notamment Coman, pour faire des étincelles. Encore faut-il réussir à le trouver au bon endroit et au bon moment, encore faut-il que l’ensemble soit en mouvement, encore faut-il que le rythme soit français et non inexistant. Dans un groupe à cinq candidats, chaque point perdu compte, et Didier Deschamps le sait, lui qui a déjà connu l’enfer d’un barrage en novembre 2013 et d’une autre campagne à remous avant le Mondial 2018. À Noursoultan, dimanche, où les Bleus ont été accueillis par un tapis enneigé et des températures qui pourraient transformer n’importe quel homme en Mister Freeze, c’est un nouveau château fort à attaquer qui attend son groupe. Un assaut qu’il faudra surveiller de près.
Par Maxime Brigand